Chacune de ces adaptations s’est confrontée aux deux mêmes défis cinématographiques. L’un résultait du roman lui-même : comment rendre par l’image, le procédé tout textuel d’un récit conduit à la première personne, tel qu’il ouvrait au rapport si particulier que Meursault entretient avec le monde extérieur et avec sa propre existence ? L’autre tenait au souci de chacun des réalisateurs d’inscrire dans son film la distance historique du regard qu’il portait sur un drame qui, en deçà de sa portée universaliste, est tout ancré dans la géographie et la société de l’Alger coloniale des années 1930-1940.
On le sait, Visconti ne fut pas autorisé par Francine Camus à transposer l’action dans les circonstances encore toutes proches de la guerre d’indépendance – et il n’est pas sûr qu’il y ait lieu de le regretter tant ce déplacement chronologique vers une situation d’affrontement armé ouvert aurait pu fausser la relation que le roman faisait de la déshumanisation et de la violence des relations interethniques dans l’ordinaire de la vie coloniale. Dans la foulée immédiate de la co-production algéro-italienne de La Bataille d’Alger de Gillo Pontecorvo, il fut en revanche en mesure de tourner la plupart des scènes du film sur les lieux mêmes du roman[1], notamment le port d’Alger, le faubourg de Belcourt (aujourd’hui Belouizdad) ou le Palais de Justice d’alors.
Pour sa part Ozon a tenu à multiplier les moyens lui semblant propres à interroger ce drame du point de vue des préoccupations nées au cours d’un période longue désormais de plus d’un demi-siècle qui suit les décolonisations. À la différence de son prédécesseur italien peu après l’Indépendance, il n’a pas pu réaliser la prise de vue sur place et le tournage des scènes d’extérieur a été délocalisé à Tanger.
Agrandissement : Illustration 1
Du texte à l’image, les forces d’un parti pris.
Outre l’attrait de son affiche, l’honorable succès en salles du film[2] et sa réception critique plutôt favorable tiennent sans nul doute aux qualités cinématographiques qu’un réalisateur éprouvé a su y réunir.
L’essentiel a déjà été dit sur un usage du noir et blanc qui, tout en ramenant à l’époque du roman, sait exprimer tour à tour l’incandescence solaire du ciel algérois, la sensualité des corps et des visages, la pénombre sordide de l’immeuble de Meursault, la noirceur de l’enfermement carcéral ou l’agitation grandiloquente du procès.
La force du récit doit autant à la justesse d’incarnation qu’a autorisée le choix des interprètes. Dans le rôle de Meursault, l’alerte silhouette et le visage épuré de Benjamin Voisin (28 ans : l’âge où Camus termina le roman…) donnent une image plus crédible que la maturité un peu alourdie de Mastroianni (42 ans lors du tournage), de ce jeune Algérois, adonné à la seule vie du corps et aussi réticent aux illusions du sentiment qu’aux mensonges de la vie sociale ou aux faux secours de la foi. Ce choix s’assortit d’un même rajeunissement du personnage du souteneur Raymond, confié à Pierre Lottin (36 ans) y prenant la suite de Georges Géret, et d’avoir retenu, pour celui de l’aumônier, Swann Arlaud, acteur d’une apparence plus vulnérable que le massif Bruno Cremer, ou pour la victime du meurtre, Abderrahmane Dehkani, comédien d’un âge semblant proche de celui de Voisin.
Relevant le défi de succéder à Anna Karina, Rebecca Marder traduit à sa manière toute la grâce et l’émotive spontanéité de Marie, tandis que Hajar Bouzaouit confère à la sœur de « l’Arabe » que tuera Meursault, sa vigoureuse présence physique et dramatique[3]. Ozon a en outre voulu donner à l’un et l’autre de ces personnages de femmes un rôle plus actif que celui que leur impartissait le roman. Pour Marie, divers ajouts assez bien venus la font porteuse de ces appels à la conscience qui semblent faire défaut à son compagnon : tour à tour, elle invite celui-ci à « faire quelque chose » pour arrêter la scène violente entre Raymond et sa compagne ; tente de le retenir alors que, sur la plage, il repartait derrière Raymond à la recherche des « Arabes » ; lui adresse dans sa prison une lettre (lue en voix off) où elle l’interpelle encore : « Pourquoi tu as tué cet homme ? Pourquoi avoir brisé ce bonheur qui nous attendait ? » ; prend enfin l’initiative, lors d’un intervalle du procès, de s’adresser à la sœur de la victime (nous y reviendrons).
