Au pays des polémiques stériles, voilà que s’invite le faciès vérolé d’un grand ancien, d’un homme qui fût de la providence jusqu’à en perdre la tête. Et ceux-là qui déglinguent à tout va les icônes d’un passé proche, tels que De Gaulle ou d’autres, s’insurgent soudain de voir Robespierre étrillé par un sculpteur de têtes.
Je ne prends pas parti(e). Remettre sur le métier de l’histoire, le tapis de la dévotion béate aux sauveurs de l’humanité me semble être une saine nécessité. Ce qui me dérange, c’est que, selon son obédience, on se frotte le bidon ou on conspue la tronche de l’autre. Le physique s’invite en permanence au festin, mais toujours le physique de l’autre, de l’ennemi.
J’apprécie la vaste culture de Mélenchon, j’apprécie moins qu’il monte au créneau pour nous donner une peau lisse à Robespierre, glissant par-là que, comme lui, l’homme est victime de discrimination liée à l’apparence. Mélenchon, il parle de lui ou de Robespierre ? Parce qu’on peut se poser la question.
Moi, la tronche à Robespierre, je l’aime bien, elle nous rappelle les vastes progrès de la médecine, où la variole est un vieux souvenir, où le vieillissement est moins dévastateur qu’il y a quelques siècles.
Par contre, le débat sur la réalité de cette reconstitution, je le trouve passionnant… Quid de la blessure faciale par arme à feu qu’il aurait reçue, le grand homme, quelques heures avant son exécution…
Ce qui me réconcilia avec l’histoire, dans mon jeune temps, ce fut l’anecdote. Et oui, chacun son chemin. Si au moins la tronche à Robespierre pouvait amener de jeunes esprits à s’intéresser au passé, elle ferait preuve de vertus pédagogiques insoupçonnées. Parce que le passé, l’histoire, discipline molestée par le libéralisme, est un socle de connaissances fondamentales à la construction de l’avenir. J’en ai entendu de ces phrases idiotes qui disaient que, pour être un bon ouvrier, il n’était pas besoin de connaitre la date de Marignan. Autrement dit : « sois un robot mon fils, tu serviras l’efficience ».
Avec celle de Robespierre, on est en plein diner de tronche… juste avant le diner du réveillon. Côté « diner de tête », celui que le préfère, c’est celui de Prévert.