Je remercie l’équipe d’Alternatives Économiques pour son dossier, et plus récemment son hors série sur K. Marx, au sein duquel les théories de ce grand penseur du 19ème siècle sont abordées de façon critique et argumentée, hors des stéréotypes surannés des pour et des contre. J’ai trouvé en revanche, que le débat entre R. Boyer et J.M. Daniel, s’appuie parfois sur des lieux communs qui auraient mérité une plus grande distanciation scientifique, pour reprendre les termes de Pierre Bourdieu. Aussi, si les économistes me le permettent, j’aimerai apporter un autre point de vue, inspiré de mes travaux sur les référentiels implicites des milieux professionnels1 et sur l’analyse préliminaire des paradigmes scientifiques dans ma thèse de doctorat2, point du vue que j’alimenterai de mes modestes connaissances en économie. J’espère ainsi enrichir les débats sur les contradictions actuelles de notre société moderne.
1 - L’amorce du débat :
Ce débat est intéressant : il souligne quelques erreurs du Marx militant par rapport à sa projection historique sur l’issue des crises du capitalisme, il met en valeur des auteurs économistes moins connus et il se situe dans la tradition dialectique des universités3 qui pose les problématiques de façon pertinente. Mais permet-il d’avancer au-delà de cette problématisation ? Ces joutes, fort prisées dans les médias modernes, nous laissent souvent sur notre faim faute d’aborder l’analyse sur le fond, en particulier les différences entre les paradigmes scientifiques qui s’opposent et la façon dont les sciences ont construit leurs fondamentaux (concepts, méthodes, postulats, etc.) ? Ainsi les sciences humaines et sociales se heurtent-elles souvent sur des blocages entre courants de pensée, qui s’affrontent et qui échangent sans discuter sur le fond. Je prendrai, pour exemple, cette approche critique de S.C. Kolm, dans les années 80 : « la théorie marxiste des crises de réalisation aura une grande importance dans les idées, un grand pouvoir pour expliquer les crises et une énorme influence dans le destin du monde. Mais c’est Keynes qui développa cette théorie qui prendra son nom ; aussi, ce point d’histoire des idées remis en question, il n’y a plus lieu de faire référence à Marx sur cette question »4. Certes, mais les conceptions de J.M. Keynes n’ont résolu que partiellement le problème : elles se sont heurtées aux spirales de l’inflation et les monétaristes ont évincé les Keynésiens des chaires universitaires, souvent avec le même type d’argument. Si la forme des crises a changé en raison des nouveaux modes de spéculation, en particulier depuis l’ouverture des marchés dans les années 80, et surtout si les dirigeants politiques et les milieux de la finance ont intégré les conceptions Keynésiennes et Monétaristes (comme l’illustre l’intervention des banques centrales et les systèmes de régulation mis en place pour juguler la crise de 2007-2008), les crises sont toujours présentes, récurrentes, et de plus en plus mondialisées. Les débats sont donc loin d’être clos sur la pertinence de telle ou telle théorie. Aussi est-ce un arrière goût d’insatisfaction que nous laisse cette esquive de J.M. Daniel, qui consiste à renvoyer les théories de Marx vers les autres disciplines : « on peut faire l’impasse sur Marx économiste. Laissons-le aux philosophes et aux historiens ». Les grands sociologues, voire les grands économistes (par exemple, J. M. Keynes) sont ceux qui ont intégré d’autres sciences à leurs réflexions, en particulier pour ce dernier certains facteurs psychologiques. L’histoire elle-même n’a-t-elle pas remis en question le culte des grands héros et des guerres nationales ou impériales, en s’appuyant sur les paradigmes des autres sciences, économiques, mais aussi sociologiques, linguistiques, etc. ? L’économie serait-elle immunisée contre cette complexité des sciences sociales ? Mais puisque nous y sommes invités par J.M. Daniel, analysons l’influence des théories de K. Marx sur les autres disciplines. Nous pourrons alors peut être en déduire si elles ont encore, ou non, un intérêt pour les sciences économiques. Nous pourrons aussi analyser les limites de ces théories, inhérentes à l’époque de son auteur, et nous ouvrirons alors peut être des pistes pour la recherche, du moins si nous souhaitons observer la société dans toute sa complexité.
2 - Matérialisme et Idéalisme, K. Marx philosophe :
La grande innovation scientifique de K. Marx a été le renversement matérialiste de la Dialectique de G.W.F. Hegel, développé par ce dernier dans sa Philosophie du droit. Dans l’Idéologie allemande, le jeune Marx explique que, pour analyser l’histoire, il ne s’agit pas d’étudier les idéologies, ainsi que le proposait G.W.F. Hegel, mais les conditions matérielles, sociales et économiques qui ont induit des changements dans l’organisation sociale. « Des individus déterminés qui ont une activité productive selon un mode déterminé entrent dans des rapports sociaux et politiques déterminés. Il faut que dans chaque cas isolé, l’observation empirique montre dans les faits, et sans aucune spéculation ni mystification, le lien entre la structure sociale et politique et la production (…) La production des idées, des représentations et de la conscience est d'abord directement et intimement mêlée à l'activité matérielle et au commerce matériel des hommes, elle est le langage de la vie réelle. Les représentations, la pensée, le commerce intellectuel des hommes apparaissent ici encore comme l'émanation directe de leur comportement matériel ».5 Ce postulat sera repris par de nombreux scientifiques du 20ème siècle, y compris M. Weber qui a fréquenté les milieux socialistes avant de s’en démarquer, par la suite, pour fonder son approche sociologique.