Si dans le déroulé du drame certaines ellipses s’expliquent sans doute par des besoins du rythme filmique[4], plusieurs ajouts apparaissent superflus, comme la cérémonie funéraire à l’église qui n’apprend rien de plus que la veillée à l’hospice sur l’incapacité de Meursault à se plier aux usages ordinaires, ou que l’entrevue avec Marie dans le brouhaha du parloir se prolonge par un récit détaillé du fait-divers que le détenu avait pu lire dans sa cellule[5]. On s’étonne aussi que le réalisateur n’ait pas exploité le potentiel symbolique et cinématographique d’autres éléments comme le présage mortifère que figure la gestuelle maniaque de cette « femme mécanique » que Meursault observe lors de ses déjeuners ; ou le jeu des regards que celui-ci échange au cours du procès avec un journaliste aux « yeux très clairs » (lui-même si proche du chroniqueur judiciaire que Camus fut à Alger républicain…) qui lui laisse « l’impression bizarre d’être regardé par [lu]i-même ». On regrettera surtout qu’Ozon n’ait pas perçu la portée que revêtent, lors des rencontres sur la plage avec les « Arabes », l’élégiaque air de flûte que l’un des deux indigènes joue à son compagnon auprès de la source et qu’il poursuit paisiblement, sans trahir ni crainte ni velléité de riposte, alors même que Raymond s’apprête à sortir son arme[6] ou la connotation de virilité prolétarienne s’attachant à ce que ces mêmes « Arabes » aient conservé leurs « bleus de chauffe »[7].
Pour l’ensemble, trois puissants partis-pris de réalisation concourent cependant à l’efficacité dramatique de l’écriture.
Ayant choisi de confier l’essentiel du récit à un classique narrateur cinématographique « omniscient », le réalisateur exploite largement les indications visuelles et les dialogues rapportés par Meursault ; il a su cependant trouver pour équivalent à ce que le texte laissait percevoir du singulier flux intérieur de conscience propre à celui-ci, en obtenant de l’interprète un jeu, ou plutôt un « non-jeu », qui s’écarte du vérisme usuel du travail d’acteur. Une sorte d’absence à la Bresson semble le plus souvent suspendre chez Voisin toute forme manifeste d’émotion, pour ne laisser poindre sur sa face immobile que les infimes signes d’ennui, de surprise ou d’hésitation qu’y impriment brièvement le questionnement sentimental de Marie, les sollicitations louches de Raymond ou les interrogatoires des magistrats. Par un procédé minimaliste comparable, l’étonnement ou la déception que suscitent chez Marie les dérobades de son compagnon vident subitement son visage de toute la vivacité qui l’anime ordinairement, pour n’y susciter qu’une minuscule grimace ou un sourire contraint.
