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Cédric Lépine

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Billet de blog 11 mai 2018

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Cannes 2018 : «Il se passe quelque chose» d’Anne Alix

À Avignon, Dolores, missionnée pour écrire un guide touristique gay-friendly, sauve Irma d’une tentative de suicide à Avignon. Ensemble, elles parcourent dès lors les routes de Provence en quête d’elles-mêmes au fil de multiples rencontres.

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ISPQC - Extrait 2 © Shellac

Film programmé au sein de la sélection ACID

Dans ce road movie féminin héritier indirect de Thelma et Louise, le buddy movie est réinterroger à l’aune de l’état du monde contemporain. La structure narrative principale repose sur l’opposition entre deux personnages de fiction : d’un côté la modernité incarnée ayant un emploi qui la conduit à travailler sans attache géographique et émotionnelle, et de l’autre une femme qui ne peut plus se contenter d’être la « femme de » suite à la mort de son époux. C’est précisément cette création initiale de personnages de fiction qui en fait le squelette du film sur lequel la chair des rencontres humaines s’établit. La fiction devient ainsi un prétexte à découvrir la réalité documentaire d’un contexte social en déshérence, comme si la transmission intergénérationnelle des valeurs d’un ordre du monde ne pouvaient plus se produire. C’est tout cet insondable que le parti pris du film interroge et qu’illustre avec perspicacité la part initialement incongrue de l’apparition dans le récit dans une dimension parallèle au film de l’équipe E.S.P.R.I. menant des enquêtes paranormales. Les personnages de fiction en quêtent d’eux-mêmes s’efforcent de retrouver leur place dans le monde, qu’ils soient intégrés ou non par une activité professionnelle rémunératrice. La part documentaire de l’intégration des acteurs non professionnels au film vient questionner cette destruction de lien avec le passé causé par les lois intransigeantes du capitalisme moderne. Avec subtilité, Anne Alix réussit à saisir cet indéfinissable contexte social contemporain, où l’on traverse les frontières, au risque de sa vie comme ces migrants sortis de la mer dans une séquence nocturne quasi onirique, en quête d’une nouvelle vie par le travail. Les multiples langues (espagnol, roumain, bulgare, etc.) se croisent et tentent de nouer de nouveaux contacts dans un contexte socio politique démagogique flirtant dangereusement avec la xénophobie décomplexée. Le film est une invitation à ouvrir ses portes, prendre de la distance avec l’omniprésence anxiogène des grands médias pour sentir avec bienveillance qu’il se passe quelque chose.

Il se passe quelque chose
d’Anne Alix

France, 101 min, 2018

Avec : Lola Dueñas (Dolores), Bojena Horackova (Irma), Serge Geairain (Jean Mohammed Tora San Be (le coureur), Dora Manticello (Dora) Alexandre Violet (l'amant)
Scénario : Anne Alix et Alexis Galmot
Images : Aurélien Py
Son : Maxime Gavaudan, Pierre-Alain Mathieu et Fred Bielle
Montage : Anna Riche et Céline Bellanger
Musique : David Merlo, Damien Ravnich et Bertrand Wolff
1er assistant réalisateur : Luis Bértolo
Directeur de production : Jacques Reboud
Régisseur Bastien Martin
Directrice de casting : Judith Fraggi
Production : Shellac Sud
Producteurs exécutifs : Thomas Ordonneau, Francine Cadet
Producteur Thomas Ordonneau
Distribution : Shellac
Ventes internationales : Shellac

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