Pour G.W.F. Hegel, la pensée est Première parce qu'elle préexiste à l'être humain, du moins au niveau historique : la jeunesse découvre, à travers les ouvrages, les idées des anciens. L'Universalité s'exprime ainsi dans cette accumulation de la sagesse à travers les écrits les plus significatifs de l'histoire humaine. En bon philosophe du début du 19ème siècle, il différencie cependant le domaine des Idées de celui des Objets qui sont l'apparat de celles-ci (l'œuvre pour l'art, le culte ou ses représentations pour la religion, etc.). L'Idée se matérialise ainsi à travers de nouvelles formes sociales, avant de renaître et d'évoluer dans les pensées d'auteurs plus récents : « ainsi, au 15ème et 16ème siècle, on est revenu aux anciennes philosophies » (grecques et romaines), mais « l'esprit universel a progressé », il a changé de « forme », de « vêtement ». Dans cette dialectique entre l'univers des Idées et ses expressions sociales, « l'esprit universel se développe en lui-même selon sa propre nécessité »6.
K. Marx reconnaît la richesse de la dialectique Hégélienne, mais il renverse la logique : « A l'encontre de la philosophie allemande qui descend du ciel sur la terre, c'est de la terre au ciel que l'on monte ici. Autrement dit, on ne part pas de ce que les hommes disent, s'imaginent, se représentent, ni non plus de ce qu'ils sont dans les paroles, la pensée, l'imagination et la représentation d'autrui (...), on part des hommes dans leur activité réelle, c'est à partir de leur processus de vie réel que l'on représente aussi le développement des reflets et des échos idéologiques de ce processus vital » (idem). Pour lui, la dialectique est aussi un moteur de l’histoire, mais sous forme de lutte entre les classes sociales, entre les différentes catégories de la société qui cherchent à imposer leur domination sur les moyens de production et la distribution des richesses. Les moyens matériels et organisationnels, dont disposent les différentes catégories, font évoluer ces rapports de force. Les combats idéologiques ne sont que le reflet de ces luttes de pouvoir. K. Marx préconise ainsi l’étude des causes objectives à l’origine des évolutions sociales.
La notion de « renversement matérialiste » est plus aisée à saisir quand on connaît la langue germanique. En allemand, il existe deux façons de traduire le verbe modal du « devoir »7 : « müssen » est l’obligation face aux contraintes imposées par la société et « sollen » est le devoir moral. De même, le verbe « pouvoir » peut se traduire par « können » quand il s’agit de capacités à faire ou par « dürfen » quand il s’agit d’avoir le droit de faire. G.W.F. Hegel a privilégié le « sollen » et le « dürfen » en tant que moteurs de la société, le « devoir » en tant qu’Idée à laquelle la société civile adhère, l’Idéal catégorique qui la guide, en un mot la « Cause » ; K. Marx a privilégié le « müssen » et le « können », c’est à dire l’étude des contraintes organiques et matérielles qui s’imposent aux membres de la société, l’analyse des « causes organiques et matérielles » qui sont contraignantes pour la vie en société.
Mais cette conception a été complètement bouleversée avec l’arrivée des bolcheviks au pouvoir, en Russie. Quand Lénine s’est approprié ces théories, il l’a fait pour justifier les choix politiques des bolcheviks, au nom du « marxisme » érigé en Idée Supérieure, caution morale, Cause idéologique - certainement en raison du poids qu’avaient acquis les théories de Marx et d’Engels au sein du mouvement socialiste. Quand Lénine passe à l’action et s’adresse au comité central du POSDR (parti ouvrier social démocrate de Russie), il écrit : « ayant obtenu la majorité aux soviets des députés ouvriers et soldats des deux capitales, les bolcheviks peuvent et doivent prendre en mains le pouvoir » (octobre 1917). Si le « pouvoir » peut se traduire par « können » ou « dürfen », le « devoir » ne fait aucun doute, c’est un « Sollen » et non un « Müssen ». Lénine opère ainsi un nouveau « renversement »... mais à l'envers : un retour vers l'Idéalisme. Il prescrit, au nom de la philosophie de K. Marx érigée en « doctrine », en « Cause morale », ce que doit faire le prolétariat. Le sous-titre de l’ouvrage L’état et le révolution (août 1917) est sans ambiguïté à ce sujet : « la doctrine du marxisme sur l’état et les tâches du prolétariat dans la révolution ». Dans ses thèses d’avril 1917, il en trace les lignes : « le prolétariat conscient ne peut donner son consentement à une guerre révolutionnaire (…) que si les conditions suivantes sont remplies... ». Il s’agit bien d’un « dürfen ». La frontière entre l’analyse des causes objectives et la justification de la Cause morale devient très floue. Et cette confusion entre la Cause (idéologique) et la cause objective (scientifique) a justifié la dérive autoritaire, auto-argumentation d'un pouvoir qui s'est autoproclamé « historiquement nécessaire ».
