A l’origine du dossier, il y a un homme, Loïk Le Floch-Prigent, figure emblématique de la « Françafrique », condamné pour abus de biens sociaux dans l’affaire « Elf » en janvier 2003.
Après avoir purgé une partie de sa peine de prison, et reconverti en consultant pétrolier, ce dernier obtient en 2006 avec son associé émirati, Abbas Youssef, au nom de la société Pilatus, une licence d’exploration du gisement de Ngoki au Congo Brazzaville. Sauf que les deux hommes ne disposent pas du premier centime pour démarrer les opérations, tout juste se bornent-ils à financer les études préliminaires à l’aide d’un crédit bancaire. De 2006 à 2012, les deux hommes vont tenter à tout prix de revendre une partie de leur permis à un partenaire disposant des ressources nécessaires et font le tour des partenaires potentiels . A l’aube de l’échéance de sa licence de 5 ans, Pilatus pense avoir trouvé le partenaire miracle, et conclut un « deal » avec la société de Trading Pétrolier SARPD OIL, propriété du milliardaire congolais basé au Maroc Claude Wilfrid Etoka, actif également dans l’huile de palme et les bio-carburants. La société est renommée, passant de de Pilatus Energy à Petroleum Exploration & Production Africa (PEPA). L’acte I de la nouvelle vie du bassin de Ngoki est scellé.
Entre temps, Abbas Youssef et Loïk le Floch-Prigent ont été fragilisé par une autre « affaire », au Togo cette fois, où ils auraient été impliqués dans une arnaque à la Nigériane, qui a valu à l’ancien Président d’Elf de se retrouver à nouveau sous les verrous.
A l’été dernier, l’« Affaire Ngoki » connait un énième rebondissement, avec la prise de contrôle de PEPA, par son actionnaire minoritaire, le groupe de trading pétrolier SARPD OIL, qui a procédé à une augmentation de capital diluant son associé à la portion congrue. SARPD OIL, qui s’est adjoint les services d’un avocat et d’un huissier suisse, fait valoir le fait que Pilatus AG, propriété de Abbas Youssef et qui possédait 70% de PEPA, n’aurait jamais procédé à la mise de fonds de près de 27 millions de dollars US, qui correspondait à sa quote-part afin de poursuivre les explorations.
Pire, les actionnaires estiment que Pilatus n’a jamais procédé aux investissements nécessaires afin de mettre le projet sur les rails, ce que semble confirmer une analyse de l’association des consultants pétroliers de Paris qui pointe du doigt la faiblesse du forage, qui n’atteindrait pas les 3000 mètres requis, pour des raisons de budget.
Depuis l’été, Pilatus a fait feu de tout bois à la fois dans les médias et auprès de la justice congolaise afin de tenter de bloquer l’augmentation de capital effectuée par son ex-partenaire SARPD OIL, mais serait paradoxalement dans une position intenable si elle était appelée à honorer ses engagements financiers vis-à-vis de PEPA, ne disposant pas des 27 millions de dollars nécessaires pour participer à l’augmentation de capital. Si la justice venait à obliger Pilatis à régler sa quote-part contractuelle, cette dernière n’aurait plus qu’à mettre la clé sous la porte, ou trouver un énième repreneur miracle qui serait capable d’injecter les fonds. En cette période où les cours du baril sont en dessous des 50$, autant dire mission impossible...
Dernier événement en date, en avril 2016, le tribunal de commerce de Brazzaville semble donner raison à la société de Trading pétrolier SARPD OIL, pointant du doigt « une incohérence dans l’actionnariat de la société P.E.P.A dans ses rapports avec les sociétés Pilatus », comme le montre le document ci dessous.

Selon plusieurs sources bien informées, il y aurait en sous main un lobbying actif en faveur de Pilatus de la part de l’ancien patron de PEPA, Alphonse Oyabiki, viré sans ménagement au cours de la fameuse assemblée générale estivale augmentant le capital. Ce dernier, toujours selon les mêmes sources, tenterait de « récupérer une compensation » de la part de SARPD OIL afin que le dossier « soit oublié ». De manière générale, le dossier du gisement de Ngoki semble s’acheminer vers une résolution qui solderait la mort d’une partie des réseaux « françafricains » animés par les anciens de Elf, très actifs jusque là au Congo Brazzaville. La fin d’une époque ?