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Billet de blog 13 juin 2009

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Commentaire à l'article d'Arnaud Montebourg - "Lettre d'un socialiste qui espère"

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Le PS est un parti dont l’essentiel des militants se reconnaissent dans les valeurs de gauche (même si cette affirmation est évidemment contestable lorsqu’il s’agit d’un certain nombre de ses hiérarques).Il est donc congénitalement condamné à voir se développer en son sein des débats pour partie idéologiques, pour partie programmatiques, dans la mesure où l’une des caractéristiques première des militants (et sympathisants) de gauche est de s’engager en politique sur des convictions personnelles plutôt que sur des calculs d’intérêt bien compris.Attaché par principe aux valeurs de la démocratie, il est donc en même temps contraint de prendre en compte cette diversité par la mise en place de procédures de délibération collective (même si je mesure assez bien moi-même les limites de cette démocratie interne), plutôt que de s’en remettre au simple culte du chef.Mais le PS est aussi un parti qui s’est bâti au sein des institutions de la Vème République. Des institutions qui sont malheureusement taillées sur mesure pour les partis qui se structurent justement autour du culte du chef, la monarchie républicaine qui s’incarne dans la présidentielle étant on ne peut plus clairement la clef de voute desdites institutions.Ainsi, le PS, mais aussi tous les partis de gauche qui tentent eux aussi de structurer leur fonctionnement sur la délibération collective, se trouvent être soumis à un handicap institutionnel considérable. Un handicap qui n’a pu être surmonté à ce jour que par Mitterrand (et ce, faut-il le rappeler, au terme d’une bataille acharnée de plus de vingt ans pendant laquelle il avait eu sa part de traversées du désert). Compte tenu de l’évolution de notre société, il serait d’ailleurs tout à fait hasardeux de prétendre qu’un Mitterrand d’aujourd’hui serait à nouveau en mesure de reproduire les conditions de son succès final de 81…A noter aussi, et c’est fondamental dans le cas du PS, que ce sont ces mêmes institutions de la Vème République qui sont à la base de la professionnalisation de la vie politique, par suite de leur encouragement manifeste au cumul des mandats et du choix de modes de scrutins qui méprisent la représentation du corps électoral dans sa diversité et interdisent du même coup le renouvellement de la classe politique.Ainsi, et même si le PS porte une lourde responsabilité dans la poursuite de l’aventure toujours plus présidentialiste de la Vème république, il me semble plutôt malhonnête de se cacher les difficultés objectives auquel ses dirigeants (y compris ceux qui sont de bonne foi – car il y en a) font nécessairement face dans ce cadre institutionnel là.Le traitement d’une pathologie qui fait suite à un diagnostic incomplet a toutes les chances de n’avoir aucun effet, voire même d’être parfois contreproductif..Au vu de l’impressionnante quantité de messages qui l’enterrent par avance (car il n’est pas encore tout à fait mort), admettons néanmoins de considérer l’hypothèse que la seule bonne solution doive passer par l’effacement du PS de la carte politique de notre pays.Quels seraient alors les scénarios les plus vraisemblables qui feraient suite à son implosion finale ?La part la plus à gauche rejoindrait le FG, la part la plus écolo rejoindrait EE (si tant est que ces 2 attelages un peu hétéroclites puissent survivre à l’après campagne), et part la plus centriste tenterait une OPA sur le MODEM.Résultat dans le meilleur des cas : une UMP unie autour de son chef aux alentours de 30%, un centre social-libéral (chrétien-démocrate…!?) autour de 20%, un pôle socio-écolo autour de 20%, un pôle de la gauche de la gauche aux alentours de 15 %, et une extrême gauche à quelques %. Le tout pas fondamentalement plus représentatif du corps électoral qu’aujourd’hui puisqu’il ne s’agirait guère que de répartir différemment la faible majorité de ce même corps électoral qui accepte encore de se déplacer pour aller voter.Au final, si un tel scénario pourrait à la rigueur être porteur de débouché politique positif dans une configuration de type démocratie parlementaire, il serait par contre forcément très dangereux dans le cadre de nos actuelles institutions, pour cause d’exacerbation de la compétition présidentielle entre acteurs de poids relatifs du même ordre de grandeur (sauf à croire en une hypothétique et soudaine adhésion spontanée de l’ensemble de ses acteurs à l’idée de primaires communes…)..Une fois cette analyse là posée, qui accepte d’en prendre le risque en conscience ?.Et donc, que reste-t-il comme solutions ?Comme indiqué en creux plus haut, c’est la structure même de nos actuelles institutions qui impose la structuration de la gauche autour d’un pôle de rassemblement pour éviter que ses différentes composantes se déchirent inéluctablement autour de l’enjeu présidentiel. Mais c’est aussi l’évolution du paysage politico-médiatique que nous connaissons aujourd’hui qui impose cette structuration autour de ceux qui sont les seuls à disposer