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Billet de blog 22 juin 2020

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Les fantômes dépecés de la Chine contemporaine

Durant l’été étouffant à Changsha dans la province chinoise du Hunan, un bras humain a été retrouvé : l’inspecteur de police Bin, qui a demandé sa démission, est chargé de l’affaire. Celui-ci rencontre alors la mystérieuse sœur du disparu.

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Illustration 1
"Un été à Changsha" (Liu Yu Tian) de Feng Zu © Damned

Sortie DVD : Un été à Changsha de Feng Zu

Après plus d’une décennie en tant qu’acteur pour la télévision et le cinéma, Feng Zu réalise avec Un été à Changsha (Liu Yu Tian) son premier long métrage en tant que réalisateur en interprétant également le rôle principal d’un policier dépressif suite au suicide de la femme qu’il a aimée et dont il se sent coupable de la mort. L’histoire débute comme un thriller policier avec ses scènes classiques d’enquête autour d’un meurtre horrible : un corps découpé en plusieurs morceaux. Deux policiers antagoniques sont chargés de l’enquête et l’on imagine déjà un buddy movie policier amenant à découvrir les travers de la société chinoise contemporaine. Or, le récit et la mise en scène prennent un tout autre tournant inattendu en se concentrant sur l’un des deux policiers, âme romantique habité par un amour dont il ne peut faire le deuil. Dès lors, son enquête et toute l’énergie qu’il y mettra seront analysés à l’aune de ses propres traumatismes. Cet homme plongé avec acharnement et mécaniquement dans son travail de policier, tout en étant démissionnaire, se confronte peu à peu aux fantômes que la Chine tournée vers le futur ne peut plus admettre. Ainsi, lorsque des bouddhistes relâchent dans l’eau des poissons pour leur rendre leur liberté, dans cette même eau où des parties du cadavre ont été retrouvées, on voit au loin un horizon bouché par de très nombreuses tours d’immeubles en construction. Il se trouve que Changsha est la ville où en 2013 devait être construite la plus haute tour du monde mais la réalité géologique en a décidé autrement. Si la réalité sociologique et politique de la Chine contemporaine reste en arrière-plan dans ce film, jamais exposée frontalement, c’est bien elle qui est sans cesse retranscrite ici.

En épousant la mise en scène et la trame du récit propre au polar, Feng Zu présente avec son film un monde désenchanté, qu’il s’agisse des rapports hommes-femmes où l’amour ne semble plus permis (aucun personnage ici ne se donne cette liberté et en toute réciprocité consentie d’aimer), comme dans le milieu professionnel de la médecine ou de la police, notamment, deux corps sociaux désengagés du reste de la société. Un film chinois prometteur pour l’acteur et maintenant réalisateur Feng Zu qui offre encore un peu plus de complexité et diversité dans le panorama que l’on peut se faire du cinéma chinois contemporain.

Illustration 2

Un été à Changsha
Liu Yu Tian
de Feng Zu
Avec : Feng Zu (A Bin), Lu Huang (Li Xue), Minghao Chen (Lei), Qianru Zhang (Ting-Ting), Tianchi Liu (Qin Xin), Yu Tian (Wang Yi), Qiuhai Hou (Wu Feng), Yueling Shi (l’épouse de Wu Feng)
Chine – 2019.
Durée : 115 min
Sortie en salles (France) : 4 décembre 2019
Sortie France du DVD : 16 juin 2020
Format : 1,85 – Couleur
Langue : mandarin - Sous-titres : français.
Éditeur : Damned Films

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