L’idéalisme de Lénine le conduit d’ailleurs à des anachronismes, dans L’état et la révolution : « cette question, Marx la pose et la résout en 1852. Fidèle à sa philosophie du matérialisme dialectique, il prend comme base d’expérience historique les grandes années de la révolution de 1848-1851 ». Marx aurait donc suivie son Idée Première, le matérialisme dialectique, pour analyser les évènements historiques. Mais ce n'est pas si simple : cette conception d'une dialectique matérialiste n’est pas de K. Marx, mais de F. Engels qui développe ses recherches philosophiques sur la dialectique de la nature au cours des années 1870-80. K. Marx ne s’est pas inspiré d’une dialectique matérialiste pour analyser l’histoire, c’est l’analyse de l’histoire qui l’a conduit à définir ses principes « matérialistes », en rupture avec l’Idéalisme de G.W.F Hegel.
Lénine était un avocat : il avait étudié G.W.F. Hegel lors de ses études de droit. En revanche, il n’a guère étudié l’organisation des systèmes de production en Russie, ni les conditions économiques de son développement. Ce n’était pas un économiste et il n’y en avait guère parmi les bolcheviks. En évinçant, au nom de la Cause, de nombreux sociaux-démocrates et socialistes révolutionnaires, beaucoup plus modérés dans la façon de gérer la transition vers le socialisme, les bolchéviks se sont privés de bien des compétences et ont fait de nombreuses erreurs. Ce serait un contre-sens de mettre celles-ci sur le compte de l’auteur du Capital. Il est évident, pour toute personne qui a lu les écrits de K. Marx, que celui-ci aurait critiqué la politique qui a été conduite en URSS en son nom, ce qui n’est pas le moindre des paradoxes. Mais ce débat nous entraînerait trop loin ici.
3 - Le concept de lutte des classes, K. Marx historien :
Pour avancer dans le débat scientifique, il est tout d’abord important de se libérer des lieux communs, de ces représentations sociales que P. Bourdieu qualifiait de « sociologie spontanée » et de « langage commun »8 . Une fois les théories de K. Marx libérées des préjugés idéalistes, il devient possible d’en cerner à la fois les forces, étayées dans le dossier et le hors série d’Alternatives Économiques, mais aussi certaines contradictions.
K. Marx a développé le concept de lutte de classes en analysant les intérêts communs qui conduisaient les personnes exerçant les mêmes activités sociales à s’unir pour transformer les formes de l’organisation politique, ou du moins pour établir des rapports de force afin de faire reconnaître leurs intérêts. Ainsi que nous l’avons évoqué dans la citation au paragraphe précédent, pour lui, ce sont les conditions de vie et de production qui influencent les représentations des acteurs. Il a développé son concept dans une société fortement polarisée, avec une forte migration des campagnes vers les industries qui avaient besoin d’une importante main d’œuvre. Mais avec le développement de la division du travail dans les sociétés modernes, la société s’est complexifiée.
Cela permet de revenir sur un argument mis en valeur par la discussion entre R. Boyer et J.M. Daniel, à savoir l’adaptation du capitalisme aux différentes crises. Les crises se multiplient, voire s’amplifient, mais les dirigeants politiques et financiers inventent de nouvelles formes de régulation. K. Marx a ainsi sous estimé leur capacité d’adaptation. Avec l’arrivée des travaillistes et des sociaux-démocrates au pouvoir à partir de 1945, des compromis se sont mis en place entre les élites politiques et les élites économiques. Cette évolution de la société moderne a-t-elle pour autant remis en cause la notion de lutte des classes ? Tout mouvement dialectique conduit à produire une synthèse : K. Marx envisageait celle-ci sous forme de dilution des classes au fur et à mesure de l’avancée dans la société socialiste. Dans les faits, on a assisté plutôt à une institutionnalisation des rapports de force entre les parties en présence, une société de plus en plus complexe où des mouvements sociaux se structurent, puis sont intégrés dans le jeu institutionnel : politique contractuelle avec les syndicats à partir de 1945, mouvements d’éducation populaire dans les années 60, mouvements écologistes dans les années 90, mouvements d’aide au tiers monde..., mais aussi de nombreuses associations lobbyistes : handicapés, sport, culture, etc. Chaque mouvement cherche ainsi à se faire reconnaître par les institutions, à négocier sa position dans la société. La lutte des classes n’a plus, du moins dans l’univers républicain et social-démocrate de l’Europe actuelle, le caractère frontiste du 19ème siècle où la classe ouvrière était de plus en plus nombreuse et fortement exploitée. Le pourcentage des classes moyennes n’a cessé de croître en raison de cet essor des institutions intermédiaires9.
