Sortie DVD de M. Peabody et Sherman, les voyages dans le temps, de Rob Minkoff
Mr. Peabody est un chien d’une intelligence incommensurable. Son génie dépasse même l’intelligence humaine. Lorsqu’il tombe nez à nez avec un bébé abandonné, il décide de l’adopter et le prénomme Sherman. Avec Mr. Peabody, Sherman apprend ses leçons d’histoire en voyageant dans le temps. Lorsqu’il est en âge d’entrer à l’école, Sherman dispose d’une large connaissance mais doit faire face à la jalousie des autres et en particulier d’une fille de son âge.

Il y a tout juste vingt ans, en 1994, Rob Minkoff réalisait son premier long métrage : Le Roi lion. Entre temps, il a continué dans l’animation avec les deux Stuart Little. Pour son retour dans l’animation, il adapte une série télévisée des années 1960 produite par Jay Ward. Cette version cinéma est produite par DreamWorks Animation, un géant de l’animation aux États-Unis (avec un chiffre d'affaires annuel qui s'élève à 700 millions de dollarsselon l'AFP). Du côté des voix, on notera l’atout maître de la version française avec un Guillaume Gallienne prêtant sa voix à Mr. Peabody. Si la série télévisée originelle est inédite en France, impossible de se sentir dépaysé dans ce film d’aventures où les héros parcourent le temps comme d’autres parcourent les continents. À cet égard, le déplacement temporel permet à la fois un déplacement dans le temps et l’espace, puisque l’action se déroule successivement en France sous la Révolution, en Italie sous la Renaissance, en Égypte durant l’Antiquité, dans l’Antiquité grecque en pleine guerre de Troie. Il ne faut pas attendre du récit de respecter la vérité historique : ce n’est en aucune manière un cours d’histoire mais bien davantage une vision sommaire et très touristique du rapport à l’autre, réduit à des caricatures. Les personnages iconiques de l’histoire sont convoquées comme dans un palais de cire. D’ailleurs, les confrontations avec ces personnages et la familiarité qui en écoule dans leurs relations avec les contemporains, n’est pas sans rappeler la proposition de La Nuit au musée de Shawn Levy. Vous l’aurez compris, le film réutilise tous les ingrédients qui ont fait le succès d’autres films. Le résultat répond bien à cette attente, puisque le film a reçu un bon accueil public. Il faut dire que le récit se suit à un rythme trépidant d’aventures plus étonnantes les unes que les autres. Mais c’est un produit qui se consomme vite et ne conserve que peu de saveur au-delà même de sa vision. Le graphisme n’est guère créatif même s’il y a un vrai souci de vraisemblance dans les mouvements des personnages.
À un siècle de distance, on peut également voir dans ce film l’influence d’Intolérance de David W. Griffith : lui aussi s’intéressait à revisiter les âges de l’Humanité pour y déceler l’intolérance des sociétés passées opposées à une histoire présente aux États-Unis où l’histoire n’est jamais définitivement écrite alors que le fond d’intolérance est également présent. Le parallèle avec cette figure tutélaire de l’histoire du cinéma américain n’est pas anodin. Mais dans le contexte d’une production animée familiale qui se respecte, impossible d’échapper à la morale sentencieuse, qui doit aider chaque spectateur à pouvoir grandir en s’intégrant au mieux à la société dominante. L’idéal de l’American Way of Life est bien là, avec ce parcours de chien qui arrive à se faire une place conséquente dans la société humaine (à l’instar de la richesse vertigineuse d’un Tony Stark ou d’un Bruce Wayne lui permettant de financer leurs inventions les plus folles toujours selon la justification de protéger autrui) malgré son animalité. Un hymne à l’intégration des minorités comme on ne peut guère le voir dans l’espace social contemporain. Le pan dramatique de ce mythe, est que l’intégration repose sur l’excellence de l’individu, atteignant sa liberté (le chien qui n’est plus tenu en laisse) par un surcroît de pouvoir économique. Soit le fond idéologique est issu d’une naïveté profonde de la part d’individus perdus dans leur confort matériel, soit il suit un projet de pensée unique où l’individu ne peut s’épanouir qu’en réalisant l’indescriptible American Way of Life.

Toujours est-il que si l’on s’intéresse aux relations entre les personnages, on ne peut qu’adhérer à l’idée que les parents doivent faire confiance en leurs enfants pour progressivement leur laisser la liberté de voler de leurs propres ailes (comme il en est littéralement question avec la machine volante de Léonard de Vinci). Cela ne peut suffire évidemment pour emporter l’adhésion du spectateur, mais certains à juste titre pourront argumenter : « c’est déjà ça ! »

M. Peabody et Sherman, les voyages dans le temps
Mr. Peabody & Sherman
de Rob Minkoff
Avec les voix originales de : Ty Burrell (M. Peabody), Max Charles (Sherman), Ariel Winter (Penny Peterson), Stephen Colbert (Paul Peterson), Ellie Kemper (Paula Peterson), Allison Janney (Mlle Grunion), Karan Brar (Mason), Leslie Mann (Patty Peterson), Patrick Warburton (Agamemnon), Stanley Tucci (Léonard de Vinci), Lake Bell (Mona Lisa), Mel Brooks (Albert Einstein), Zach Callison (King Tut), Dennis Haysbert
Et les voix françaises de : Guillaume Gallienne (M. Peabody), Jules Timmerman: Sherman), Garance Pauwels (Penny Peterson), Pauline Larrieu (Mlle Grunion), Frédéric Souterelle (Agamemnon), Salvatore Ingoglia (Léonard de Vinci), Omar Yami (Ay), Vincent Ropion (Paul Peterson), Marie-Eugénie Maréchal (Patty Peterson), Charles Germain (le révérend français)
USA - 2014.
Durée : 92 min
Sortie en salles (France) : 12 février 2014
Sortie France du DVD : 15 octobre 2014
Format : 1,85 – Couleur
Langues : anglais, français - Sous-titres : anglais, français.
Éditeur : DreamWorks Animation SKG
Distributeur : Fox Pathé Europa