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Billet de blog 4 septembre 2013

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pensées et neurobiologie du cerveau (suite)

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Si nous résumons, en gardant la métaphore de l'arbre avec les oiseaux, ce qui fait l'originalité de chaque être humain, est le choix que chacun fera de ses oiseaux préférés, détestés ou neutres.

Et notre vie n'est qu'une suite perpétuelle de course vers nos préférences ou fuite envers nos détestations ou la sieste car il faut bien se reposer de temps en temps.

Le vrai problème quant à la frustration éprouvée par un manque ou surplus de ceci ou cela, est sur deux plans.

Le premier est que toute satisfaction, assimilée au bonheur-plaisir, dépend des circonstances extérieures.

-Comment vas-tu ?

-Comme un lundi, comme le temps, etc …

C'est très frustrant à la longue, car nous ne sommes finalement jamais heureux mais perpétuellement frustrés.

Le second plan se situe sur le plan de la résistance aux changements.

-C'est bien ce pays où tu as passé tes vacances ?

-C'est beau, mais ils n'ont pas de pain comme chez nous, ils n'ont pas …etc

Et rebelote la frustration !

Comme une pelouse sur laquelle nous avons tracé un chemin à force de marcher régulièrement dessus, notre cerveau enregistre les différentes manières d'avoir du plaisir-déplaisir-neutre et cela devient automatique. Et comme pour une pelouse où il faut du temps avant que le gazon ne repousse, nos circuits neuronaux ont besoin de temps pour se connecter de façon différente.

Le premier plan est une malédiction pour les enfants, ainsi que pour les adultes qui ont oublié de se développer. Le deuxième concerne tous les êtres vivants.

Un coquelicot ne se change pas en cactus en cinq minutes, il y faut du temps, beaucoup de temps. Nous avons baptisé cela « l'évolution  des espèces ». Les psy disent « résistance au changement ». Et la neuroanatomie du cerveau constate que le circuit accumbens-émotion est plus court que le cortex-réflexion et que les connexions neuronales ont besoin de temps pour se construire.

L'enfant cherchant un bonbon pour se faire plaisir, comme l'adulte président décidant de faire la guerre, ou l'émigré d'origine espagnole naturalisé français chassant les Roms sont sur le premier plan.

« Je » ne peux être heureux que si les phénomènes répondent à mon diktat. Même si les évènements ne correspondent pas à ce que je veux, je les transformerai !

Un enfant ira chercher un tabouret pour accéder aux bonbons au dessus de l'armoire, un adulte ira chercher un moyen quelconque pour accéder à ses désirs, en l'ayant dûment justifié par un tas de phrases qui n'ont rien à voir avec l'affaire.

La différence entre un enfant et un adulte-enfant, c'est le prix des jouets. Un modèle réduit de bateau coûte moins cher qu'un yacht. Mais la psychologie est identique. Les deux s'amusent à se faire plaisir. Ou tout au moins, à essayer.

Clémenceau a dit que « le meilleur moment de l'amour c'est quand on monte l'escalier ».

Bonjour le gamin ! Et il appelle cela de l'amour !

Voilà un grand homme ...enfant. Président du Conseil, ministre de l'intérieur, bonjour les dégats.

Et ça veut nous guider …

Si nous décidons que le bonheur est affaire de circonstances extérieures, nous ne pouvons que passer notre vie à être frustrés, car aucun de nous ne peut maitriser complètement l'avenir.

Nous vivons d'ailleurs dans une société de frustrations permanentes.

Qu'est-ce que le capitalisme, dont la règle de base est la concurrence, peut nous apporter sur le plan du bien vivre ? A part pour ceux qui prennent leur pied en se bagarrant, je ne vois pas.

De plus, sur un plan théorique purement logique, la concurrence, donc l'élimination de l'autre, ne peut aboutir qu'à la concentration de toutes les richesse de l'univers entre les mains d'un seul et unique être humain. Il mourra d'indigestion, car le dernier médecin, il l'aura détruit également.

Nous sommes entrain, pour satisfaire nos désirs, de détruire la planète.

Voilà la conséquence immédiate de l'enfant qui ne veut pas trier ses déchets et préfère les jeter dans le jardin du voisin.

