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Billet de blog 13 novembre 2016

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Comment atteindre cet électorat "lepéniste de circonstances"?...

La victoire de Marine Le Pen en 2017 est désormais possible. Le Brexit... Trump... Demain Marine?...

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La victoire de Marine Le Pen en 2017 est désormais possible. Le Brexit... Trump... Demain Marine?...

Il existe un noyau dur de l'électorat FN. Ceux-là sont racistes, antisémites, révisionnistes. Aucun débat raisonné n'est possible avec eux. Absolument aucun. J'ai essayé. En quelques minutes, parfois secondes, j'étais couvert d'injures, abreuvé de menaces.

Et puis il existe un autre électorat FN. Composé souvent de citoyens qui n'ont jamais voté FN de leur vie. Qui votaient même, pour un certain nombre, très à gauche. Engagés syndicalement dans des organisations que l'ont dit "marquées à gauche".

Un électorat aussi, qui s'abstenait élections après élections et qui, cette fois, ira voter. Pour la démagogie et le mensonge, pour un projet intenable mené par une équipe d'incapables, mais ils iront voter pour ceux qui leur font CROIRE à quelque chose. Ce constat-là doit être fait.

Ceux-là font partie de ces français qui subissent la mutation profonde d'un monde se transformant à très grande vitesse.

Aujourd'hui, les enfants entrant en maternelle ignorent tout - les adultes aussi -  de ces 65% de  professions nouvelles et inconnues qui existeront lorsqu'ils auront 20 ans. Ils ne savent pas car nous n'avons aucune idée de ce que seront ces professions.

En revanche, nous voyons déjà se diviser en deux le monde du travail qui s'annonce:

- d'une part des professions très peu valorisées et valorisantes, n'offrant que peu, voire pas du tout, de perspectives de progression. Professions "réservées" à celles et ceux qui auront échoué, les oubliés de l'Ecole, de cette école promise par les candidats de la droite actuelle: des élèves exclus très tôt, éliminés parce que plus éducables aux yeux des Juppé, Sarkozy ou Le Maire et Fillon. Aux yeux du FN, également, FN dont le projet Education pourrait être titré: "Le Massacre des Innocents".

- d'autre part des professions très valorisées et valorisantes, nécessitant un bagage culturel et un niveau d'expertise très élevé, résultat bien entendu d'études longues et onéreuses, donc ouvertes à des "dynasties" d'experts qui réserveront leurs "places".

Et entre les deux, tous les déclassés qui, à tort bien entendu, prêtent une oreille attentive aux discours démagogiques de Marine Le Pen et de ses amis.

Ces déclassés - et tout ce qui va suivre n'est empreint d'aucun mépris - existent en France. Je les rencontre parfois.

Ce sont ces gens exerçant une profession difficile, peu sûre car menacée par les licenciements, voire par la disparition totale. Ils habitent en ville, en périphérie. Ils ne sont pas chômeurs.

Ce sont ces ruraux, ces agriculteurs ou petits commerçants et artisans du Pays de Caux, du Pays de Bray, de tous ces "pays" qui font la France qu'on dit "profonde". Ils travaillent eux aussi, durement. Et eux aussi voient leur héritage disparaître, leurs enfants ne reprenant surtout pas des activités qui ne rapportent rien pour des heures où ils donnent tout.

Ces français-là ne sont pas racistes, ne sont pas antisémites, ne sont pas révisionnistes. Ils sont perdus. Et ils ont perdu confiance. En eux mais surtout en ceux qui à droite et à gauche n'ont pas vu ou voulu voir qu'ils existaient, étaient de plus en plus nombreux et grossissaient le flot risquant d'emmener le pays vers une catastrophe historique pas inéluctable, certes, mais possible.

Alors comment impacter ces populations qui - aucun mépris dans ce qui suit, je le redis - lisent peu la presse nationale, regardent de préférence TF1 à Arte, écoutent plus volontiers RTL à France Inter, se saoulent d'émissions présentées par des Cyril Hanouna dont la dangerosité involontaire devrait quand même faire réfléchir les patrons de chaînes, sont très éloignées des lieux de culture - cinémas; théâtres; bibliothèques; centres culturels; opéras - au point de considérer qu'une galerie marchande d'hypermarché est beaucoup plus intéressante qu'une visite de musée?

Ces populations qui n'utilisent qu'assez peu les smartphones, n'ont ni comptes Twitter ou Facebook, ne partent pas en vacances, ne voient les pistes de ski qu'au journaux télévisés et n'ont d'actualité que celle partagée le dimanche au stade pour venir encourager le fiston qui joue contre l'équipe du village d'à coté.

Ces populations qui apprennent que l'école, cette école où ils ont souvent échoué, cette école qui voit leurs enfants poursuivre dans la même voie de l' échec annoncé, s'inquiète beaucoup de la disparition des classes bilangues mais très peu de celle de 150 000 (110 000 depuis l'an dernier) décrocheurs. 150 000 PAR AN depuis des décennies. Des "décrocheurs" que je préfère appeler des "décrochés". Nuance.

Oui comment impacter ces populations auxquelles on ne parle plus, sinon par le biais de l'école,  seule institution qui depuis quatre ans fait en sorte d'apporter l'EGALITE sans égalitarisme ni refus d'exigence? Et cela - que cela plaise ou non - par le travail de ministres dont la dernière titulaire du portefeuille, Najat Vallaud-Belkacem - a le COURAGE, oui le COURAGE et la LUCIDITE, de porter cette EGALITE encadrée sur les frontons de nos écoles par la LIBERTE et la FRATERNITE!

C'est par plus d'égalité, plus de partage visible, plus d'école, plus d'éducation, plus de culture, plus de services publics, plus de proximité, plus de "commun", que nous impacterons, que nous "imprimerons" les esprits inquiets de populations trop longtemps délaissées, ni fascistes, ni racistes, ni révisionnistes mais qu'on a laissées entre les mains dangereuses du Front National!

Tout cela a été commencé dès 2012. Pas assez, pas assez rapidement? Sans doute... La politique est un temps long dans une époque du "tout, tout de suite".

Est-ce une raison suffisante pour prendre le risque de cinq ans de "purgatoire", voire d' enfer?

Je pose la question...

Christophe Chartreux

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