La situation à l'assemblée nationale se dégrade de jour en jour. Là encore, il est frappant de constater combien les discours de Nicolas Sarkozy s'éloignent de la réalité : il n'a cessé de clamer sa détermination à renforcer les pouvoirs du Parlement, à revaloriser cette institution dont le fonctionnement est indispensable à la bonne santé de notre démocratie. Pourtant, l'attitude des parlementaires et membres de la majorité présidentielle se révèle en contradiction totale avec ces bonnes paroles.
Prompts à fustiger des députés socialistes "instrumentalisant la crise" et "prolongeant les débats inutilement et de façon irresponsable" à des fins d'obstruction parlementaires, il serait bien que les députés UMP remettent en question leur attitude. Car elle est un des facteurs explicatifs (même si ce n'est pas le seul) de la crise institutionnelle et surtout parlementaire que nous traversons, et elle est à mes yeux déplorable.
Que le PS profite de la crise pour se faire entendre de la majorité est assez normal, même si on peut regretter que ses critiques ne soient pas toujours fondées et que le "contreplan" soit trop démagogique pour être crédible. Affaiblis par leurs désaccords internes profonds, les parlementaires socialistes ont recours à des mesures de plus en plus "extrêmes" pour montrer leur désaccord avec la majorité pour la simple raison que les parlementaires UMP se comportent comme si l'opposition n'existait pas.
On ne peut donc pas reprocher au PS d'instrumentaliser la crise économique et sociale à des fins politiques: si la majorité ne niait pas constamment tous ses droits, ils ne seraient pas contraints d'en arriver là. Non contents de tenter par tous les moyens d'affaiblir le pouvoir parlementaire face à l'exécutif, les membres de la majorité présidentielle font preuve d'une arrogance et d'un mépris révoltants (je pense aux déclarations de Jean-françois Copé et de François Fillon) et indignes de l'attitude qu'on serait en droit d'attendre de nos élus. Le spectacle que nous offrent les débats à l'assemblée ces temps ci sont consternants, et la surenchère permanente n'est ni constructive ni de bon augure pour la revalorisation du pouvoir parlementaire.
Il serait utile de rappeler (comme l'a justement fait Laurent Fabius) que le temps est un élément indispensable de la démocratie: il est nécessaire à la délibération qui permet d'établir un consensus entre des opinions divergentes. La crise appelle à des mesures exceptionnelles et rapides, c'est pourquoi l'obstruction parlementaire est regrettable en ces temps difficiles. Mais en escamottant le débat sous prétexte d'efficacité et en méprisant systématiquement l'opposition, on ne peut que favoriser l'autoritarisme et la mainmise de l'exécutif sur un pouvoir législatif déjà exsangue.Ce n'est ni dans l'intérêt des parlementaires (UMP compris), ni dans celui des citoyens que de favoriser une telle dérive.