Tous ces désastres étant assez évidents, il suffit de retenir que tout vient du fait que l'être humain a décidé que son bonheur se trouvait dans les circonstances extérieures à lui. Nous détestons la frustration et avons choisi la voie qui conduit immanquablement à cette frustration honnie.

Existe-t-il une autre voie que nous pourrions emprunter , même avec cette inertie au changement inhérente à notre fonctionnement cérébral ?

Pour certains, il faut changer le système social. C'est sûr, grâce à un nouveau système social, un adulte resté enfant deviendra un adulte mature. Limiter le salaire maximum à 10 ou 20 fois le smig va fabriquer de la justice sociale pour certains. Mais fabriquera également des millions de frustrés. Ceux qui gagnent déjà plus, une toute petite minorité. Et ceux qui rêvent d'en avoir plus, la très grande majorité, ne seront pas d'accord non plus, même s'ils en sont très très loin, cela remet en cause leurs rêves, donc leurs circuits neuronaux, et ils n'aiment pas cela !

Ce que les psy appellent l'ego n'est rien d'autre, pour la plupart, que l'attachement que nous avons à notre satisfaction.

En acquérant de l'expérience, nous nous apercevons que, parfois, il est bon de refuser un petit bonheur immédiat pour un plus grand dans le futur. Mais ce n'est pas « donné » à tout le monde. Il aura d'abord fallu intégrer qu'avant d'avoir le plaisir de manger des patates, il faut les cultiver.

Et c'est là où le bât blesse. En dehors de notre inertie au changement, nos capacités de réflexion ne sont pas identiques d'un être humain à l'autre.

Expliquer à Goldman que la finance conduit au désastre, c'est expliquer à Valls qu'un Rom est son frère, à un militant X qu'il fait fausse route. Du temps et de l'énergie perdue …

L'être humain n'accepte de changer que dans deux cas .

Le premier, quand il y est obligé.

Après avoir épuisé toutes les stratégies qu'il connait, s'il n'obtient pas ce qu'il cherche, il est obligé de se transformer, de changer ses connexions neuronales habituelles.

On le constate de façon caractéristique dans les étapes du deuil.

(http://www.infirmiers.com/etudiants-en-ifsi/cours/cours-ifsi-le-travail-de-deuil.html)

Le deuxième cas se présente comme dans la chanson Amazing grace. Un esclavagiste prend soudainement conscience que ses actes sont vraiment pourris. Il n'y a aucun deuil à faire, aucune frustration ne peut être éprouvée, à part le très rapide « si j'avais su ça plus tôt ». Mais admettons que c'est rare.

Nous n'acceptons de changer notre collection habituelle d'oiseaux que dans ces deux circonstances.

Nous sommes très attachés à notre collection personnelle. Tout d'abord par habitude, puis par constructions successives tout au long de notre vie. Car cette collection, nous sommes responsables de l'avoir choisie.

Qu'il y ait des circonstances atténuantes telles que l'environnement, notamment publicitaire, ne nous absout en aucun cas de notre responsabilité. Ce n'est pas parce que la prostitution existe qu'il faut en user. Ce n'est pas parce que les politicard-es sont des menteur-ses qu'il faut faire comme eux.

Pourtant, Milgram a bien noté que si nous n'infligeons pas nous mêmes la punition électrique, nous sommes 92,5 % à le faire avec des chocs moyens de 400 volts, chocs mortels.

Où est la frustration dans ce cas là ?

D'un côté, le plaisir de faire plaisir à celui qui a donné l'ordre ou la peur de lui déplaire,de l'autre, la souffrance de l'électrocuté. Au final, nous choisissons la mort de l'autre à 92%. Tout cela parce que notre autonomie de penser se résume à la recherche de notre confort. Pour ne pas aller jusqu'au bout, il nous faudrait remettre en cause nos circuits neuronaux.

Quel que soit le système social, la hauteur du salaire maxi ou des dividendes, la propriété privée ou collective des moyens de production et la vitesse du vent, la bête humaine ayant choisi le bonheur-plaisir n'aura comme seule boussole, en dernière analyse, que son nombril.

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