Tandis que les éléments commencent à se préciser, il semble qu'un attentat a été déjoué dans le Thalys entre Amsterdam et Paris hier en fin d'après-midi.
C'est moins l'identité du présumé agresseur (identité dévoilée mais qui reste à confirmer, car la personne interpellée a donné deux identités différentes) que le mode opératoire, l'armement et quelques indices qui font immanquablement penser à un attentat terroriste émanant d'un jihadiste. C'est avant tout la présence d'une arme blanche en plus des armes de poing (Kalashnikov AK-74 et pistolet automatique) qui relie cette opération aux attaques jihadistes. Le jour choisi pour l'opération (un vendredi) accrédite également le mobile terroriste jihadiste.
Plusieurs questions restent posées et il faudra du temps pour avoir la confirmation de tous les détails. Relevons d'ores et déjà certains points peu mis en valeur par les médias :
1) le premier passager à intervenir est un français (oublié parmi les "héros"), qui a bloqué semble-t-il l'homme à sa sortie des WC
2) il semblerait que l'attaque ait échoué d'abord pour un problème d'enrayage (qui concernerait donc le pistolet - d'ailleurs sur les vidéos, l'AK-74 n'a pas de chargeurs engagés).
Ce n'est qu'après cet échec, alors que l'homme cherchait à échapper et/ou rejoindre sa place pour récupérer d'autres armes, que les deux soldats américains (qui ne sont pas des Marines) interviennent et le neutralisent.
Il reste donc beaucoup de questions :
- Quelle arme a été utilisée d'abord (AK-74 ou pistolet) ? Pourquoi y a-t-il eu si peu de tirs ?
- Comment s'explique la blessure grave subie par un passager franco-américain (qui n'était pas selon les dernières informations impliqués dans les tentatives de neutralisation) ?
- Si la thèse jihadiste (la plus probable) est confirmée, à quelle réseau le suspect est-il raccordé ? et quel était son objectif ?
En ce qui concerne les premières analyses que l'on peut faire (même s'il manque des éléments), il y a trois aspects qui me marquent :
D'abord, le caractère amateur et mal préparé de l'attaque (aussi bien d'un point de vue matériel que psychologique), qui est donc plus un aveux de faiblesse des jihadistes qu'autre chose (quand on pense aux attentats des années 90 et 2000, ce n'est plus une baisse, mais un effondrement des moyens jihadistes contre les pays occidentaux - et c'est tant mieux).
Ensuite, l'impossibilité de prévoir, et encore moins d'arrêter ce genre d'attaques (j'avais d'ailleurs écrit ici que les attaques contre les moyens de transport étaient abandonnées, ce qui est donc erroné et démenti). Et les différentes lois sécuritaires démontrent là leur inutilité quant aux objectifs affichés par les politiques qui les votent. L'avenir montrera leur dangerosité pour les citoyens et démocrates sincères.
Enfin, la France reste une cible et le succès de la saison touristique de cet été fait du secteur du tourisme une cible à la fois "facile" et "prioritaire" pour affaiblir un ennemi (toujours du point de vue des jihadistes).
Pour conclure, la lutte contre le terrorisme jihadiste est donc au point mort, les succès ne tenant qu'à des initiatives individuelles imprévisibles voire des miracles. Le seul volet policier / sécurité / renseignement n'est donc pas suffisant pour enrayer les dynamiques de recrutement et de développement d'un phénomène qui nous confronte à un défi majeur.
La victoire passera nécessairement par une politique globale, ambitieuse et éclairante, en commençant par résoudre les désastres politiques, stratégiques et humains vécus par les populations vivant dans les zones de guerre de l'Afrique du nord, de l'Afrique sub-saharienne, du Proche et du Moyen-orient, sans oublier de répondre aux besoins d'un jeunesse européenne sans autre avenir qu'une Europe moribonde et ordo-libérale.
C'est bien plus qu'une énième loi "scélérate" qui affaiblira les jihadistes.