Le débat anime la presse belge depuis une semaine. La Flandre pratique-t-elle la discrimination linguistique ? C'est en tout cas ce dont s'inquiète l'ONU, dans un rapport daté du 11 mars. En cause, le code flamand du logement (Wooncode), adopté en décembre 2006, qui restreint l'accès aux logements sociaux aux seuls locataires de langue néerlandaise ou à ceux qui s'engagent à l'apprendre. La commune de Zaventem (en périphérie bruxelloise) est également épinglée pour ne vendre ses terrains qu'aux seuls néerlandophones. Le comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination raciale demande donc à la Belgique de "veiller à ce que les exigences linguistiques ne conduisent pas à une discrimination indirecte exercée en raison de l'origine nationale ou ethnique".
Le 12 mars, la Commission européenne a indiqué que l'exécutif européen examinait la compatibilité du code du logement flamand et du règlement de Zaventem avec la directive européenne sur la liberté de mouvement des citoyens européens, qui "n'accepte pas de discriminations". Ajoutant que sur les deux mesures prises en Flandre, "il y a matière à discussion. La Belgique va devoir donner des explications".
Outré par cette condamnation, Marino Keulen, ministre régional flamand du Logement, estime que le "wooncode" n'a rien de discriminatoire. Au contraire : il répond à une volonté "d'intégration sociale."
Sur le fond, ce débat communautaire n'a rien de neuf. D'un côté, la Flandre, effrayée par le spectre d'une "tâche d'huile" francophone en région flamande, notamment aux alentours de Bruxelles, multiplie les mesures de sauvegarde de sa langue. Car c'est un fait, nombre de francophones installés en périphérie bruxelloise (flamande) ne prennent même pas la peine d'apprendre quelques mots de flamand, quand quasi tous les néerlandophones comprennent le français.
De l'autre côté, les francophones de la périphérie dénoncent des mesures discriminatoires. Dans les conseils communaux (municipaux), aucun élu n'est autorisé à parler français, puisque la langue administrative est le néerlandais. Certaines communes de la périphérie, comme Overijse, découragent les commerces de laisser toute trace de français sur leurs panneaux publicitaires.
Bien-sûr, les tensions ne sont pas nouvelles. Mais les associations de lutte contre le racisme et les discriminations en Belgique pointent l'émergence d'attitudes racistes... entre francophones et flamands. Qui n'existaient pas jusqu'à présent mais débouchent désormais sur des dépôts de plaintes. Voilà de quoi pousser le Mrax (Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie) à mener campagne pour inscrire la lutte contre les discriminations dans l'agenda politique. (voir l'interview du président du Mrax dans Le Soir du 13 mars). Tout cela, alors que la formation d'un gouvernement fédéral est attendue dans moins d'une semaine…

En périphérie bruxelloise, les inscriptions françaises sont souvent taguées par des extrémistes flamands