
Une rupture générationnelle mondiale est-elle en gestation ?
La Gen Z, première génération 100% numérique, née autour de l’an 2000, rejette les hiérarchies traditionnelles et les partis politiques classiques, qu’elle juge complices du système.
Elle exige une transparence, une redistribution des richesses et un accès équitable aux opportunités, en rupture avec les pratiques clientélistes des générations précédentes.
Comme les Gilets Jaunes, ces mouvements sont surtout spontanés, diffus, sans leadership clair, sans militants expérimentés sans programme systématisé et sans porte-parole. La protestation gagne la rue quand elle est déclenchée par une information perçue insupportable (5 femmes mortes durant des césariennes, pannes d’électricité massives, suppression d’internet…).
Révolte manifeste contre une double fracture, non – triple !
- sociale / économique (inégalités, précarité, destruction des ressources)
- contre les élites et leurs héritiers mondialisés, en dehors de tout méritocratie, par rapport aux services indigents et au chômage massif, même des diplômés
+ avec une méthode générationnelle coupée des traditions politiques et syndicales ; sans leader, sans parti, sans programme, avec des volontaires anonymisés sur des réseaux.
Une méthode coûteuse : Au Népal, le parlement a été incendié, dans les autres pays, des canons à eau, des balles en caoutchouc, et des tirs à balle réelle, avec des destructions et des pillages. Renversement de l’Etat-Major à Madagascar. -Sur 5 pays, on dénombre au minimum 50 tués et 4000 arrestations.
Des résultats peu concrets : dans tous ces pays, les autorités ont concédé que les revendications étaient fondées, nommé des commission et abondé en promesses. Mais les gouvernements ne trouvent aucun négociateur pour la GenZ , et donc ne peuvent signer aucun compromis. Si, au Népal, l’incorruptible présidente de la Cour est devenue premier ministre, à Madagascar le gouvernement est renversé, les policiers s’excusent, au Maroc, le Roi reprend les revendications dans un discours fait de généralités.
Tout va dépendre de chaque côté de la fracture :
- Faute d’interlocuteur, ces mêmes élites honnies se trouvent chargées de se réformer elles-mêmes, mieux : de devenir éthiques. En ont-elles les moyens, spirituels, mais aussi matériels ou géostratégiques ? Peut-on stopper la déforestation concédée à un investisseur chinois ?
- Se réformer prend du temps, les initiateurs des actions de rue peuvent-ils maintenir la pression ? Les mêmes manifestants se trouvent sollicités à rester aux aguets, seront-ils toujours en pied de guerre ?
- PLUS UNE CONDITION : Les réseaux cryptés resteront-ils autant imperméables ? Quelle protection publique de la part des Etats où ils sont domiciliés ? Quelle constance privée de la part de leurs PDG ? - - Discord : 2015 par deux entrepreneurs californiens comme un outil de communication pour les communautés de joueurs en ligne d’où sa capacité à rassembler des milliers de membres en temps réel. Mais reste américain. - - Telegram : 2013 par les frères Durov. Pavel Durov a quitté la Russie en 2014 en raison de pressions politiques et a transféré le siège à en 2017à Dubaï. Utile pour sa sécurité (chiffrement des messages). Mais reste un peu russe.
Avec les retournements chez les militaires Malgaches ce 13 Octobre, on a un point de comparaison et de réflexion avec les printemps arabes, telle, l’Egypte et le Général Sissi
Avec la création de commissions et de nouveaux gouvernements, sans que des transformations sociales en soient opérées, on a un point de référence avec les Gilets Jaunes.
Les révoltes sont réelles, des gens se sont sacrifiés, les causes sont certaines, les inégalités sont maximum, les résultats restent modestes, le débat, infra-politique, les mouvements, sans structures. La GenZ semble elle aussi incapable de forcer les réformes, après les combats de rue.
Pour détailler, 4 notes
- Des revendications communes
- Panorama des GenZ par pays
- Comment ils décident
- A quel coût
1 - Gen Z : des revendications communes
au Népal, au Maroc, à Madagascar, en Indonésie et aux Philippines
- Transparence et responsabilité : Lutte contre un système politique et économique corrompu, Les jeunes exigent des comptes rendus publics sur l’utilisation des fonds étatiques et la fin de l’impunité pour les responsables corrompus. Et contre les élites de seconde génération ("nepo-kids" ou "nepo-babies") enrichis au détriment de la majorité
- Services publics, santé et éducation : hôpitaux fonctionnels, des écoles et universités accessibles et de qualité ou encore la fin des coupures d’eau et d’électricité, donc des Investissements publics prioritaires.
