Monsieur l'Ancien Président,
Je vous ai entendu lors d'une émission en rediffusion. C'était le mardi 12 novembre 2024.
Monsieur l'Ancien Président,
Je vous ai entendu, à cette occasion, parler des Professeur.es des écoles. C'était le mardi 12 novembre 2024. Il était 20h.
Monsieur l'Ancien Président,
Je vous ai entendu parler des Professeur.es des écoles et de leur temps de travail. Il était 20h et je venais d'arrêter de travailler.
Monsieur l'Ancien Président,
Je vous ai entendu, évoquer les 24h hebdomadaires et les 6 mois de vacances. Je venais de finir de travailler et j'étais fatiguée de ma journée.
Monsieur l'Ancien Président, je vous ai bien entendu parler de ce que vous ne connaissez pas. J'étais fatiguée de ma journée et je me suis sentis profondément humiliée.
Laissez-moi vous raconter, Monsieur, les années, les mois, les journées des Professeur.es des Écoles.
Laissez-moi vous raconter, Monsieur, les heures de dévouement, non comptées, jamais quantifiées, jamais rémunérées.
Laissez-moi vous raconter, Monsieur, les week-end et vacances sacrifiés à travailler, au détriment de notre vie personnelle et parfois de notre santé.
Je suis une de celles et de ceux que vous venez de bafouer.
Je suis une de ces femmes que vous venez d'insulter.
Je suis une de ces Professeures des Écoles que vous avez piétinée.
J'ai 40 ans, 16 ans d'ancienneté dans le métier.
16 ans d'ancienneté et Enseignante spécialisée.
Enseignante Spécialisée auprès d'enfants en situation de handicap.
2300 euros de salaire mensuel, rien de plus, rien de moins.
Car oui, chez nous, les heures supplémentaires n'existent pas.
Laissez-moi vous expliquer votre grossière erreur.
Laissez-moi corriger votre calcul.
Laissez-moi vous sortir de votre ignorance.
Nous travaillons 24 heures devant élèves, auxquelles s'ajoutent 108 heures de réunions, concertations, formations, rencontres avec les familles, sur notre temps personnel.
Notre temps personnel, c'est ce que l'on appelle le midi, le soir.
Cela fait déjà 27 heures par semaine de présence obligatoire à l'école.
Malheureusement, 108 heures de suffisent jamais. Et si nous nous arrêtions à ces 108h, nous cesserions de recevoir les familles dès le mois de décembre.
Cela fait déjà beaucoup plus que 27 heures par semaine.
A cela s'ajoute les heures de préparation de classe, les corrections, la gestion matérielle, les lourdeurs administratives pour la moindre sortie scolaire, la mise en place de projets, les dossiers scolaires à compléter, les PPRE, les PAOA, les PAI, les PPI, les fiches saisines, les Gevas-co, les fiches actions, les protocoles, etc. Vous ne connaissez pas ces mots-là, n'est ce pas ?
Cela fait déjà bien plus que 40 heures par semaine, dont une grosse partie sur notre temps personnel mais il y a bien longtemps que j'ai arrêté de compter.
Et notre temps personnel, c'est ce qu'on appelle tous les soirs, les week-end et les vacances.
Vous ai-je raconté mes journées ?
Vous ai-je raconté le bruit, la gestion de classes surchargées, les crises et colères d'élèves en souffrance ?
Vous-ai je raconté le manque de respect, les insultes des élèves et des parents parfois ?
Vous ai-je raconté le mal de ventre parfois de ne pas avoir le temps de souffler ?
Vous ai-je raconté ce sentiment désespéré de ne pas arriver à tous les aider ?
Et pourtant, nous l'aimons notre métier.
Et pourtant, nous continuons, tous les matins, à nous lever.
Et pourtant, nous nous acharnons, à tous et toutes les éduquer.
Dans un pays où il faut un coupable, par ces mots, vous avez validé ce manque de reconnaissance dont nous souffrons.
Dans un pays où il est si facile de juger, vous avez donné l'autorisation à des millions de gens de nous bafouer, encore.
Par mes mots, Monsieur L'Ancien Président, je vous accuse de nous avoir mis, nous les Professeur.es des école, en danger.