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Billet de blog 29 août 2025

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Rivière de nuit (Yoru no kawa) de Kozaburo Yoshimura

Dans la ville japonaise de Kyoto préservée des attaques militaires, la tradition artisanale mutliséculaire se perpétue notamment dans une teinturerie familiale. où Kiwa, qui travaille avec son père, crée de nouveaux accessoires de modes. Libre et indépendante, la jeune Kiwa s'éprend du professeur et chercheur universitaire Takemura, plus âgé et marié.

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Illustration 1
Rivière de nuit (Yoru no kawa) de Kozaburo Yoshimura © Carlotta Films

Sortie Blu-ray : Rivière de nuit de Kozaburo Yoshimura

S'il reste trop peu méconnu des cinéphiles contemporains par rapport à ses collègues Ozu, Kurozawa, Mizoguchhi, Naruse, etc., Kozaburo Yoshimura a été l'un des premiers ambassadeurs du cinéma japonais en Europe avec notamment Le Roman de Genji (源氏物語, Genji monogatari, 1951) primé au festival de Cannes de 1952.

Kozaburo Yoshimura est très prolifique et populaire au Japon dans les années 1950 lorsqu'il réalise Rivière de nuit (Yoru no kawa, 1956) qui ose notamment employer la couleur a une époque où cet usage est non seulement cher mais encore minoritaire et donc très peu maîtrisé. Il ne s'agit pas là d'une manière de se distinguer mais bien d'accompagner l'héroïne qui voue sa créativité à l'assemblage des couleurs sur tissu. Ainsi, les couleurs permettent d'appréhender tout un monde chromatique auquel l'héroïne est sensible dans son inspiration. Le film s'apprécie de cette manière par toutes ses compositions picturales invitant une sémantique méconnue dans l'intrigue, comme ces fleurs filmées avec une grande délicatesse et une profonde attention dont les plans s'insèrent avec méticulosité au montage.

La couleur vient également imposer la thématique omniprésente de la modernité dans un monde nippon ancestral fier de son histoire. Ainsi, l'héroïne qui s'habille de manière traditionnelle est paradoxalement dans ce récit une parfaite incarnation de la modernité et de l'émancipation féminine dans son parcours où elle refuse le poids classique du mariage arrangé pour vivre pleinement selon ses aspirations, quitte à rompre avec un ordre ambiant en s'éprenant notamment d'un universitaire marié. Et si le scénario ne s'enferme jamais dans l'espace étroit d'une histoire d'amour qui n'aurait d'autre finalité qu'elle-même, le film le doit beaucoup à la coscénariste et romancière extrêmement talentueuse Sumie Tanaka, qui a offert au cinéma japonais de cette décennie le meilleur regard féministe également développé dans sa collaboration avec Mikio Naruse.

Kozaburo Yoshimura ouvre avec Rivière de nuit sans cesse par ses compositions picturales, son intrigue et l'interprétation sans failles de ses interprètes une œuvre qui traverse le temps avec un goût délicieux du sens du sublime.

Illustration 2

Rivière de nuit
Yoru no kawa
de Kozaburo Yoshimura
Avec : Ken Uehara (le professeur Takemura), Fujiko Yamamoto (Kiwa), Keizô Kawasaki, Michiko Ai, Kazuko Ichikawa, Michiko Ono, Shunji Natsume, Yôichi Funaki, Hikaru Hoshi, Kaketsu Yamacha, Eijirô Tôno, Eitarô Ozawa
Japon – 1956.
Durée : 104 min
Sortie en salles (France) : 6 mars 2024
Sortie France du Blu-ray : 19 août 2025
Format : 1,37 – Couleur
Langue originale : japonais - Sous-titres : français.
Éditeur : Carlotta Films

Bonus :
« Femmes en couleurs » : Entretien avec Pascal-Alex Vincent, cinéaste et enseignant à l’Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3 (2025, HD, 16’24”)
Bande-annonce 2024 (1’41”, VOST)

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