
Nouveau couac cette semaine dans les relations francophones-flamands. L'incident se passe à Liedekerke, commune flamande de la périphérie bruxelloise. Une petite cité pavillonnaire plus que tranquille, avec ses maisons cossues, son école. Et son terrain de jeux... devenu brusquement terrain de discorde. Le bourgmestre (maire) de la commune vient de tenter de faire interdire son accès aux enfants non néerlandophones. Pour cela, le dernier conseil communal (municipal) a voté un règlement autorisant les moniteurs des centres aérés de la commune à refuser les enfants non néerlandophones.
Discrimination? Le bourgmestre Luc Wynant (CD&V démocrates chrétiens flamands, parti du premier ministre Yves Leterme) s'en défend. Pour lui, il ne s'agit que d'une mesure de sécurité: "Quand il faut s'occuper d'un groupe d'enfants et les laisser jouer en toute sécurité, il est important qu'ils comprennent ce que les moniteurs leur disent. Dans le passé, nous avons eu beaucoup d'enfants qui venaient dans nos plaines de jeux, même de Bruxelles, et qui ne connaissaient pas le néerlandais", a-t-il expliqué dans une interview à la radio flamande Radio 2, le 25 février.
Illico, la presse se déchaîne, surtout du côté néerlandophone. Le quotidien flamand De Morgen va même jusqu'à qualifier la mesure "d'apartheid linguistique". Le débat a donc enflé toute la semaine, au point de pousser Marino Keulen (libéral), ministre flamand de l'Intérieur, à étudier ce cas de plus près. Son verdict : le règlement de Liedekerke est illégal, puisqu'il exclut des enfants sur critère linguistique. Cette mesure devrait donc être annulée, même si le ministre a indiqué que le règlement pouvait s'appliquer aux enfants n'habitant pas Liedekerke. La polémique peut retomber.
Reste que l'incident n'a rien d'un cas isolé. Il vient s'ajouter à une série de mesures prises ces dernières années par plusieurs communes flamandes en périphérie bruxelloise. Car c'est bien la banlieue de Bruxelles qui cristallise aujourd'hui les tensions linguistiques. Territoire flamand, elle voit affluer de plus en plus de francophones ou anglophones qui cherchent à s'y installer. Effrayées par le spectre d'une "colonisation francophone", les communes flamandes multiplient les mesures de protection de leur langue et culture. Au risque de déraper.
A Zaventem ou Vilvorde, par exemple, la vente des terrains communaux est réservée aux seuls néerlandophones ou à ceux qui suivent des cours de langue agréés. A Overijse, les inscriptions et signalisations en langue française sont interdites.
Et la Flandre est désormais dans le collimateur des organisations internationales. Il y a deux semaines (voir le post du 16 mars ), l'ONU et l'Europe ont émis des inquiétudes concernant le Code du logement (Wooncode) adopté par la Flandre en décembre 2006, qui réserve l'accès au logements sociaux aux seuls néerlandophones ou à ceux qui s'engagent à l'apprendre.