En rupture avec la trame d’ensemble d’un film tourné en mode direct, Ozon a souhaité en outre laisser entendre en voix off l’exceptionnel lyrisme et la profondeur métaphysique du monologue que Camus prête à son anti-héros. En chacun de ces deux sommets dramatiques qu’atteint le récit, avec l’accomplissement du meurtre, puis lors de la dernière nuit du condamné, il exploite la force émotive de ce matériau verbal en assumant ouvertement l’hétérogénéité qu’il introduit dans le flux cinématographique. Pour le premier épisode, le mouvement s’immobilise, une fois la dernière balle tirée, sur le visage soudain flouté du meurtrier puis le récit parlé qu’il fait de son geste remonte jusqu’à ce moment que le film vient de donner à voir : « C’est alors que tout a vacillé… », tandis qu’ un zoom arrière montre, en contre-champ, la silhouette de Meursault, de dos, dominant sa victime effondrée au sol ; son récit se poursuit encore pour se conclure sur cette célèbre chute : « Et c’était comme quatre coups brefs que je frappais sur la porte du malheur. »
De même, ouvert sur un symbolique appel de muezzin[8], le bouleversant monologue final débute en voix off : « Pour la première fois depuis bien longtemps, j’ai pensé à maman… » La nuit de la cellule et le visage apaisé du détenu laissent alors place au souvenir ensoleillé de l’hospice de Marengo puis à l’évocation du corps nu de Marie, allongée sur une plage et qui redresse la tête dans un sourire attristé vers la caméra ; puis celle-ci en revient à Meursault couché sur sa paillasse jusqu’à ce que tombent ses derniers mots appelant sur lui « les cris de haine » des futurs spectateurs à son exécution…
Ces deux hautes séquences jalonnent et referment un arc dramatique audacieusement ouvert par le réalisateur en renonçant d’emblée, comme Visconti l’avait également fait, à donner forme filmique au très attendu incipit « Aujourd’hui, maman est morte… ». En une même vive anticipation de la seconde partie du drame, le récit débute en effet dans chacune des deux adaptations sur l’image de Meursault conduit, pour l’Italien, parmi la foule d’un couloir du Palais de Justice, vers le cabinet du juge d’instruction[9] ; pour le Français, jusqu’à une cellule collective où il sera le seul détenu européen.
Chez Ozon, cette scène, placée en pré-générique, s’ouvre dans un violent contre-jour qui détoure et fait vibrer la silhouette du prévenu encadré par ses deux gardes. Plusieurs brefs épisodes insérés au fil de la première partie du récit prolongeront sa découverte de la cellule collective : l’un où un jeune détenu indigène lui montre presque amicalement comment dérouler sa natte pour la nuit ; l’autre où il observe un rat qui traverse la cellule[10] ; puis un dernier qui renoue avec le fil chronologique de l’emprisonnement et du procès faisant l’objet de la seconde moitié du film. De même le motif du meurtrier tenu entre deux gendarmes, réapparaîtra par quatre fois au long de cette dernière partie : lors du transfert de Meursault en cellule individuelle ; pour son transport au tribunal ; dans une peu convaincante séance onirique « à la Dali », où le condamné chemine dans le désert au pied d’une colline portant, tel un Golgotha, la silhouette démesurée de la guillotine et du bourreau … ; enfin, lorsqu’il faudra l’arracher à sa querelle finale avec l’aumônier[11].
Avant ces rebonds, la scène d’ouverture choisie par Ozon se concluait cependant de manière abrupte sur la réponse que Meursault faisait à une question de l’un de ses codétenus[12] : « J’ai tué un Arabe. » Dans leur froide factualité, les premiers mots ainsi placés dans la bouche du prévenu avaient, à eux seuls, le pouvoir de plonger d’emblée le spectateur au cœur de ce drame, tout en l’invitant à interroger, pas à pas, l’énigme personnelle du comportement du meurtrier aussi bien que les coordonnées socio-historiques de son geste dans l’Algérie d’alors.
Il n’est cependant pas certain que l’insistance du réalisateur à surligner, de multiples autres manières, cette dernière dimension ait vraiment servi son dessein, cinématographique aussi bien que de critique de la société coloniale.
Entre géographie et histoire, les bévues du regard
Ozon a tenu à expliquer combien il jugeait « essentiel […] de contextualiser l’histoire » et de rendre perceptible que ce livre de Camus a été écrit et publié « en pleine colonisation française de l’Algérie[13] ». Une telle intention est des plus louables. À elle seule, elle se démarque de la tendance fréquente à minimiser cet ancrage socio-historique des fictions de l’écrivain pour s’en tenir à une lecture du récit de 1942 comme une pure « fable de l’Absurde ». Pour tout spectateur sans complaisance à l’égard du passé colonial, le souci de porter sur un tel récit un regard historiquement informé ne vaut cependant qu’à l’aune des modalités par lesquelles il trouve, selon les mots d’Ozon, à être « présent dans le film ».
