Tandis que certains glosent déjà sur l'affaiblissement ou le "reflux" de Daesh en Iraq et en Syrie, les forces d'ISIS sont passées à l'offensive après leurs défaites récentes au nord de la Syrie, face aux forces loyalistes d'Assad et aux Kurdes.
ISIS a perdu des positions importantes, dont le passage sur la frontière turque de Tal-Abyad, ainsi que la base militaire de la brigade 93 à 50km au nord de Raqqa. L'avance des Kurdes soutenus par les frappes aériennes de la coalition internationale menace donc désormais Raqqa, la capitale administrative du nouveau Califat d'ISIS.
Au moment, à l'ouest, les troupes syriennes d'Assad ont repris des positions sur la route vers Palmyre.
Pourtant, ISIS est repassé àl'offensive depuis une semaine, grâce à un de ces redéploiements rapides qu'il maîtrise parfaitement. Par des changements de centres de gravité, ISIS a relancé ses forces contre Hassaké, une ville importante, tenue par les forces d'Assad, avec en arrière des positions kurdes.
Cette ville a déjà été la cible d'offensives, qui ont d'ailleurs entraîné de nombreuses frappes aériennes de la coalition (en soutien "de facto" des troupes d'Assad).
Ce qui est intéressant est d'analyser la méthode d'ISIS, qui démontre une maîtrise du niveau opérationnel de la guerre.
L'équation à résoudre était simple : comment bloquer la menace kurde (vers Raqqa) tout en contre-balançant la série d'échecs subis depuis quelques semaines ?
En attaquant le camp le plus faible des forces en présence : les forces syriennes d'Assad, à bout de souffle, et prises en étau entre la rebellion syrienne (jihadiste et non jihadiste) et les forces d'ISIS, sur une position "partagée" avec les Kurdes (qui seront donc obligés d'affaiblir leur effort actuel, en renvoyant des forces vers le nord).
Hassaké est la position idéale, puisque les deux forces : troupes d'Assad et troupes kurdes sont présente. De plus, la ville d'Hassaké est une ville importante de Syrie (chef-lieu du gouvernorat d'Hassaké), et surtout elle est proche de la frontière turque et permettrait donc de réouvrir un passage vers la Turquie, indispensable pour l'économie de guerre de d'ISIS.
Comment dans ce contexte frapper par surprise un ennemi qui risque de percer ce plan simple et logique ?
En organisant un raid de feinte contre Kobané, hautement médiatisé, et dont la valeur symbolique dépasse l'importance tactique.
C'est ce qui s'est fait par une opération menée avec efficacité, et démontrant une nouvelle fois la maîtrise tactique et opérationnelle des chefs militaires de Daesh :
- raid contre Kobané, destiné à marquer les esprits (200 civils ont été massacrés en quelques heures par les troupes de Daesh)
- offensive planifiée et en cours d'exécution contre Hassaké, avec alternance d'attaque contre les syriens d'Assad (dans Hassaké où après la prison centrale, le stade municipal seraient tombés hier), et les Kurdes (vers la frontière turque par Tel Brak), en fonction des résistances.
Au 28 juin 2015, la ville est partiellement contrôlée par les troupes d'ISIS, qui marquent des points contre les troupes d'Assad (123ème brigade de la 3ème division blindée syrienne renforcée par des bataillons du parti Baas), tout en ciblant les points de passage de Tal Halaf (qui est aussi un site néolithique de première importance, qui a déjà subi des fouilles clandestines menées par les trafiquants) et de Nusaybin (contrôlé par les troupes d'Assad).
Voici la carte de la situation au 21/06 (carte de source israèlienne) :

Voici la carte actualisée (même source) :

La position des forces syriennes d'Assad est difficile (en orange sur la carte), mais les renforts affluent (154ème brigade des forces spéciales le 26/06 et surtout la célèbre 104ème brigade aéroportée de la Garde nationale syrienne du Major General Issam Zahreddine, véritable "pompier" des forces syriennes d'Assad qui serait arrivée aujourd'hui).
Signalons que les brigades de l'armée syrienne encadrent quelques centaines d'hommes (et sont donc plus proches de bataillons, ou de petits régiments).
Derrière le rideau dressé à Kobané, Daesh attaque à Hassaké, ce qui montre que le "début de la fin" est encore loin pour ce régime totalitaire destructeur.