La société capitaliste a su s’adapter en développant des institutions intermédiaires qui diluent les rapports de force, mais aussi, en même temps, le pouvoir politique, de plus en plus partagé avec les classes moyennes. Mais cet équilibre entre le modèle capitaliste et le modèle social-démocrate a ses limites : le système d’intégration des mouvements sociaux ne peut pas croître indéfiniment. Les enjeux autour des prélèvements obligatoires, de la pression fiscale ou de la croissance du PIB, illustrent bien la façon dont s’expriment aujourd’hui ces rapports de force entre les classes sociales. Et en période de récession, l’intégration de nouveaux mouvements revendicatifs s’avère de plus en plus difficile. Une part croissante de la population se trouve marginalisée par le système : chômage, sous-emploi, précarité, etc.
L’évolution du 20ème siècle est donc loin d’avoir remis en question les postulats matérialistes de K. Marx (au sens défini ci-dessus d’une interaction entre pratique et théorie et d’une analyse des contraintes sociales), mais elle conduit aujourd’hui à des analyses de plus en plus complexes des phénomènes de lutte sociale. En revanche, elle a remis en cause ses conceptions prométhéennes héritées du 19ème siècle : la lutte de classe n’a pas conduit pas à l’abolition du capitalisme, ni à une société socialiste ou communiste où les classes seraient abolies.
Pour analyser ces phénomènes d’institutionnalisation, une analyse strictement économique apparaît insuffisante. La sociologie s’est construite au 20ème siècle, au fur et à mesure que nos sociétés se démocratisaient… et s’institutionnalisaient. Les différentes approches des sociologues (sociologie fonctionnaliste, sociologie de la reproduction, sociologie institutionnelle, mais aussi ethnographie, interactionnisme, ethnométhodologie, etc.) ont mis en valeur que l’économie n’est pas le seul ressort des sociétés : les jeux de représentation sociale reposent sur des facteurs d’identité et de reconnaissance, qui sont essentiels dans la constitution des groupes sociaux, et dans la vie des institutions. Cela confirme-t-il la préconisation de J.M Daniel, à savoir que ces questions de pouvoir politique et d’institutionnalisation ne concernent pas l’économie, mais une autre discipline, où les théories de K. Marx auraient plus leur place ?
4 - Le fait social : K. Marx précurseur de la sociologie ?
L’objectif n’est pas ici d’étudier l’influence des théories de K. Marx sur la sociologie. Cette influence est revendiquée par certains courants de pensée, comme la sociologie de la reproduction de P. Bourdieu. On peut aussi certainement formuler l’hypothèse d’une influence non négligeable sur les fondateurs de sociologie, en particulier M. Weber, qui a fréquenté les milieux socialistes avant de s’en distancier et de développer sa propre approche sociologique et ses observations sur la bureaucratie. Mais l’objet est plutôt ici d’identifier la construction du « fait social ». K. Marx a participé au 19ème siècle à cette évolution par sa rupture avec l’idéalisme des philosophes. Dans l’idéologie allemande et les thèses sur Feuerbach, il écrit par exemple : « Le principal défaut, jusqu'ici, du matérialisme de tous les philosophes (...) est que l'objet, la réalité, le monde sensible n'y sont saisis que sous la forme d'objet ou d'intuition, mais non en tant qu'activité humaine concrète, en tant que pratique (…) La question de savoir s'il y a lieu de reconnaître à la pensée humaine une vérité objective n'est pas une question théorique, mais une question pratique. C'est dans la pratique qu'il faut que l'homme prouve la vérité, c'est-à-dire la réalité et la puissance de sa pensée, dans ce monde et pour notre temps. La discussion sur la réalité ou l'irréalité d'une pensée qui s'isole de la pratique, est purement scolastique » (Thèses 1 et 2 sur Feuerbach). A ce titre, il faut reconnaître que la pensée de K. Marx a su conquérir au 20ème siècle de la notoriété et devenir une référence. Quand des théories parviennent ainsi à s’imposer à une frange conséquente de la société civile, cela ne nous invite-t-il pas, en tant que scientifiques, à en chercher les raisons ?
Une pensée ne perdure socialement que si elle accompagne de nouveaux modes de communication sociale qui se développent et s’instituent. Les conceptions qui accompagnent cette institutionnalisation font alors office de référence pour le milieu social qui s’est ainsi construit. Sur ce point, les théories de K. Marx ont réellement envahi un champ très conséquent, au niveau politique, au niveau syndical, mais aussi au niveau scientifique. Certes, avec l’évolution de la recherche, ces théories apparaissent aujourd’hui insuffisantes. Mais cela veut-il dire que la connaissance de cette théorie soit devenue inutile ?
