Tous les jours que Dieu ne fait plus depuis qu'il est à mi-temps, je prends conscience de l'évolution sociétale à laquelle nous assistons depuis quelques années.
A force de répression et de casse sociale, la plupart des gens capables de se révolter le font avec un sentiment d'avoir déjà perdu la bataille.
J'en veux pour preuve une discussion que j'ai eue il y a peu avec une connaissance estudiantine et qui avait pour objet les manifestations et la nécessité ou non de bloquer les universités pour se faire entendre. Cette dernière me soutenait mordicus que le simple fait d'envisager un blocage était totalement antidémocratique puisque empêchant de pouvoir aller en cours les élèves qui le souhaitent, que cela pénalisait tout le monde et autres arguments fallacieux que l'on a l'habitude d'entendre dans la bouche des contre.
Effectivement, de tout temps, les manifs étudiantes ont suscité de la part des bien-pensants une multitude de réactions épidermiques. Mais là où la différence est flagrante, c'est que le sous-produit de l'industrie de l'enseignement supérieur qui me tenait ces propos n'était certainement pas syndiquée et qu'elle avait plus le look néo-baba cool que celui du connard futur cadre avec un blaser portant conjointement son prénom et le nom de son école.
Voilà le problème, la chienlit a pris possession même des agitateurs.
Tout le monde a peur de bouger, de gueuler par crainte de réveiller le voisin.
Encore un exemple, je suis, en plus d'être le chroniqueur le plus doué de sa génération, un musicien chevronné qui, n'en déplaise à Esther, se produisait l'an passé dans certains bars de la capitale du Sud, Toulouse la bien-nommée. Et bien il est de plus en plus difficile de trouver, en centre ville, des bars ouverts où l'ambiance n'est pas forcement à la frange sur le côté et le pantalon slim. La plupart des patrons préfèrent fermer boutique sous la pression policière pour laisser la place à quelques enseignes de restauration rapide très appréciées des abrutis à frange sus-cités.
Mais le pire est que, non content d'interdire la musique, qui est légion dans cette ville où même l'accent chante, dans les bars ou dans les rues, on commence à l'interdire dans les appartements.
J'ai le souvenir d'une soirée arrosée chez un collègue beugleur de rue, où la résidente du dessous n'a pas eu le courage de nous demander poliment de baisser le volume, mais a préféré nous glisser une lettre dans laquelle elle expliquait qu'il lui était impossible de regarder sa précieuse lucarne à cons tant notre tintamarre faisait trembler les murs.
Évidemment, une personne qui passe ses soirées avachie dans son fauteuil avec son cro-magnon accroché à sa cannette de bière a peu de chance de faire vibrer les murs de sa chambre.
Les gens sont des cons, on le savait, en revanche ce que l'on sait peu, c'est que ce sont eux qui ont le pouvoir.
Billet de blog 2 avril 2010
La société des bien-pensants
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