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Billet de blog 14 octobre 2025

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7e édition du Festival du Film social : entretien avec Alain Lopez

Alain Lopez est le président de l’association La 25e image organisatrice du Festival du Film social qui se déroule en divers lieux en France du 13 au 16 octobre 2025.

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Cédric Lépine : Pouvez-vous rappeler le contexte dans lequel a été créé le festival ?

Alain Lopez : L’association la 25e Image a été constituée en 2019 par plusieurs établissements de formation en travail social et de grands acteurs du social (l’URIOPSS IDF et la FAS). L’objectif était d’assurer la promotion du travail social au travers de l’organisation d’un festival de films. Les métiers du social sont désertés. La représentation cinématographique est un bon moyen d’attirer des vocations vers ces métiers en suscitant l’empathie à l’égard des personnes en situation de vulnérabilité. C’est ce que nous pensons. Par ailleurs, un film, de fiction, d’animation ou documentaire, permet plus qu’un long traité pour sensibiliser tout un chacun au vécu des personnes en difficulté sociale. Ainsi peut-on espérer que chacun sera sans doute plus attentif à la situation de ceux qu’il côtoie dans la vie quotidienne.

L’objectif est d’organiser un festival qui soit un événement à la fois culturel et social. Ce qui n’est pas si facile à tenir. Culturel parce que nous cherchons à sélectionner des films de tout métrage de grande qualité cinématographique. Social parce que nous cherchons à intéresser le plus grand nombre aux difficultés des plus vulnérables.

Ces objectifs nous ont conduit à concevoir un festival multisite pour être atteints. Ce qui est une autre difficulté.

C. L. : Quelles ont été les grandes lignes d'évolution et de construction du festival au fil des années ?

A. L. : Nous nous sommes tenus à la ligne que je viens d’indiquer mais nous avons mesuré à quel point il n’était pas facile de lui rester fidèle.

L’extension géographique du festival a progressé peu à peu, d’année en année. Il fallait apprendre à réaliser un tel festival et à le faire en multisites. Et cela avec des forces limitées. Cette progression s’est faite à partir de nouveaux sites nous sollicitant spontanément pour nous rejoindre.

L’ambition est de faire en sorte que chaque site de projection des films de la sélection se saisisse du festival pour faciliter le développement d’une dynamique d’acteurs locaux réunissant des établissements de formation, des associations œuvrant dans le champ du social, des établissements publics (ARS, CAF), des collectivités territoriales. L’engagement de ces dynamiques est inégal selon les territoires et progresse plus ou moins rapidement. Quelques exemples sont à signaler : la Bretagne, l’Essonne, le Centre-Val de Loire.

L’autre objectif est qu’en focalisant l’attention sur le vécu des personnes en situation de vulnérabilité, à travers le festival de films, pendant trois jours, d’autres actions à la fois culturelles et sociales se conçoivent sur les territoires en articulation (expositions photographiques, représentations théâtrales…). Nos progrès restent très modestes mais cela avance.

C. L. : Comment s’est développé et s’organise un festival multisite sur le territoire français ? Quels sont vos appuis locaux ?

A. L. : Un festival multisite, pour se développer, exige d’accepter une mutualisation de tout ce qui serait lourd à porter par un site tout seul (sélection des films, négociation des droits de projection, accès aux films, communication générale…). Cela exige aussi que chaque site s’organise en toute autonomie pour assurer la tenue des projections et les événements associés souhaités localement (débats, etc.). Il faut donc mettre en place une coordination la plus efficace possible.

Les appuis locaux sont en général des centres de formation en travail social, mais de plus en plus s’impliquent des associations d’établissements sociaux ou médico-sociaux, des collectivités territoriales.

La diversité des appuis demande à ce que chacun, dont les missions ne couvrent pas tout le champ des problématiques sociales abordées par les films de la sélection, reconnaissent un commun : les personnes concernées ne se découpent pas en tranches mais vivent plusieurs et différentes difficultés, les travailleurs sociaux ont des parcours professionnels les amenant à changer de champ d’action.

Illustration 2
Espace Colucci à Montrouge lors du festival de 2024 © DR

C. L. : Comment est financée la manifestation ? Quels sont vos partenaires autres que financiers ?

A. L. : Le financement est assuré par trois grandes sources :

Les cotisations des membres (personnalités morales).

Les soutiens financiers de partenaires (ministère des solidarités, mairies, départements, communauté de communes, communauté d’agglomérations, MAIF IDF, associations).

L’achat des billets d’entrée aux séances de projection (3 heures de projection avec un court débat).

En dehors des partenariats financiers, les soutiens peuvent prendre la forme de mise à disposition gratuite de salles de projection. Peu à peu des cinémas se sont associés au festival, au point en 2025 de représenter la moitié des salles de projection.

C. L. : Quelles sont les activités du festival tout au long de l'année ?

A. L. : Il n’y en a presque pas. Nous aimerions les développer.

Nous conseillons et aidons des acteurs sociaux qui souhaitent projeter des films sur une thématique qui les intéresse dans l’année. Quelques exemples : la Mairie de Paris l’a fait, le ministère des solidarités l’envisage cette année, l’ARS du Centre Val-de-Loire va le faire sur toute sa région avant la fin de cette année.

C. L. : Selon quels critères choisissez-vous les films de la programmation ?

A. L. : Les films sélectionnés se saisissent d’une problématique sociale en entrant par le vécu des personnes concernées. Ces problématiques portent sur les femmes victimes de violences, les enfants maltraités, les difficultés de la parentalité, les migrants, la perte d’autonomie des personnes en raison de leur âge ou de leur handicap, les personnes en situation de précarité sociale…

Il n’y a donc pas de thématique privilégiée. La qualité cinématographique du film est le première critère. Ainsi, une année donnée, une même thématique peut être abordée par plusieurs films de la sélection (l’année dernière plusieurs films, dont le film choisi pour faire l’ouverture traitaient de situation de migrants, cette année il se trouve que plusieurs films traitent des agressions sexuelles subies par des enfants). Le second critère est que le sujet est abordé à partir du vécu des personnes concernées.

Ainsi, nous ne sélectionnons pas de films qui traiteraient d’un modèle de société souhaitable ou d’une politique publique. Les films de la sélection sont en amont. Ils cherchent en quelque sorte à donner la parole aux personnes elles-mêmes, en difficulté. Bien sûr sont croisées des politiques publiques, mais ce ne sont pas les points d’entrée des films sélectionnés. A noter que la production de films correspondant à nos recherches est abondante, dans tous pays.

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