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Sortie Combo Blu-ray + DVD : Butterfly Kiss de Michael Winterbottom
Michael Winterbottom fait véritablement son entrée dans le cinéma au milieu des années 1990 avec un film dérangeant, « peu aimable » et qui n’a pas fini, deux décennies plus tard, de proposer différentes versions interprétatives. Le film apparaît tout d’abord dans un contexte filmique dont le maître mot est le « no future » autour d’histoires d’amour sanglantes sur fond de road trip, qu’il s’agisse de Thelma et Louise, True Romance ou Tueurs nés côté américain. Côté anglais, l’humour noir typiquement british s’imprime sur le fond d’un traitement social, utilisant les ressources de la surenchère grandguignolesque provocatrice comme notamment chez Danny Boyle avec Petits meurtres entre amis (1994) et Trainspotting (1996). L’histoire d’amour portée par les personnages principaux de Butterfly Kiss pourrait être un hommage surréaliste aux amours impossibles et une affirmation trash du mouvement queer. Mais de nouveaux indices apparaissent : comme la chanson qu’Eunice cherche avant de choisir ses victimes, le film « n’est pas une histoire mais traite de l’amour », différence notable qui décentre totalement la fausse piste de la romance. Le surnom abrégé que se donnent les protagonistes est à cet égard éloquent : « mi/me » et « eu/you », autrement « moi » et « toi », deux faces d’une même personne. Le personnage d’Eunice interprétée avec une audace survoltée de la part d’Amanda Plummer ne serait-il pas, dans sa dimension surréelle, un pur fantasme de la trop réservée Miriam, faisant progressivement face à ses propres obscurités profondes, dans un comportement schizophrénique tout en métaphore. Dès lors, le personnage très en retrait de Miriam revient au devant de la scène avec la bonne idée des confessions face caméra en Noir & Blanc de Miriam, plus expressive qu’auprès d’Eunice durant tout le film. Allant jusqu’au bout de sa folie, Miriam n’a-t-elle pas fini par se révéler à elle-même, dans ce que toute la société a suffisamment créé d’oppression à son égard en tant que femme et en la reléguant à un rôle professionnel comportant peu d’espace pour la spontanéité individuelle ? Ce road trip meurtrier a continué d’inspirer dix ans plus tard outre Manche, puisque Patrick Grandperret a repris un scénario similaire dans son film Meurtrières. Le titre du film de Winterbottom met quant à lui l’accent sur une impossible innocence, celle de ce jeu enfantin qui consiste à se faire des baisers papillon en se frottant le bout des cils. C’est précisément cette innocence et ce qu’elle recèle qui est ici interrogée, sans épuiser ses tiroirs à interprétations, deux décennies plus tard.
Butterfly Kiss
de Michael Winterbottom
Avec : Amanda Plummer (Eunice), Saskia Reeves (Miriam), Des McAleer (Eric McDermott), Lisa Riley (Danielle), Freda Dowie (Elsie), Paula Tilbrook (Ella), Fine Time Fontayne (Tony), Elizabeth McGrath (une serveuse), Joanne Cook (Angela), Shirley Vaughan (une serveuse), Paul Bown (Gary), Emily Aston (Katie), Ricky Tomlinson (Robert), Katy Murphy (Judith)
Royaume-Uni – 1995.
Durée : 88 min
Sortie en salles (France) : 10 janvier 1996
Sortie France du DVD : 5 septembre 2017
Format : 2,40 – Couleur
Langue : anglais - Sous-titres : français .
Éditeur : Outplay
Bonus :
le livret (16 pages) : Entretien entre le réalisateur, Michel Ciment et Yann Tobin
You & me : amour et marginalité par Yann Tobin (30’)
Bande-annonce