Quand un corps professionnel se forme, il se développe, au sein de celui-ci, des modes de relation qui s’expriment sous forme de façons de faire, de façons de parler, de codes de communication, etc. Ces modes de relation sociale se structurent sous forme d’habitudes collectives, qui perdurent dans le temps : ils s’instituent. La notion d’ « habitudes collectives » a été introduite par E. Durkheim10, elle a été approfondie par P. Bourdieu à travers son concept d’« habitus » (repris à E. Panofsky)11. La notion de « mode » relationnel a aussi été abordée, d’une autre façon, à partir du concept de « rôle » et de « représentation sociale », par la sociologie interactionniste (E. Goffman12). Ces modes de communication sont ensuite reproduits par mimétisme, apprentissage ou sélection : je les ai nommés « référentiels implicites ». La sélection et la formation professionnelles ont ainsi une fonction dans la reproduction des institutions, elles sont un moyen de s’assurer que les habitudes collectives de travail seront bien intégrées par les futurs travailleurs du milieu professionnel (C. Bélisson13). Il se forme ainsi des cultures d’institution (J. Lagroye ; M. Offerlé14). Les travaux des sciences politiques ont mis en valeur l’importance de ces référentiels dans la construction des politiques publiques (P. Muller15). Ces institutions, imbriquées les unes dans les autres, constituent l’organisation sociale.
A partir du moment où ils ne sont pas éphémères, les mouvements sociaux s’organisent. Soit ils entrent en conflit avec les pouvoirs en place, soit ils sont intégrés aux institutions existantes : c’est le cas, par exemple, des syndicats, combattus dans un premier temps, au 19ème siècle et la première moitié du 20ème, puis intégrés à travers les politiques contractuelles à partir de 1945. On pourrait aussi évoquer les mouvements d’éducation populaire en France, qui deviendront partie prenante de la politique publique de l’état à partir du haut commissariat de la jeunesse et des sports (C. Bélisson). Quand ils sont intégrés, les modes de relation qu’ils ont mis en place en leur sein s’instituent, ainsi que les modes de relation avec les autres partenaires : conventions sociales ou collectives, jeux de représentation, etc. Ainsi se développe le système institutionnel des sociétés modernes. Et les théories qui ont accompagné la formation de ces modes d’organisation donnent du sens à leur fonctionnement.
Mais l’objectif n’est pas, ici, d’approfondir la connaissance de ces sujets sociologiques, le lecteur peut se reporter aux auteurs cités. La question est de savoir si l’étude de ces phénomènes a un intérêt ou non pour l’économie.
5 – L’analyse du Capital : Marx économiste ?
Pour analyser le sens d’une théorie, il est important d’identifier le positionnement de son auteur, y compris lorsqu’il s’agit d’une théorie scientifique. Ainsi P. Bourdieu invite-t-il les sociologues à avoir une réflexivité sur leur propre positionnement scientifique16. Toute théorie est à replacer dans son contexte, par rapport aux finalités sociales qui l’ont vu éclore.
Lorsque K. Marx développe son analyse économique dans Le Capital, il part d’un postulat qu’il emprunte à Ricardo, c’est à dire il analyse la valeur d’une marchandise à partir du temps de travail pour la produire, un postulat qui a d’ailleurs été combattu par J.M. Keynes17. Il introduit ainsi une rapport entre la valeur d’usage et la valeur d’échange. L’objectif était clairement formulé : inviter les ouvriers, extrêmement exploités au 19ème siècle, à négocier la valeur d’échange de leur travail, au moins en rapport avec leurs besoins fondamentaux (l’hébergement, la nourriture, mais aussi la culture et le loisir), ce que nous appelons aujourd’hui les négociations salariales. Est-il possible, aujourd’hui, de nier l’influence des négociations salariales dans la façon dont se structurent les économies modernes ? Les économistes libéraux n’ont-ils pas tendance à sous estimer les coûts sociaux induits par l’influence du facteur humain dans la gestion des affaires économiques, que ce soit en termes de coûts de santé, de démobilisation au travail ou de conflits sociaux. Il ne s’agit pas ici de prendre parti par rapport à ces conflits sociaux, mais seulement de savoir si les sciences économiques peuvent faire abstraction de ces problématiques… en les renvoyant vers d’autres sciences ? Cet objet de recherche et ces postulats méritent-ils d’être un sujet valable pour les recherches en économie ? Par exemple, le poids de la pression des loyers dans les grandes villes sur les populations en fonction de leurs revenus ; ou celui de l’augmentation du prix de l’essence dans les campagnes. Bref le rapport entre la valeur d’usage et la valeur d’échange dans un système donné.
Certes, K. Marx a fait des erreurs. Mais la première chose que m’ont appris mes professeurs à l’université, c’est qu’une théorie scientifique, qui s’appuie sur l'observation de phénomènes et leur mise en système par la théorie, est toujours critiquable. Une théorie qui n’est pas critiquable est peut-être une idéologie, une religion, une idée politique, mais ce n’est pas une science. Si R. Boyer analyse l’erreur commise par K. Marx « de faire une généralité des crises qu’il observait dans la phase historique du capitalisme dans laquelle il vivait » et d’ « extrapoler sur la longue période ce qu’il a sous les yeux », « erreur assez excusable, car les théories économiques sont filles de l’histoire et non l’inverse », J.M Daniel rebondit et traduit cela différemment : « (K. Marx) théorise un effondrement mécanique qui correspond plus à ses souhaits militants qu’à une analyse profonde ». En fait, ce qui fait le propre du caractère scientifique d’une théorie, le fait d’être critiquable, J.M Daniel l’analyse comme un excès de militantisme. Mais la même critique ne pourrait-elle être appliquée à tous les économistes qui n’ont pas anticipé la crise de 2008, convaincus que le capitalisme s’autorégulerait ?