À cet égard, l’indiscutable bonne volonté manifestée par le réalisateur semble avoir suffi pour que Christiane Chaulet Achour, d’habitude si attentive à débusquer « le poids de la colonie » dans les dits et non-dits camusiens, ait « dès les premières images », laissé « tomber sa garde », et crédité le film d’assez « accentuer sa contextualisation » pour éviter tout « effacement de cette Algérie coloniale[14] ». L’examen des moyens mis en œuvre à cet effet incite cependant à nuancer ce satisfecit.
Le « seul bémol » que cette spectatrice émet serait que « Tanger n’est pas Alger ». Et encore réduit-elle la portée de cette réserve en lui donnant un tour tout personnel – « parce que je suis algéroise… » – et en renvoyant, afin de mieux « restituer les lieux », aux « dessins particulièrement suggestifs » de l’adaptation du roman en BD par Jacques Ferrandez.
Mais tout retour critique sur l’Histoire commence par une juste appréhension de la géographie, physique, humaine, sociale, qui en constitue à la fois le lieu et l’enjeu. La première « contextualisation » de ce récit tout algérois aurait donc été de restituer d’une manière crédible le caractère si spécial qu’une conquête militaire et plus d’un siècle de colonisation de peuplement ont imprimé à cette cité. Il aurait donc été essentiel pour suggérer où et comment s’exerçait, en Algérie, la « cohabitation permanente, silencieuse et contrastée de deux “communautés” qui se côtoient sans se mêler », de ne pas négliger la spécificité du zonage urbain algérois et des formes diverses qu’y revêtent la séparation et les contacts interethniques.
Or, si le réalisateur a multiplié les ajouts scénographiques propres selon lui à historiciser la vision de l’Algérie coloniale, il a sans doute pensé avoir trouvé au Maroc assez d’éléments extérieurs tels qu’architectures « mauresques », palmiers, jardins méditerranéens, galeries à arcades, modernes édifices européens immaculés, qui évoquent de manière générique une ville coloniale dans le Maghreb des années 1930-1940. Il a pour autant usé de subterfuges numériques pour « algérianiser » quelque peu ces emprunts, telles cette frise d’immeubles du front-de-mer algérois servant de lointain arrière-plan à la plage où Meursault et Marie nouent leur liaison ; la restitution visuelle assez réussie du cinéma Majestic où ils se rendent ensuite ; ou les quelques façades 1860 accolées en fond du site marocain où se déroule leur dialogue sur leur éventuel mariage. Pour le reste, la mise en scène reste cependant indifférente au particularisme de l’urbanisme colonial algérien et de l’usage de l’espace public qu’il accueillait – particularisme dont le modèle initial tout haussmannien se distingue fortement de la manière dont, au Maroc, quelques décennies de protectorat à la Lyautey ont conjugué, d’une manière bien différente, bâti local ancien et modernisme Art Déco.
De telles remarques ne procèdent en rien d’un pointilleux vérisme architectural, mais interrogent la pénible impression de faux dépaysement exotisant qu’inspire au spectateur la représentation de plusieurs des sites du drame.
À commencer par Marengo (aujourd’hui Hadjout), où se situe la longue séquence de l’enterrement maternel : si, dans leur banalité, les bâtiments de l’hospice y sont d’un aspect vraisemblable, ce typique village de colonisation, avec sa rue centrale bordée d’arbres, et son église au clocher à la française, laisse place ici à un fragment de médina, où poterne précoloniale, bâtiments « arabes », personnages en burnous ne laissent pas place à autres Européens que les membres du cortège funéraire.
