En 1887, un livre au nom intriguant est publié, il s’appelle “Langue Internationale. Préface et manuel complet”. D’abord publié en russe puis en polonais, en français, en allemand et par la suite traduit en anglais, en suédois, en italien, en espagnol, et beaucoup d’autres. Ce livre se présente comme un manuel de langue pour une langue dont très peu de personnes ont entendu parler : l'Espéranto.
L’espoir de l’Espéranto était de créer une langue facilement compréhensible par les différentes populations de l'Europe. En somme une langue que tout le monde puisse parler peu importe sa langue d’origine, le contexte social, l’ éducation.
Dès la préface de ce livre, Zamenhof l’auteur, nous fait par de ses attentions pour cette langue “Que chacun qui apprendra cette langue, puisse aussitôt en profiter pour se faire comprendre des personnes de différentes nations, soit qu’elle trouve l’approbation universelle, soit qu’elle ne la trouve pas, c’est-à-dire, que cette langue puisse servir d’emblée de véritable intermédiaire aux relations internationales.”
De la tour de Babel aux politiques linguistiques européennes, le besoin d’avoir une langue commune qui permette aux populations de se rapprocher dans une entente cordiale a toujours été présent. C’est exactement ce que l’anglais fait depuis le début du XXème siècle.
Le statut de l’anglais comme Lingua Franca, c’est à dire une langue “de transmission des connaissances” (Claude Truchot, “L'anglais comme « lingua franca » : observations sur un mode de majoration”, 2005), n’est plus à démontrer. Et c’est justement ce statut qui questionne. Contrairement à l’espéranto, l’anglais est rattaché à plusieurs pays et cultures. L’anglais n’est pas une langue internationale, c’est une langue utilisée à l’international.
Mais est-ce vraiment un problème ? Concentrons-nous spécifiquement sur l’Europe. Avant le Brexit de 2020, l’anglais était la langue majoritairement utilisée pendant les réunions au sein de l’Union Européenne (UE). C’était la Lingua Franca de l’UE, et comme elle était représentée par un pays, l’Angleterre, c’était aussi la langue d’un pays officiel. Maintenant que l’Angleterre s’est retirée de l’UE, l’anglais n’a que le statut de Lingua Franca et non plus de “Langue d'un pays membre”. Certaines propositions ont été faites pour avoir une autre langue de communication au sein de cette institution. Le français et l’allemand ont été présentés comme pouvant remplacer l’anglais pendant les réunions et dans les comptes rendus. Toutes ces discussions nous prouvent bien que le statut de l’anglais uniquement comme Lingua Franca au sein de L’UE n’est pas possible, dû au fait qu’elle a un passé, une histoire et est rattachée à plusieurs pays dont c’est la langue nationale.
Alors nous pouvons comprendre que le besoin d’une langue commune est plus que nécessaire et qu’il faut absolument permettre la communication entre les individus comme entre les institutions. Les linguistes peuvent rêver d’un temps où une vraie Lingua Franca existera. C'est-à-dire une langue qui ne permet que de transmettre des connaissances, mais qui n’est pas propre à une culture, un pays ou un peuple. Une langue qui existe que dans les limites de la transmission d’information, comme l’Espéranto par exemple. Mais pour l’instant une des seules langues qui permette de le faire (dû à des politiques linguistiques et des influences anglophones qui ont commencé à la fin de la Première Guerre mondiale) est l’anglais.