des moyens de survie politique à moyen terme.Un réseau d’élus comme celui dont dispose le PS n’est pas seulement le moyen de permettre à certains de ses membres d’y faire une carrière confortable. C’est aussi (et surtout) le moyen pour l’opposition de disposer de relais de communication et d’accès à l’information impossibles à envisager sans cela. C’est aussi le seul moyen de disposer d’une structure pérenne et disponible à plein temps pour se consacrer à la déconstruction du discours dominant et à la reconstruction d’un discours et d’un projet alternatif.Si les déboires d’un Bayrou sont sans doute dus pour partie à sa personnalité et à sa polarisation sur son projet présidentiel, ils sont au moins autant liés au fait qu’il ne dispose pas de cette structure pérenne apte à relayer ses discours et projets au plus près du terrain. Il ne lui reste donc plus que l’option de forcer la porte des médias « officiels » pour y faire lui-même quelques apparitions, au risque de faire apparaître au grand jour le caractère solitaire de sa démarche, et de s’y retrouver contraint d’y jouer les imprécateurs pour avoir quelque chance d’être un peu entendu. On sait quel a été Dimanche dernier le résultat de cette démarche un peu désespérée…Même chose du côté Verts, dont les forces militantes réelles sont tellement réduites que les mêmes qui dénoncent avec juste raison la mécanique institutionnelle qui les empêche de se développer, se retrouvent contraints à demeurer des cumulards (Député-Maire dans le cas de Mamère, Sénatrice-Maire dans le cas de Voynet), simplement pour pouvoir exister à minima au sein de ces mêmes institutions.Dans ces conditions, le résultat de la liste EE aux Européennes (qui n’a pu d’ailleurs exister que parce qu’il s’agissait d’un scrutin de type proportionnel), ne sera qu’un feu de paille comme l’ont été dans le passé nombre de résultats comparables. Outre que la belle entente risque fort de se disloquer face aux enjeux « sérieux » des prochaines échéances électorales, ses principaux acteurs ne sont tout simplement pas armés pour exister à long terme dans le champ institutionnel et médiatique national..A partir de là quelle autre alternative que celle de reconstruire le PS, avec comme chance historique le fait qu’il ne soit désormais plus en position d’être aussi hégémonique à gauche qu’il l’a été dans le passé ?Une reconstruction qui serait d’abord basée sur une réelle et ferme remise en cause des blocages institutionnels de la Vème République et sur l’organisation de primaires élargies à toute la gauche qui en serait la preuve immédiate par les faits.L’engagement de revenir à des modes de scrutins faisant une large place à la proportionnelle en serait alors la suite logique, à la fois pour accorder aux autres composantes de la gauche la place qui leur revient, et pour préparer les conditions d’un retour à un régime parlementaire, rejoignant en cela toutes les démocraties dignes de ce nom qui nous entourent.Dès lors, le problème d’un « leadership » de niveau Présidentiel dont il faut avoir conscience qu’il est tout simplement incompatible avec le fond culturel de la gauche disparaitrait de lui-même.Une reconstruction qui serait basée en second ressort sur le ferme engagement de remettre en question l’ensemble des politiques Sarkozystes dès le retour aux affaires, et notamment dans le domaine des libertés publiques, dans celui du rôle régulateur et redistributeur de l’état (avec l’atout pour celui-ci de sa plus grande représentativité et donc de sa pleine légitimité grâce aux avancées institutionnelles), et dans celui de la revalorisation des politiques de solidarité, condition indispensable à la cohésion et à la pacification du corps social..Une reconstruction qui serait enfin basée sur l’abandon du crédo libéral en matière d’ouverture totale des frontières de l’Europe en matière commerciale, la protection minimale des systèmes de solidarité à l’intérieur de l’Europe n’étant tout simplement pas compatible avec le dumping social (directement lié au déficit démocratique) imposé par la puissance émergente de la Chine et de quelques autres. Des solutions peuvent et doivent en effet être trouvées pour imposer l’engagement d’un rééquilibrage des systèmes de protection sociale de nos partenaires comme condition non négociable à la liberté des échanges commerciaux. Toute l’histoire contemporaine ne nous a-t-elle pas démontré que c’est justement la lutte pour l’amélioration des systèmes de protection sociale qui porte en germe l’émergence de la démocratie ?.Face à ces enjeux là, la tentation de se contenter de tirer sur les ambulances n’offre à l’évidence aucune espèce d’issue. Le problème n’a non plus aucune chance de se voir réglé par la recherche du salut dans la fuite, voire dans la quête d’une plus grande « pureté idéologique » qui n’a comme autre effet que de fragmenter encore un peu plus le camp des opposants.Le salut ne peut être porté que dans une volonté d’engagement du plus grand nombre dans l’action collective pour contraindre au mouvement ceux-là mêmes qui au sein du PS se sont depuis 2002 recroquevillés sur la simple défense de leurs intérêts personnels.

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