Ce qui suit s'est passé lundi dernier à la récréation de 10h dans "mon" collège...
Je traverse lentement le hall, et je croise une élève de 3e, élève que je n'ai pas cette année.
Nous parlons évidemment de l'actualité. Je lui demande si elle n'a pas été trop choquée par ces images de morts, de cadavres...
Et je l'entends me répondre:
"Mais monsieur, on n'a pas vu tant de cadavres que ça vous savez. On en a parlé mais on n'a rien vu"...
En quelques secondes j'ai repassé le film... Les images des chaînes d'informations...
Et je revis le Stade de France et les explosions, les terrases des deux cafés et des silhouettes furtives au sol, les cris de l'anonyme qui filmait à l'aide de son téléphone portable, un corps déjà enveloppé dans un de ces linceuls blancs utilisés par les services d'urgence, l'explosion d'un kamikaze au premier étage de l'immeuble où lui et ses complices s'étaient cachés.
Et puis ses longs, très longs plans fixes de rues encombrées de véhicules de police, d'ambulances toutes sirènes hurlantes et gyrophares allumés.
Mais en effet - je parle bien ici des images diffusées par les télévisions - très peu de cadavres. Tant mieux évidemment... Mettons-nous un instant, si cela est seulement possible, à la place des familles...
Pourtant dès ce lundi, et les jours qui ont suivi, les élèves de collège ont beaucoup évoqué les morts, les cadavres. Certains disaient:
"Tous ces cadavres qui jonchaient les rues! C'était affreux!"
Les enfants des écoles primaires, eux, ont dessiné beaucoup de corps allongés, ensanglantés, meurtris, brisés.
Et pourtant, des cadavres, nous n'en avons vus que très peu. Et, j'insiste: tant mieux!
Les tragédies sont désormais filmées, commentées. Les mots frappent les imaginations. Peut-être plus fortement encore que les images.
Les bruits aussi... Les bruits surtout... Les claquements de fusils automatiques, des "Kalachnikov", les cris des rescapés qui se sauvaient dans les rues, résonneront longtemps aux oreilles des élèves. Et des adultes.
Nous n'avons pas VU beaucoup de cadavres...
Mais nous avons ENTENDU la mort!...
Christophe Chartreux
www.profencampagne.com