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Billet de blog 3 novembre 2012

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Moraliser la vie publique?

Le 25 octobre 2012, Anticor a participé au colloque sur la moralisation de la vie publique organisé par Transparency International France (TIF), qui se tenait à l’Assemblée nationale. Les intervenants devaient débattre plus particulièrement de la contribution que pouvait apporter le Parlement à cette moralisation.Elisabeth Guigou, ancienne ministre Garde des sceaux dans le gouvernement de Lionel Jospin, a introduit la séance.

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Le 25 octobre 2012, Anticor a participé au colloque sur la moralisation de la vie publique organisé par Transparency International France (TIF), qui se tenait à l’Assemblée nationale. Les intervenants devaient débattre plus particulièrement de la contribution que pouvait apporter le Parlement à cette moralisation.

Elisabeth Guigou, ancienne ministre Garde des sceaux dans le gouvernement de Lionel Jospin, a introduit la séance. Madame Guigou a fait rapidement un tour d’horizon des avancées qui ont eu lieu ces dernières années, bien modestes en vérité, concernant la moralisation de la vie publique et des reculs relatifs aux moyens pour y parvenir, comme ceux mis à disposition des Pôles financiers et des Chambres régionales des comptes. Il ressortait de son introduction un regret que la France ait été trop timide dans la moralisation de la vie publique, mais aussi une volonté de mieux faire aujourd’hui que par le passé.

Il n’est pas inutile de rappeler que Madame Guigou est membre d’un groupe de travail sur la prévention des conflits d’intérêts mis en place par Bernard Accoyer ancien Président de l’Assemblée nationale lors de la mandature de Nicolas Sarkozy. Ce groupe de travail a vu le jour le 6 octobre 2010. En deux ans, il a rédigé un code de déontologie pour les députés qui tient sur…deux pages et a nommé un déontologue à l’Assemblée nationale (1).Pourtant, la commission Sauvé avait rédigé un excellent rapport de près de 120 pages pour prévenir et régler les conflits d’intérêts, rapport qui s’adressait aux membres du gouvernement, aux responsables des établissements publics et des entreprises publiques et autres agents publics, mais qui pouvait s’appliquer parfaitement après quelques adaptations et améliorations aux parlementaires des deux chambres, ce que devait rappeler Daniel Lebègue, Président de TIF. Mais que fait aujourd’hui ce groupe de travail ?…

Pour compléter la présentation du colloque, Daniel Lebègue fit un point sur la déontologie au sein du parlement français et François Casgrain, commissaire au lobbyisme au Québec, nous fit part de l’expérience canadienne en la matière, dont la France pourrait largement s’inspirer.

La première partie du colloque était consacrée à la question « Comment renforcer les règles de déontologie parlementaire ? », Daniel Lebègue animant les débats.

Le premier débateur fut Martin Hirsh qui intervenait sur la question des conflits d’intérêts au sein du Parlement. Il a déroulé avec brio son livre intitulé « Pour en finir avec les conflits d’intérêts ». Comment les prévenir, mais aussi comment les contrôler et surtout comment les sanctionner.

Puis ce fut Dominic Robinson de TI qui devait intervenir pour un « lobbying plus transparent et plus équitable ». Basé à Bruxelles, il avait l’avantage d’être au cœur du problème. Là encore, son intervention démontrait que les propositions de TIF mais aussi d’Anticor, qui a fait des propositions détaillées au Sénat et au Conseil d’Etat dans le cadre de la mission Sauvé, pouvaient servir de socle à une bonne réglementation, sans attendre les résultats d’une quelconque commission…

Barbara Romagnan devait intervenir sur une question d’actualité, « Pourquoi faut-il limiter le cumul des mandats ? ». Son plaidoyer en faveur de cette limitation fut excellent, reprenant les mille et une excuses de celles et ceux qui soutiennent toujours le cumul des mandats et démontrant que leurs arguments n’étaient que purs sophismes. Cependant, l’argument qu’aucun cumulard n’ose avancer et pour cause, c’est celui du pouvoir que confère le mandat complémentaire de maire d’une grande ville, qui a beaucoup plus de poids dans la vie quotidienne des citoyens que celui de simple député d’une circonscription. Certains osent même penser que cela pourrait servir une politique clientéliste… !