Certes, la pensée du 19ème siècle était encore très empreinte de positivisme et, de ce fait, de déterminisme. Mais ce parti-pris exclut-il la qualité des recherches effectuées par K. Marx ? Faut-il exclure du monde scientifique un chercheur, à partir du moment où il n’a pas le même paradigme d’analyse (postulats, objets de recherche, méthodes, etc.) ? Dans toute science sociale et humaine, le chercheur adopte une posture relative qui consiste à ne voir qu’une partie de la réalité en fonction de sa position subjective dans le système qu'il étudie. Ainsi que le faisait remarquer T.S. Kuhn dans sa structure des révolutions scientifiques, le chercheur est toujours obligé de cerner son objet d’étude pour en approfondir la connaissance. Aucune recherche n’embrasse la réalité complexe dans sa totalité. Ceci vaut pour K. Marx, certes, mais aussi pour nos économistes néolibéraux. Chaque courant de pensée n’englobe qu’une partie de la réalité, jamais la totalité complexe de celle-ci.
Pour expliciter ce point de vue, je propose d’analyser l’argumentaire d’un ouvrage de J.M Daniel aux éditions PUF : la politique économique. Il s’agit d’un petit ouvrage d’initiation, bien structuré pour découvrir cette discipline. Celui-ci aborde les questions de façon très générale, assez précise et suffisamment argumentée pour étayer mes remarques. Quand il définit et caractérise les acteurs, J.M. Daniel nous en présente cinq : les producteurs, les consommateurs, l’état, la banque centrale et le monde extérieur ou « reste du monde ». Le nombre d’acteurs est déterminé par le système théorique que l’auteur construit pour analyser certains phénomènes socio-économiques. Pour étudier de nouveaux phénomènes, ne serait-il pas intéressant d’ajouter un sixième type d’acteurs, par exemple le monde de la finance : IFM (institutions monétaires financières), OPCVM (organismes de placement collectif en valeurs mobilières), fonds de pensions, etc. ? Certes, les acteurs de la finance peuvent être définis comme des producteurs de monnaie, mais leur place spécifique dans le système ne mérite-t-elle pas d’être un peu plus discutée ? Dans tous les cas, nous voyons bien qu’il s’agit d’un choix. Toute mise en forme d’un système par la théorie adopte un parti-pris, qui cerne de fait l’ensemble des phénomènes qui seront étudiés et ceux qui seront laissés de côté.
Par ailleurs, un certain nombre d’équations nous sont proposées par l’auteur, en particulier une qui est mise en valeur par J.M. Keynes dans sa théorie générale : S (épargne) = I (investissement). « Dans l’économie, il y a égalité entre l’épargne et l’investissement. Cette égalité est un des résultats fondamentaux de l’économie »18 nous dit J.M. Daniel. Dans un premier temps, il est important de s’interroger s’il s’agit de résultats empiriques, observés en étudiant les faits, ou d’un postulat, c’est à dire d’une évidence mise en valeur par la construction du système. Voyons comment les choses nous sont présentées par J.M Keynes : « Si on admet que le revenu est égal à la valeur de la production courante, que l’investissement est égal à la partie de la production courante qui n’est pas consommée et que l’épargne est égal à l’excès du revenu sur la consommation, toutes choses conformes à la fois au bon sens et à l’usage traditionnel de la grande majorité des économistes, l’égalité de l’épargne en découle nécessairement. En résumé : Revenu = valeur de la production = consommation + investissement ; Épargne = revenu – consommation ; donc Épargne = investissement »19
Il s’agit donc bien d’un postulat déterminé par le raisonnement, et non du résultat de travaux scientifiques empiriques. Certes, certains postulats sont parfois construits à partir de travaux plus anciens, mais cela ne semble pas le cas dans cette démonstration. Et un postulat peut toujours être interrogé.
