Cédric Lépine (avatar)

Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

Abonné·e de Mediapart

3658 Billets

6 Éditions

Billet de blog 10 novembre 2016

Cédric Lépine (avatar)

Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

Abonné·e de Mediapart

Crise des missiles, crise du couple américain puritain

Putnam’s Landing est une paisible ville de banlieue à 80 km au nord de New York. Depuis sa création, explique le narrateur, il ne s’y est rien passé. Mais c’est chose révolue avec l’arrivée de l’armée et son projet ultrasecret, mêlé aux déboires conjugaux d’Harry Bannerman.

Cédric Lépine (avatar)

Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
© DR

Sortie DVD : La Brune brûlante de Leo McCarey

Le ton explosif et irrévérencieux de Leo McCarey, notamment connu pour ses films avec les Marx Brothers (La Soupe aux canards (Duck Soup), 1933) se retrouvent ici dans son avant-dernier long-métrage. On y voit apparaître un jeune acteur talentueux, bourré d’énergie qui ne manque pas de se frotter dans les divers registres du comique : Paul Newman. Même s’il ne semble pas toujours lui-même convaincu par son propre rôle, ajoutant dans la surenchère de son personnage, il est saisissant de le voir se balancer au bout d’un lustre de maison, complètement soûl et se démenant comme il peut pour échapper aux charmes de sa voisine. C’est là aussi une gageure, même s’il reste nettement plus convaincant la même année dans le registre dramatique dans deux parmi ses plus notables interprétations : Le Gaucher d’Arthur Penn et La Chatte sur un toit brûlant de Richard Brooks. On comprend aussi que le film tente de se rééquilibrer dans une seconde partie où le personnage principal joué par Paul Newman est éclipsé par les trames périphériques.
Le film commence avec l’idée initiale de 7 ans de réflexion de Billy Wilder où un homme présenté comme le modèle du rêve américain d’alors (jolie épouse au foyer, deux enfants, jolie maison en banlieue, travail en complet cravate) se voit mis en branle du fait d’un équilibre du couple vacillant : la comédie de la tentation de l’adultère peut dès lors commencer. L’équilibre du couple Harry & Grace Bannerman (joué à la ville comme à l’écran par le couple Paul Newman / Joanne Woodward) est complètement fragilisé par les actions citoyennes de l’épouse, son rôle de femme au foyer suractivé qui empêche audit couple d’avoir une sexualité. La satire de Leo McCarey égratigne le modèle familial américain puritain, dans cette localité où le puritanisme est entretenu depuis des siècles et où les jeunes femmes espèrent trouver leur liberté dans les bras des soldats fleurant le goût du Sud lointain. La première partie du film est bourrée d’énergie et l’on sent bien la patte irrévérencieuse du cartooniste Frank Tashlin qui devait initialement réaliser le film. La seconde partie ne tient plus ses promesses en se perdant dans des méandres d’intrigues secondaires, oubliant très rapidement les causes de l’adultère potentiel dans le couple, pour une fin bien morale, malgré le dernier gag. De même, il découle du film une certaine misogynie à représenter les femmes activistes comme des êtres qui s’ennuient et qu’il ne faut jamais prendre au sérieux : au final, alors que toute l’activité du village était portée par des femmes, ce sont les notables masculins qui sont invités à inspecter la base de l’armée ! L’idéologie de McCarey n’est pas dénué de conservatisme : c’est son regard, totalement assumé, mais dans lequel tous les spectateurs ne sont pas obligés de se retrouver. Il reste tout de même un film dans son ensemble bien mis en scène, avec un souci méticuleux de soigner la satire sarcastique, sans au fond s’en prendre aux institutions du modèle américain qu’il pointe du doigt.

Illustration 2

La Brune brûlante
Rally 'Round the Flag, Boys!
de Leo McCarey
Avec : Paul Newman (Harry Bannerman), Joanne Woodward (Grace Oglethorpe Bannerman), Joan Collins (Angela Hoffa), Jack Carson (le capitaine Hoxie), Tuesday Weld (Comfort Goodpasture), O. Z. Whitehead (Isaac Goodpasture, père de Comfort), Dwayne Hickman (Grady Metcalf, le prétendant de Comfort), Gale Gordon (le brigadier-général), W. A. Thorwald
USA – 1958.
Durée : 106 min
Sortie en salles (France) : 24 juillet 1959
Sortie France du DVD : 2 novembre 2016
Format : 2,35 – Couleur
Langues : anglais, français - Sous-titres : français.
Éditeur : ESC Conseils
Bonus :
« La brune brûlante », dernier feu d’artifices, par Olivier Père, directeur du cinéma d’Arte France (20’)
Dans la même collection…

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.