Un des intervenants faisait remarquer qu’il ne fallait pas attendre de changements profonds sur le cumul des mandats comme dans d’autres domaines d’ailleurs, si l’on ne faisait qu’appel à la bonne conscience de nos parlementaires. Il faut une loi sur le cumul des mandats.

C’est Alain Anziani, sénateur de la Gironde, qui aborda le régime des incompatibilités. Fallait-il le durcir ? Sa réponse était plutôt positive et il a fait longuement allusion à cette incompatibilité toujours non reconnue par la loi entre un mandat de parlementaire et un poste d’avocat dans un cabinet d’affaires. Martin Hirsh rappelait à ce propos la loi courtelinesque qui interdit à un parlementaire d’être maître de conférences, mais peut donner des consultations d’avocat à des entreprises privées, sans avoir à divulguer le nom de ses clients. Remercions Monsieur Anziani d’avoir cité Anticor par deux fois pour illustrer la lutte contre la corruption.

La deuxième partie du colloque portait sur le degré de transparence qu’il fallait instituer au sein du parlement. Le débat était animé par Catherine Pierce Vice présidente de TIF. Participèrent à ce débat, Pierre Lascoumes, Directeur de recherche au centre d’études européennes de Sciences Po, Lionel Tardy député de Haute Savoie et entrepreneur de son état. Nous avons noté dans son intervention le paradoxe bien connu et dénoncé par ce député qui est celui qui consiste, pour les parlementaires, de s’autocontrôler par des règles qu’ils ont eux-mêmes édictées. Faisant suite aux situations de conflits d’intérêts cela ne manquait pas de sel !

René Dosières était aussi présent et a évidemment parlé du budget de l’Assemblée nationale sur fond d’opacité, qui tend à diminuer en partie grâce à lui, bien seul dans ce combat, ce qui est révélateur sur la lenteur des progrès qui sont faits en la matière.

Enfin, intervenait en dernier un ami d’Anticor, Benjamin Ooghe Tabanou de l’association Regards citoyens, qui se propose de faire du parlement une « maison de verre », vaste et ambitieux projet. Voir leur site…

Tous ces propos ne pouvaient que réjouir les quatre membres (2) d’Anticor qui participaient au colloque. Ils nous auraient presque fait oublier que quelques jours auparavant les députes de gauche comme de droite avaient voté dans une touchante unanimité la réserve parlementaire, tant décriée par les médias et les citoyens, qui consiste à doter chaque député de 130 000 €. Ce que certains mauvais esprits qualifient de clientélisme avéré (3).

nov02
2012

Par Équipe ANTICOR

(1)  Ce fameux code de déontologie : les 3 premiers articles du code qui en comporte 6, se rapportent au déontologue. Les députés ont insisté lourdement sur le fait que les informations concernant leur patrimoine comme tout renseignement pouvant indiquer que l’un d’eux se trouve en situation de « conflit d’intérêts » sont confidentiels et que le déontologue est tenu au secret professionnel.

Quant à l’article 4 il précise qu’en cas de manquement au code, tout député sera grondé par le déontologue et éventuellement le bureau de l’Assemblée nationale. De sanctions nenni !

(2)  Eric Alt, membre du comité de parrainage, Jean-Claude Roger, responsable d’Anticor 13, Damien Roux, militant des Bouches-du-Rhône, et Jean-Pierre Roux, membre du bureau national et ancien Président d’Anticor.

(3)  La réserve parlementaire c’est environ 90 M€  !

Voir aussi l’article de « Challenges » : http://www.challenges.fr/economie/20121025.CHA2437/le-coup-de-gueule-de-hirsh-et-dosiere-contre-l-assemblee-nationale.html

 http://www.anticor.org/2012/11/02/moralisation-de-la-vie-publique/

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