Effectivement, de nos jours, une portion de plus en plus conséquente de l’épargne ne rejoint pas les circuits de la production et de la consommation, mais directement ceux des opérations financières. L’épargne s’investit dans des titres monnayables pour produire de la monnaie (Titres de Créance Négociables, Titres d’OPCVM = M3-M2). Or un processus qui crée de la monnaie qui n'est pas réinvestie dans les circuits de la production et de la consommation, n’est-il pas intrinsèquement inflationniste ? Certes, l’achat de ces titres provient de la part des revenus non consommés, cela est bien expliqué par J.M. Keynes : « Ainsi, bien que le montant de l’épargne résulte du comportement collectifs des consommateurs individuels et le montant de l’investissement du comportement collectif des entrepreneurs individuels, ces deux montants sont nécessairement égaux puisque chacun d’eux est égal à l’excès du revenu sur la consommation »20. Mais le drainage de ces revenus non consommés et épargnés (M2-M1) vers ces nouveaux titres (M3-M2) conduit à réduire la masse monétaire réinvestie dans les circuits classiques de production et de consommation, du moins dans ceux qui sont utilisés par les particuliers et les petites et moyennes entreprises. En ce qui concerne les grandes entreprises multinationales et les acteurs de la finance (IFM, OPCVM), les sommes investies sur le marché primaire des capitaux est réinvestie dans la production (actions, billets de trésorerie) ou dans la consommation (obligations émises par les états), ce qui respecte la règle de Keynes. Mais lorsque ces titres sont échangés sur le marché secondaire, ne produisent-ils pas de la monnaie à partir de ces échanges de monnaie (spéculation) ? L'augmentation spéculative de la valeur de ces titres induite uniquement par ces échanges ne créée-t-elle pas artificiellement un accroissement de la monnaie (M3-M2), en raison de l'utilisation de ces titres comme valeurs d'échange à la place des monnaies émises par les banques centrales (cf. rôle des chambres de compensation entre banques). Cela réduit d'autant la capacité d'action des banques centrales, dont la création de monnaies n'est plus sollicitée, et les crédits accordés aux petites et moyennes entreprises puisqu'une quantité de revenu épargnée est attirée vers ces titres. Pour éviter qu’il y ait déflation dans le système de production (en raison de la réduction des crédits à la production) et dans celui de la consommation (argent drainé vers la capitalisation spéculative), les banques centrales ne sont-elles pas obligées de produire plus de monnaie, au-delà de l'équilibre budgétaire, par conséquent de maintenir un taux d'inflation ? Aujourd’hui, le taux d’inflation de 1 à 2 %, nécessaire à la stabilité monétaire, est expliqué par « l’évolution technologique qui améliore en permanence la qualité des biens et services »21. C’est une hypothèse crédible, dans la mesure où les innovations augmentent la sollicitation qualitative de la demande ; mais les prix de ces produits baissent aussi rapidement dans les années qui succèdent leur mise sur les marchés. Ne faut-il pas dès lors s’interroger sur d’autres explications possibles, du moins complémentaires, par exemple l’influence des pratiques spéculatives sur la masse monétaire ? Dans ce cas, le postulat du paradigme deviendrait E = I + Sp (Sp = spéculation).
Mais pour analyser cette seconde hypothèse, il nous faut introduire un nouveau type d’acteurs dans les modèles économiques : le monde de la finance. L’objectif n’est pas ici d’approfondir cette hypothèse qui ne peut être vérifiée que par une recherche conséquente, mais seulement de montrer le lien entre les postulats et les phénomènes étudiés, ainsi que l’inévitable réduction de l'étude objective (cerner l'objet de recherche) dans tout domaine scientifique.
En admettant que cette seconde hypothèse soit vérifiée par les données de l’expérience, remettrait-elle en cause le postulat de J.M. Keynes E = I ?
1° A l’époque où celui-ci l’a émis, ce phénomène spéculatif avait un effet très marginal ; avec la libération des marchés dans les années 80, les émissions de titres, obligations et actions sur les marchés internationaux se sont envolées (multipliées par 40 en ce qui concerne les obligations internationales et par 25 pour les encours bancaires internationaux). L’évolution de la société conduit ainsi à une revalorisation des théories.
2° Ce phénomène reste faible par rapport à la masse monétaire échangé au niveau de l’économie mondiale, y compris à l’heure actuelle, et pour étudier certains phénomènes macro-économiques, il peut certainement être négligé. Dans ce cas, le postulat E=I reste « globalement valable ». Mais si on veut étudier ces phénomènes marginaux de spéculation, soit pour analyser les politiques monétaires22, soit pour analyser leur effet au moment où la production et la consommation ralentissent, il devient important de l’interroger.
Ainsi, quand le gouvernement actuel de la France s’appuie sur ce postulat des libéraux pour réduire les impôts du décile supérieur afin qu'il réinvestisse dans la production (théorie du ruissellement), au détriment d’une relance plus globale par une réforme fiscale ou par une politique d’emploi, favorise-t-il la relance économique ou la spéculation avec une nouvelle flambée boursière, et potentiellement les risques d’une nouvelle bulle financière ? Ainsi que le faisait remarquer J.M. Keynes, si le milieu de la production n’envisage pas une croissance de la consommation, il y a peu de chance que cette épargne soit transformée en investissement productif : « un accroissement d’épargne et de capital ne peut être efficace que si un accroissement de la consommation se produit dans la période consécutive »23. Un accroissement de l’épargne sans ces perspectives se tourne alors vers des placements plus lucratifs, ce que l’on peut traduire par une préférence pour la liquidité, mais une liquidité moderne qui prend la forme d’achats de titres et de spéculation sur les marchés internationaux.