- Justice sociale et économique = politiques actives pour l’emploi et la fin des passe-droits pour les proches du pouvoirtf1info.fr+1. Les mouvements dénoncent les inégalités criantes et demandent une fiscalité plus juste, ainsi qu’un accès équitable aux opportunités économiques
- Dégagisme : Départ des dirigeants : Dans plusieurs pays (Népal, Madagascar, Maroc), la Gen Z a obtenu ou réclame la démission des chefs de gouvernement, jugés incapables de répondre à leurs besoins. Aussi, Refus des dynasties politiques, des régimes familiaux ou clientélistes et appellent à une démocratie plus représentativel
La Gen Z népalaise en particulier rejette les partis politiques classiques, jugés corrompus et inefficaces. Elle privilégie une organisation horizontale, sans leader, et une communication virale pour contourner les médias traditionnels
Liberté d’expression et accès aux réseaux sociaux
- Défense des libertés numériques : L’interdiction des réseaux sociaux (comme au Népal ou en Indonésie) a été un déclencheur majeur des manifestations. La Gen Z revendique le droit de s’exprimer librement en ligne et hors ligne20minutes.fr+2.
- Rejet de la censure et contestation des copte rendus officiels
- Recours aux réseaux cryptés, Discord, TikTok et Instagram pour organiser leurs
Ajouter: la protection des ressources naturelles contre leur dévastation, la solidarité trans-nationale, et le soutien aux femmes
Les manifestants se réunissent au travers des réseaux, et donc sans lien avec des figures traditionnelles, quelle sociologie?
- Étudiants des universités ou des grandes écoles, souvent engagés dans l’enseignement public faute de ressources et de réseaux pour trouver mieux
- Jeunes sans emploi ou avec un emploi précaire. , des zones urbaines comme rurales marginalisées
- Des éléments des classes moyennes fragilisées, qui ressentent des écarts entre ce qui est promis (ou vu ailleurs) et leur réalité quotidienne.
2 - PANORAMA :
Le Népal en Août : une revendication phare, les réseaux
- S’inscrit dans une vague régionale de contestations portées par la Gen Z, après des mouvements similaires en Indonésie, aux Philippines et au Sri Lanka.
- lutte contre le népotisme et la corruption. Les "nepo-kids" qui monopolisent les postes clés sans mérite. Cette critique a été un moteur majeur du mouvement
- Le détonateur : le gouvernement népalais a tenté de bloquer l’accès aux réseaux sociaux (Facebook, TikTok, YouTube) en août 2025, une mesure perçue comme une censure inacceptable par une génération ultra-connectée- poussant des milliers de jeunes dans la rue pour défendre leur liberté d’expression.
- En quelques jours, le mouvement a forcé la démission du gouvernement et ouvert un débat national sur la réforme des institutions.
- Il a aussi inspiré d’autres jeunes au Maroc et à Madagascar
Résultats
- Démission du gouvernement de Sher Bahadur début septembre 2025
- Restauration de l’accès aux réseaux sociaux
- Promesses de réformes anti-corruption : Des annonces ont été faites pour renforcer la transparence et lutter contre le népotisme, mais sans calendrier précis.
- Dialogue avec les jeunes : échec des tentatives , les leaders informels du mouvement GenZ, maintiennent le rejet des structures traditionnelles
Le Maroc en Septembre : GenZ 212
- déclenché par la mort de huit femmes enceintes à l’hôpital public d’Agadir, en raison d’un manque de soins adéquats. Cet événement a cristallisé la colère. Le collectif, qui compte plus de 180 000 membres sur Discord, insiste sur le caractère pacifique de ses rassemblements. Depuis le 27 septembre 2025 (Rabat, Casablanca, Marrakech, Agadir, Tanger) et se poursuivent malgré des arrestations et des heurts violents avec les forces de l’ordre
- Les manifestants réclament des réformes sociales, la fin de la corruption, et même le départ du chef du gouvernement Aziz Akhannouch + soutien d’autres secteurs, comme le syndicat de l’enseignement supérieur
- Le mouvement dénonce l’enrichissement des élites (comme la famille du Premier ministre Aziz Akhannouch) et les inégalités criantes dans l’accès aux services publics (santé, éducation). Ils réclament une redistribution des richesses et la fin des passe-droits pour les proches du pouvoir.. et donc un boycott économique des entreprises liées au gouvernement
- Le roi Mohammed VI a appelé à accélérer les réformes sociales, mais les manifestants restent mobilisés, exigeant des changements concrets
Résultats
- Discours du roi Mohammed VI : Le 10 octobre 2025, accélérer les réformes sociales, notamment dans la santé et l’éducation, et à lutter contre les inégalités. Le mouvement a accepté une trêve après le discours royal, mais sans abandonner ses revendications
- Promesses d’investissements publics : Le gouvernement a annoncé des budgets supplémentaires pour les hôpitaux et les universités, mais sans détails sur le financement ou les échéances.