Aussi fantaisiste est l’évocation du quartier de Belcourt où vit Meursault. Certes, l’immeuble délabré où il voisine avec Raymond et le vieux Salamano n’y est pas sans crédibilité. Mais le numéro « 93 »[15] qui y est apposé et quelques panneaux « Rue de Lyon » ne suffisent guère à caractériser cette artère longue de plusieurs kilomètres, commerçante, parcourue par le va-et-vient des tramways, et où, le dimanche, se croisaient en foule supporters du Stade municipal, familles en promenade et spectateurs des cinémas… Tout cela se réduit ici à une encoignure de ruelles[16], n’accueillant que la terrasse d’un café, une épicerie-buvette et la boutique d’un chapelier[17].
Pas plus convaincante est la figuration proposée de ce que le roman désignait comme « l’établissement de bains du port » – en précisant même que Meursault y avait « plongé dans la passe ». Situé au pied direct de la Casbah et du front-de-mer, le lieu était assez mythique pour qu’une décennie plus tard, des artistes en rupture avec la peinture algérianiste se proclament la « génération du Môle ». Avec une grande justesse, Visconti avait fait de ce port, autour duquel rayonnent le site, la vie et l’économie de la ville, cet épicentre où le jeune homme, à la fois travaille, déjeune, se baigne ou engage une nouvelle liaison. Ozon n’en a retenu que la bouée circulaire où Meursault et Marie renouent connaissance, mais en la translatant dans d’insituables « Bains d’Alger » que rien ne rattache clairement ni à leur premier arrière-plan rocailleux, ni à la ville que l’on devine dans le lointain.
Si enfin l’austère architecture à coupole écrasée de la « Prison civile » où le meurtrier est incarcéré peut assez bien évoquer celle, sinistrement connue à Alger sous le nom de Barberousse, le « Palais de Justice » de fraîche allure 1930 et isolé de la rue dans un jardin, ne rend que bien mal compte de ce qu’était le véritable bâtiment en style Beaux-Arts où se situe le procès, en plein cœur des bruits de l’Alger européenne, tels qu’ils accompagnent l’accusé dans ces brefs retours en fourgon vers sa geôle de la Haute Casbah.
De telles approximations des réalités algéroises, associées à l’élégance même d’un noir et blanc à l’ancienne, expliquent que les déambulations de Meursault et de Marie dans la ville laissent souvent l’impression de ne parcourir avec eux qu’une pittoresque « Afrique du Nord » de studio, telle que, de Morocco à Casablanca, en passant par Pépé le Moko, s’y complaisait le cinéma des années 1930-40.
Ozon a par ailleurs introduit deux brèves répliques en arabe, celle du prisonnier d’âge mûr qui interpelle Meursault lors de son arrivée en prison (il s’agit donc de la toute première parole du drame)[18], celle de la visiteuse qui, à l’issue de la scène du parloir, invoque la protection divine sur les détenus[19] : leur dialecte est plausible, même si l’intonation n’en semble pas spécifiquement algéroise. Quant à la tenue plus ou moins européanisée qu’arborent nombre de figurants masculins[20], elle aurait pu s’assortir parfois du port du chèche[21] ou de la petite chéchia kalabouche de feutre rouge alors d’usage populaire à Alger, tandis que le haïk blanc des diverses passantes indigènes aurait été mieux identifiable si le voile de visage en avait été plus conforme au traditionnel aadjar brodé des femmes de la Casbah.
Au vu de ces à-peu-près, petits ou grands, de la contextualisation, les divers subterfuges censés actualiser le regard porté sur l’arrière-plan colonial du drame restent d’un effet souvent incertain.