En résumé, en quoi J.M. Keynes ou les monétaristes seraient-ils exonérés des mêmes imperfections dans leurs postulats, qui fondent leurs méthodes et leurs domaines de recherche (ce que l’épistémologie appelle des paradigmes), que les travaux de K. Marx ? Bien entendu, ces derniers sont à replacer dans leur contexte et à libérer d’une vulgate bolchevique dogmatique, qui a évincé toute discussion avec les autres théories économiques, au nom d’une Cause bien discutable.
5 – Conclusion : la fonction des différents paradigmes dans une discipline scientifique :
Cette guerre des paradigmes existe aussi dans les autres sciences : entre les cognitivistes et les psychanalystes en psychologie, entre la microsociologie et la macrosociologie, entre les grammairiens et les pragmatiques en linguistique (par exemple, N. Chomsky et D. Hymes). Toutes les sciences ont connu une phase d’institutionnalisation (classique), une phase plus critique (scepticisme, dialectique), une phase plus globalisante au cours de laquelle des théories générales se sont formées (structuralisme, systémique), et une phase de retour vers les fondamentaux, que l’on peut qualifier de néo-classique (par exemple, la grammaire générative en linguistique ou la psychologie cognitive). Les sciences économiques, sur ce plan, n’ont pas été épargnées par cette évolution, qui est certainement induite par une dynamique fondamentale qui mériterait d’être approfondie par les recherches épistémologiques. Certes, K. Marx n’est pas le seul économiste de la période critique : par exemple, J.M. Daniel nous cite L. Walras. Il n’en demeure pas moins qu’il a marqué la construction de la pensée économique pendant cette période, en positif (par l’introduction de nouveaux raisonnements) ou en négatif (par la construction de sa pensée critique en opposition aux classiques). Une science se construit dans le débat, et si les bolchéviks ne l’ont pas compris, faut-il pour autant que les scientifiques l’ignorent ? Mais peut être l’économie est-elle tellement imbriquée dans la politique, ce qu’illustre la flambée de think-tanks ces dernières décennies, que la « rupture avec le sens commun » est bien plus difficile que dans les autres sciences.
1 C . Bélisson (2017) Évaluation, formation et systèmes de référence implicites. Un référentiel, pour quoi faire ? Paris : L’Harmattan
2 Un référentiel, pour quoi faire – Études sur les systèmes de référence implicites dans les milieux professionnels – sous la direction de J. Houssaye – Université de Rouen
3 E. Durkheim (1905/1938). L’évolution pédagogique en France. Paris : PUF.
4 Sous la direction d’A. Grjebine (1986) Théories de la crise et politiques économiques. Paris : Seuil. Page 103.
5 K. Marx - L’idéologie allemande (traduction de 1952 – version numérique mise en ligne par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie) - Ed. "Les classiques des sciences sociales" - Site web : http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/index.html
6 G.W.F. Hegel (1916-1927) - Leçons sur l’histoire de la philosophie. Paris : Gallimard (version de 1954)
7 « modal » parce qu’il détermine les autres verbes = devoir être, devoir faire, etc., en introduisant ainsi un mode.
8 P. Bourdieu, JC. Chamboredon, JC. Passeron (1968) Le métier de sociologue. La Haye : Mouton. (Version de 1983 : pages 17, 37 et 46)
9 La modernisation de l’appareil de production a aussi joué un rôle dans le développement des classes moyennes, mais ce n’est pas le but ici d’approfondir cette question.
10 E. Durkheim (1930/2007) De la division du travail. Paris : PUF – Quadrige.
(1937/1983) Les règles de la méthode sociologique. Paris : PUF – Quadrige.
11 P. Bourdieu, JC. Chamboredon, JC. Passeron (1968) Le métier de sociologue. La Haye : Mouton
12 E. Goffman (1973) Mise en scène de la vie quotidienne – Tome 1 – La présentation de soi. Paris : Minuit.
(1974) Les rites d’interaction. Paris : Minuit.
(1974 / 1991) Les cadres de l’expérience. Paris : Minuit.
(1981 / 1988) Façon de parler. Paris : Minuit.
13 op. déjà cité en introduction
14 J. Lagroye, M. Offerlé (2010) Sociologie de l'institution. Paris : Belin.
15 P. Muller (1990/2003) Les politiques publiques. Paris : PUF
16 P. Bourdieu (2001). Science de la science et réflexivité. Paris : raison d’agir.
17 J.M. Keynes (1936). Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie. Paris : Payot. (version de 2017) pages 83, 447 et 448
18 J.M. Daniel (2008) La politique économique. Paris : PUF. (Version de 2012) page 18.
19 J. M. Keynes ; op. cité : pages 116 et 117.
20 Idem : page 116
21 D. Plihon (2000). La monnaie et ses mécanismes. Paris : La découverte. (Version de 2013) page 108.
22 D. Plihon ; op. cité
23 J. M. Keynes ; op. cité : page 463