- Création de commissions d’enquête : Des commissions ont été mises en place pour enquêter sur la corruption et les dépenses publiques controversées (comme les stades pour la Coupe du monde 2030).
Réaction des manifestants : Les jeunes restent sceptiques, estimant que ces annonces sont des mesures cosmétiques. Ils continuent de réclamer la démission du Premier ministre Aziz Akhannouch et des réformes structurelles. Le boycott économique des entreprises liées au gouvernement se poursuit.
« Madagascar est à nous »
Contre l’accaparement des ressources par une classe dirigeante vieillissante et un système où les enfants des dirigeants étudient à l’étranger, alors que plus de 50 % des travailleurs gagnent moins de 22,5 € par mois/ avec 50% de chômage chez les jeunes même diplômés.
Coupures répétées d’eau et d’électricité : pannes fréquentes et prolongées d’eau et d’électricité dans plusieurs villes et la capitale, ont rendu la vie quotidienne insupportable et elles manifestent l’incapacité de l’État à garantir des services de base, malgré les ressources du pays
La corruption endémique et l’impunité des responsables politiques sont régulièrement pointées du doigt. Les manifestants réclament un "état de droit"
La mort de manifestants lors des premiers rassemblements (notamment à Antsiranana, où un jeune a été tué) a amplifié la colère et radicalisé une partie du mouvement, qui exige désormais le départ du président Andry Rajoelina
"Nous voulons vivre, pas survivre !" / "Madagascar est à nous !" / "On veut de l’eau et de l’électricité, pas des promesses !"
Résultats = Le président Andry Rajoelina a dissous son gouvernement en septembre 2025, sous la pression des manifestations. Un nouveau Premier ministre a été nommé, mais sans changement radical de politique
- des plans d’urgence pour réduire les coupures, mais les effets sont lents à se matérialiser.
- des discussions avec les syndicats (comme celui de la Jirama, l’entreprise publique d’électricité), mais les grèves et manifestations continuent
- Appels au calme : Rajoelina a multiplié les discours pour apaiser les tensions, mais sans proposer de réforme profonde.
Réaction des manifestants : La Gen Z malgache juge ces mesures insuffisantes et maintient la pression pour un changement systémique, notamment la démission de Rajoelina et des élections anticipées . Ce 12 octobre, renversement de l'Etat Major et nouveau premier ministre
Indonésie et Philippines
- En Indonésie, plongé dans le noir par les coupures d’électricité, le mouvement "Gelap Indonesia" cible les élites corrompues et les dynasties politiques- avec le drapeau de One Piece.
- Aux Philippines, la Gen Z a protesté contre les famille politiques dominantes (comme les Marcos ou les Duterte), accusées de perpétuer un système inégalitaire.
Résultats
- des subventions et des formations pour les jeunes diplômés, mais ces mesures sont jugées insuffisantes face au chômage massif.
- Des commissions pour examiner les conflits d’intérêts des familles politiques (comme les Marcos), mais sans résultats concrets à ce jour.
- Des rencontres avec les étudiants pour discuter des réformes éducatives, mais les jeunes réclament des changements plus radicaux.
Réaction des manifestants : La Gen Z philippine continue de manifester, exigeant la fin des dynasties politiques et une redistribution des richesses
3/ COMMENT ILS DÉCIDENT ?
