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Billet de blog 29 juin 2015

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La mascarade démocratique ne sauvera pas le monde

Sortie DVD de Kingsman, de Matthew Vaughn

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Illustration 1
© 20th Century Fox

Sortie DVD de Kingsman, de Matthew Vaughn

Au cours d’une mission au Moyen-Orient, un espion sauve la vie de son groupe en se sacrifiant. Dix-sept ans plus tard, le fils de cet espion, Gary « Eggsy », a des démêlés avec la police et fait appel à Harry Hart pour le sortir d’affaire. Celui-ci lui propose d’intégrer la secrète organisation non gouvernementale à laquelle appartenait son père défunt, nommée Kingsman, comprenant des espions qui suivent le code des chevaliers de la Table Ronde.

Qu’il s’agisse de Kick-Ass, X-Men : le commencement, Kingsman : services secrets, Matthew Vaughn, dans les films qu’il réalise semble s’intéresser à la figure de l’adolescent et la manière dont celui-ci peut se faire une place toute personnelle dans des films de genre où le personnage central est une incarnation du héros. À l’instar de Nicolas Cage dans Kick-Ass, Colin Firth dans Kingsman incarne la figure paternelle héroïque qui va transmettre à l’adolescent le goût pour l’héroïsme. Alors que les figures héroïques centrales sont de plus en plus désuètes, contestées dans les valeurs qu’ils incarnent, la place est ici faite aux adolescents, cette nouvelle génération qui doit se réapproprier le monde d’hier aux idéologies pourtant si contestables. En effet, qu’il s’agisse du super-héros ou de l’agent secret, ces héros ont été au service de l’ordre idéologique de leurs époques. Renouveler le genre cinématographique demande dès lors un gros travail : fini les figures paternelles héroïques des films de John Ford, de la conquête de l’Ouest comme d’un certain Royaume-Uni qui fantasmait encore sa mainmise sur le monde à l’époque où il devait renoncer à ces colonies aux quatre coins du monde. Ainsi est apparu James Bond d’un Ian Fleming nostalgique de cet ancien monde. Le film d’espionnage qu’est Kingsman change ici les règles du jeu : les espions éponymes (Kingsman : les hommes du roi) ne sont plus au service du gouvernement comme James Bond, mais d’un groupe privé monarchique. Le néoconservatisme est alors clairement énoncé et l’on se moque aisément d’une politique démocratique qui n’a de démocratique que le nom : ainsi, tous les élus des États dits démocratiques ne tardent pas à se rallier au projet génocidaire de Richmond Valentine (brillamment interprété par un Samuel L. Jackson toujours très inspiré quand il faut créer un méchant hors normes) et le scénario les punira sous la forme d’un feu d’artifice final iconoclaste et jouissif teinté d’humour noir. Pour renchérir sur le monarchisme, celle qui incarne la résistance est une princesse. Déjà Skyfall de Sam Mendes (2012) se terminait avec un retour aux bonnes vieilles valeurs élitistes, misogynes et antidémocratique, le film ne cessant de fustiger l’inefficacité de la démocratie face au péril terroriste. La récurrence de ce thème n’est pas anodine, surtout de la part d’un pays (le Royaume-Uni) qui tente de se démarquer comme modèle politique au niveau international.

Côté action, Matthew Vaughn développe une mise en scène pleine de prouesses dans au moins deux séquences mémorables : celle du pub au début et celle dans l’église plus tard. Pour concevoir ces scènes, il multiplie les points de vues de caméra, dilate le temps, prend un soin tout particulier pour toutes les chorégraphies réglées au millimètre près. De belles prouesses qui reposent tout simplement sur le fait de « repenser l’action ». Reste à savoir au service de qui et de quelles valeurs ce divertissement cinématographique est fabriqué.

Illustration 2

Kingsman : services secrets

Kingsman: The Secret Service

de Matthew Vaughn

Avec : Taron Egerton (Gary « Eggsy » Unwin), Colin Firth (Harry Hart / Galahad), Samuel L. Jackson (Richmond Valentine), Mark Strong (Merlin), Michael Caine (Arthur / Chester King), Sophie Cookson (Roxy), Geoff Bell (Dean), Edward Holcroft (Charlie), Jack Cutmore-Scott (Rufus), Sofia Boutella (Gazelle), Jack Davenport (Lancelot), Samantha Womack (Michelle Unwin), Mark Hamill (le professeur James Arnold), Hanna Alström (la princesse Tilde)

Royaume-Uni, USA - 2014.

Durée : 124 min

Sortie en salles (France) : 18 février 2015

Sortie France du DVD : 8 juillet 2015

Format : 2,40 – Couleur

Langues : anglais, français - Sous-titres : anglais, français.

Éditeur : 20th Century Fox

Bonus :

« La formation d’un super espion » : de la BD à l’écran
Galeries photos :

les coulisses

les décors

les maquettes

Bande-annonce

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