Etre animée de bonnes intentions ne me suffit pas...
Abonné·e de Mediapart
Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.
Judith est une jeune gamine dégingandée, une haridelle famélique. Elle quitte l’adolescence avec le pied sur la balance et l’œil sur le compteur à kilos. Elle veut devenir peintre. Elle s’imagine une bohème sous les toits de Paris faite de couleurs et de douleurs. Elle a déjà un joli coup de crayon et l’envie furieuse de raconter le monde. C’est qu’elle pense la création comme un acte militant. Et ce qu’elle sait également c’est que son inculture entrave ses pinceaux.
La voilà qui ouvre le grand livre de l’histoire à la recherche du fil ténu, ou pas, qui relie la Grotte de Lascaux à Picasso. Elle s’en remet à l’ange des bibliothèques, celui qui guide le lecteur et qui ouvre la page au hasard. Voilà que s’offre à son regard surpris la Vénus Lespugue d’ivoire sculptée et de formes généreuses pourvue. Elle a des fesses comme des courges et des seins de laitière. Le petit corps malingre de Judith en frissonne d’horreur. Elle s’attarde un peu sur le récit de la statuette puis repart à l’assaut du temps. Les Grâces de Rubens s’invitent à la fête, de saindoux et de colifichets parées, des grâces aux galbes adipeux. Elles ont des culs comme des vasques où les fossettes se multiplient à l’infini. Des femmes pleines comme des fontaines batifolent sous les frondaisons d’un éternel printemps. Judith se raconte que les canons plastiques ont longtemps vanté les charmes pleins des rondes. Elle ne voit plus la finesse des glacis ni des clairs obscurs. Elle ne s’attarde qu’à la chair trop nourrie. Elle qui traque chaque calorie comme l’ennemi malin, qui n’aime que voir l’os et la peau, elle découvre la beauté des ombres blanches sur le trop plein de rondeurs. Le corps nu des femmes a traversé le roman de l’esthétique. Est-ce que l’art de la nudité est beauté ? Judith s’en remet au destin pour la troisième fois. Une mamelue s’offre encore à ses émois. La ballerine à la barre de Botero étale ses appas en tutu.
« L’histoire de l’art, ce n’est qu’une histoire de lard ! » s’exclame soudain la gamine.
Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.
Le lien vers la page a été copié
L’auteur n’a pas autorisé les commentaires sur ce billet