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Billet de blog 7 mars 2018

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Journée des droits des femmes : et si on changeait de paradigme ?

#metoo en souvenir de ce prof de français qui approchait ses mains bien trop près de nos poitrines de lycéennes et que j’avais dénoncé au doyen sans que jamais il ne soit inquiété et bien que sa réputation à ce sujet n’était plus à faire.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Il y a longtemps que je souhaite prendre mon stylo et écrire ce que je ressens au sujet du débat actuel autour du harcèlement sexuel et du hashtag metoo. Mais si je n’ai pas réussi à le faire jusqu’à présent, c’est que je ne suis pas encore certaine de mon opinion à ce sujet.

Une part de moi est bien sûr complétement choquée – mais pas vraiment étonnée – de ce qui a été révélé dans la presse ces derniers mois. Le mouvement #metoo a permis de mettre en lumière ce qui semblait pourtant évident, à savoir que la majorité des femmes ont été victimes au moins une fois dans leur vie d’un gros lourd – voire davantage.

Mais une autre part de moi n’est pas complètement opposée à la tribune si controversée publiée dans le journal Le Monde par Catherine Deneuve et ses collègues. Et si la polémique allait tout de même trop loin ? Et si nous nous dirigions vers une société ou chaque geste de la gent masculine serait immédiatement dénoncé comme du harcèlement ?

La difficulté qu’il y a à se positionner, c’est qu’il est extrêmement difficile de faire la part des choses entre ce que, en tant que femme, j’ai intégré et ce que je crois penser. Par exemple, je sens que mon inconscient a toujours tendance à trouver normal qu’une femme réduise son temps de travail pour s’occuper de ses enfants, à trouver moins tragique une agression faite sur une femme habillée de manière très  – j’allais dire trop  – sexy ou à penser directement que le Dr Dupont sera un homme. Parce que c’est ce que la société, l’éducation, les médias m’ont amené à penser.

Mais au fond, si je réfléchis objectivement – ne l’est-on jamais vraiment – quel est mon avis ? Et c’est bien là le problème. Et pas que pour moi. Je pense que les femmes, même en ce moment propice à l’engagement, ont du mal à s’unir pour leur cause, car, comme moi, leur inconscient est biaisé par tous les préjugés gravés en elles depuis l’enfance. Ainsi, certaines femmes qui se sont battues pour avoir une très bonne place dans une entreprise auront peut-être tendance à estimer que les autres doivent en faire autant. Ou à penser que la victime d’une agression sexuelle n'avait qu’à faire attention. Parce que c’est ce que tous, nous avons intégré dès le plus jeune âge.

Il semble que ce qu’il se passe actuellement ne pourra être transformé en une véritable évolution sociétale que par un changement de paradigme dans la manière d’expliquer le rôle de la femme dans la société à nos enfants. Tant que moi-même et tant d’autres femmes aurons tendance à avoir des préjugés machistes, nous ne pourrons pas être mises sur un pied d’égalité avec les hommes.

Le droit de vote des femmes a dû passer par la conviction des femmes elles-mêmes qu’elles étaient capables de voter. L’augmentation du nombre de femmes dans les métiers dits « masculins » – déjà rien que le terme est dissuasif – passe par la conviction des femmes qu’elles en sont aussi capables que les hommes.

Ne bannissons pas les différences hommes-femmes, elles existeront toujours, ne serait-ce que sur le plan physique. Mais arrêtons d’éduquer nos filles comme si elles étaient moins compétentes que les garçons et qu’elles devaient être plus belles et plus sages qu’eux pour réussir.

#metoo en souvenir de ce prof de français qui approchait ses mains bien trop près de nos poitrines de lycéennes et que j’avais dénoncé au doyen sans que jamais il ne soit inquiété et bien que sa réputation à ce sujet n’était plus à faire.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.