Aujourd'hui, le Cavaliere a fait une visite éclair sur l'île de Lampedusa, où affluent depuis plusieurs jours des réfugiés venus essentiellement de Libye, de Tunisie et de Somalie. La petite île, littéralement débordée (les migrants sont actuellement aussi nombreux que la population) réclame des solutions. Qu'importe, partout où il y a urgence (comme à L'Aquila après le tremblement de terre, comme à Naples lors de la crise des ordures), et surtout quand il s'agit de faire diversion (en ce moment, Berlusconi fait face à ses juges milanais), le Cavaliere est là ! Il a promis que dans 60 heures maximum, l'île sera débarrassée de tous ces indésirables. Ils partiront vers d'autres régions d'Italie, à bord de six ou sept navires de guerre, et un millier de Tunisiens devraient regagner leur pays manu militari. Berlusconi a déclaré que l'ïle serait candidate au prix Nobel de la paix. Il y fera construire un casino, ajoutera du vert et du rose, pour qu'elle ressemble à Portofino, et vient d'y acheter une villa, signe de sa proximité avec les Lampedusiens. Il s'est également fendu d'une histoire drôle sur ses succès auprès des femmes et a récité un poème à la gloire des yeux d'une habitante de l'île.
Tout cela pendant que la gauche italienne crie au scandale, car Berlusconi vient de commettre un "crime parfait" : donnant à croire qu'il se présentait héroïquement face à ses juges, évidemment communistes (pour l'instant dans la cadre du procès Mills, puis dans celui du Rubygate, où il est soupçonné de relations sexuelles tarifées avec une mineure), il a réussi à faire passer un loi sur le "processo breve" (le procès rapide). Tout change donc pour que rien ne change : une énième loi ad personam, qui permettra à Berlusconi d'échapper à la condamnation pour corruption ; une loi qui risque d'aboutir à l'annulation de 100 000 procès, dont certains visent des crimes de droit commun (viol, attaques à main armée), outre des scandales financiers. "C'est le prix à payer par les Italiens", écrit Massimo Giannini dans Repubblica d'aujourd'hui. "Pour garantir son impunité, ils doivent renoncer à leur justice."