Aujourd'hui, je suis Africain. Disons que je vis dans une région riche en ressources naturelles. En République Démocratique du Congo pour ne pas la citer. Aujourd'hui, je contemple le monde, ce monde qui tourne si vite qu'il se retourne contre lui-même. Mon regard s'arrête un instant sur un continent, ce continent si grand par son Histoire et si petit par sa taille, c'est l'Europe. Je le fixe et, dans un élan d'empathie, lui dit: "Welcome to Africa". Cher peuple européen, je vais t'emmener dans mon pays ici en RDC pour te prévenir du danger qui te guette.
Connais-tu, cher peuple Européen, le Paradoxe du peuple Africain? C'est de vivre sur le continent le plus riche du monde en étant le peuple le plus pauvre du monde. Je ne sais pas si cela t'attristes, te réjouis ou t'es indifférent, mais c'est un fait avec lequel nous devons oeuvrer jour après jour. Par humilité, je ne vais pas te citer toutes les richesses naturelles que possède mon pays mais sache qu'elles pourraient subvenir au besoin de mon peuple pour des générations et des générations. Et pourtant, elles ne jouent pas leur rôle. Je dois avouer que mon pays est malade. Cette maladie m'était inconnue avant de la découvrir. Il faut dire qu'elle vient de très loin, d'une contrée où les hommes en cravate tout comme l'argent foisonnent. Cette maladie, je vais te dire son nom. C'est la Dette.
Pas plus tard qu'en Décembre dernier, ils sont de nouveaux venus dicter leur loi. Ils? Qu'ils se nomment Banque Mondiale, Fonds Monétaire International ou Club de Paris, qu'ils prônent l'aide aux pays en développement n'est qu'un pur hasard. Cette aide, je te le dis, cher peuple européen, elle est empoisonnée comme le sont nos eaux ici même. Méfie-toi de l'aide. Car souvent, elle n'est pas désintéressée. Je dirais même plus, cette aide n'est pas fait pour le peuple. Je le sais, je le vis tous les jours ici. Ils appellent cela "développement du secteur privé", "réforme des entreprises publiques", "protection de l'investissement étranger", "amélioration de la transparence dans la gestion des ressources naturelles", mais ce ne sont que des lois dictées à mon pays pour le bien de leur intérêts au détriment de celui du peuple. Ils cassent le lien social qui nous unit, ce lien qui nous est si cher à nous peuple Africain. Je t'envie ce système social qui fait ta force cher peuple Eurpéen. Mais attention.
Oui, attention, car en t'observant, je vois arriver les mêmes problèmes -qui font de nous des esclaves ici- arriver chez toi peuple Européen. Grèce, Portugal, Islande, Espagne, la même maladie vous frappe. Ils emploient le même vocabulaire: "conditionnalités", "réformes du service publique". Ils veulent des garanties solides. Les marchés financiers vous mettent la pression. Leur rapacité n'a pas de coeur. Que vous les ayez sauvés il y a de là un an n'éveille en eux pas une once d'émotion. Tout comme chez nous, la privatisation prend le dessus sur tout, le service public est mis aux enchères pour montrer patte blanche. "Départs volontaires" qu'ils disaient chez nous.
Alors peuple Européen, ne te laisse pas endormir par des débats qui n'ont pas leur place dans une telle période. Sinon tu risques de te réveiller pas très loin de Kinshasa. Mais n'aies crainte. Je t'accueillerai à bras ouverts.