Les décisions au sein du mouvement GenZ 212 sur les réseaux sociaux, notamment Discord et Telegram, reposent sur une organisation horizontale et décentralisée, ce qui signifie qu’il n’y a pas de leader unique ou de hiérarchie traditionnelle
Sur Discord : Discussions en temps réel : Le serveur Discord de GenZ 212, qui compte plus de 180 000 membres, est utilisé pour décider des dates et lieux des rassemblements, les slogans, ou les appels au boycott suivant des discussions collectives et des votes informels entre les membres + Canaux thématiques : groupes de travail ou canaux dédiés à des sujets précis (santé, éducation, communication, sécurité juridique. Transparence et rapidité : Les annonces importantes (comme la suspension temporaire des manifestations) sont communiquées en direct sur le serveur, souvent après consultation des membres les plus actifs
Sur Telegram : pour toucher un public plus large et pour diffuser rapidement des consignes, des alertes ou des appels à l’action. Les messages sont relayés par des administrateurs ou des membres influents, mais toujours dans un esprit collectif. + Préserver l’anonymat des organisateurs, ce qui est crucial dans un contexte où les autorités pourraient chercher à identifier les leaders du mouvement
- Points clés sur les décisions
Pas de leader officiel : Le mouvement refuse de désigner des porte-parole ou des leaders, ce qui rend difficile pour les autorités de cibler ou de négocier avec un interlocuteur unique.
Décisions par consensus : Les actions sont validées par un consensus émergent des discussions en ligne, avec une forte implication des membres les plus engagés.
Adaptabilité : L’absence de structure rigide permet au mouvement de s’adapter rapidement aux événements (répression, discours du roi, etc.) et de modifier ses stratégies en temps réel
4 - A QUEL COÛT ?
Népal : Au moins 10 morts (selon les sources), principalement lors d’affrontements avec les forces de l’ordre à Katmandou et dans d’autres villes. Plusieurs manifestants ont été tués par balles ou écrasés par des véhicules policiers. Centaines de blessés, dont des manifestants et des policiers, lors des heurts et de l’utilisation de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc. Plus de 500 arrestations, souvent pour "trouble à l’ordre public" ou "participation à des émeutes- des procédures judiciaires restent en cours; Incendies de bâtiments publics ; le siège du Parlement + de véhicules policiers, et pillages en marge des manifestations
Maroc - GenZ 212 : Au moins 3 morts confirmés (à Laqliaa, près d’Agadir), abattus par les forces de l’ordre lors de manifestations en septembre 2025. D’autres chiffres varient selon les sources. Des centaines de blessés, dont des manifestants touchés par des balles en caoutchouc, des coups de matraque et des gaz lacrymogènes. Plusieurs cas de blessures graves (fractures, traumatismes crâniens) ont été rapportés Plus de 1 000 arrestations - Certains détenus ont entamé des grèves de la faim pour protester contre leur détention. Destruction de mobilier urbain, incendies de poubelles et de véhicules, et dégâts dans des commissariats lors d’affrontements. Des boutiques pillées ont aussi été signalées en marge des cortèges
Madagascar : Au moins 22 morts (selon l’ONU et les ONG locales), principalement à Antananarivo, Antsiranana et Toamasina. Certains décès sont liés à des tirs à balle réelle, d’autres à des lynchages ou des accidents lors des émeutes Plusieurs centaines de blessés, y compris des passants - des blessures par armes à feu, des brûlures. Plus de 800 arrestations, Les conditions de détention sont dénoncées comme dures et surpeuplées + Pillages généralisés (magasins, entrepôts), incendies de bâtiments publics (comme des commissariats et des mairies), et destruction d’infrastructures (feux de signalisation, abribus). La capitale Antananarivo a été particulièrement touchée
Indonésie -Gelap Indonesia : Au moins 10 morts en août 2025, principalement à Jakarta, des manifestants tués par la police ou des passants pris dans les violences. Plus de 500 blessés, dont des étudiants et des journalistes, victimes de gaz lacrymogènes, de coups de matraque et de tirs de sommation. Plus de 1 200 arrestations, avec des accusations de "rébellion" et de "destruction de biens publics". Des militants étudiants ont été ciblés en priorité. Incendies de véhicules, destruction de vitrines et dégâts dans des universités (comme à l’Université d’Indonésie). Des bâtiments gouvernementaux ont aussi été vandalisés
Philippines : Au moins 5 morts à Manille et Cebu, lors d’affrontements avec la police Des centaines de blessés lors de charges policières et d’utilisation de canons à eau et de gaz lacrymogènes Plus de 600 arrestations, souvent pour "obstruction à la justice" ou "participation à des rassemblements illégaux". Des leaders étudiants ont été particulièrement visés Destruction de mobilier urbain, tags sur des bâtiments publics, et incendies de poubelles lors des cortèges. Des bureaux de partis politiques ont aussi été vandalisésfrance24.com.Bas du formulaire