Il s’agit d’abord de ces « premières images » qui, selon C. Chaulet Achour ont d’emblée désarmé son regard critique : des extraits sans doute d’une bande Gaumont qui, sur fond de ruelles de la Casbah et de terrasses de cafés, rue Michelet, célèbrent pompeusement l’« indissoluble mélange de la vie arabe et de la vie occidentale » qu’opérerait l’Algérie française. L’outrance du propos et la diction claironnante du commentateur illustrent bien cette propagande, à la fois arrogante et de courte vue, qui se déployait depuis le Centenaire de la conquête. Une telle « contextualisation » par la seule idéologie d’alors ne donne cependant guère accès à ce que le réalisateur, « en travaillant sur les documents, les archives », voulait faire ressortir des ressorts d’une société où « deux mondes vivaient côte à côte sans se voir, de manière parallèle, [et] n’avaient évidemment pas le même statut. » Mise en prologue au récit, elle émousse surtout le tranchant qu’aurait eu la séquence de l’aveu fait par le meurtrier devant ses codétenus indigènes, qui, placée en franche ouverture du film, aurait suffi à susciter, et de la manière la plus directe, le questionnement du spectateur sur ce qu’était la violence interethnique dans l’Algérie de ce temps.
Quant au choix d’écrire le titre du film d’abord en arabe[22], avant qu’un fondu-enchaîné n’en laisse apparaître le libellé français, il semble relever d’un geste un peu complaisant à l’adresse des spectateurs non-francophones et n’éclaire guère ce que questionne le drame : qui est ici l’étranger ? et étranger à qui ? ou à quoi ?
La notation se voulant dénonciatrice, consistant à apposer, à l’entrée du cinéma où se rendent Marie et Meursault, un panonceau « Établissement interdit aux indigènes. » semble par ailleurs outrée. Car, si l’Algérie coloniale connaissait bien une nette partition ethnique tant des habitats que de l’usage des espaces publics, celle-ci ne s’assortissait pas de prohibitions explicites et absolues, comparables à celles fondant la ségrégation américaine ou l’apartheid sud-africain[23]. Cette mention est de surcroît d’autant moins vraisemblable qu’elle s’applique au Majestic, la plus vaste des salles algéroises d’alors – laquelle, ne l’oublions pas, accueillit le 7 juin 1936 dans ses 5 000 places la tenue du premier meeting du Congrès musulmans algérien, à cette date le plus nombreux des rassemblements politiques indigènes en un lieu clos.
Ozon a par ailleurs tenu à redonner son identité à l’infortunée compagne de Raymond. Si ce choix ne le distingue pas de Visconti[24], il a été reçu comme s’il « gomm[ait] l’anonymat des “Autres” », et ce d’autant mieux, que le prénom retenu (« Djémila ») « a[vait] une consonance très forte pour les Algériens depuis la résistance au colonialisme français[25] ». Or cette restitution rétrospective d’un état-civil atténue plutôt, en en supprimant la manifestation verbale, « l’invisibilisation » des colonisés qu’elle voulait dénoncer. Et, en cela, elle édulcore la mise au jour brutale de l’ethnicisme en vigueur dans la société coloniale qu’opérait Camus dans la façon de parler qu’il prêtait à Meursault : alors même que ce dernier connaît forcément l’appellation de cette femme[26] puisqu’il a écrit la lettre de reproche que Raymond lui adresse, il persiste à la désigner génériquement, à la manière de nombre des Européens d’alors, comme « une Mauresque ».
Plus légitime était l’intention de prêter à ce même personnage féminin « une conscience et une parole dans le film » qui y « témoigne » à l’encontre de la domination coloniale. Encore fallait-il que le dialogue entre elle et Marie introduit, lors d’une suspension du procès, se garde de l’invraisemblance comme de l’anachronisme. La vive réplique que la dénommée Djémila oppose aux paroles de compassion de son interlocutrice (« Mon frère, tout le monde s’en fout : c’est un Arabe. Lui c’est un Français, il n’y a que lui et sa mère qui comptent ! »), peut fort bien se comprendre en une telle circonstance. Moins crédible y est, en revanche, l’échange qui suit à propos de Meursault où l’une proteste : « Normalement il devrait rentrer chez lui ! », formule dont l’autre perçoit bien l’intention[27] lorsqu’elle rétorque : « Chez lui, c’est ici ! ». Un tel désaccord des points de vue traduit certes cette contradiction majeure que rappelle à juste titre C. Chaulet Achour : « Car Meursault est à la fois d’ici et étranger. Nous sommes au cœur du nœud de toute colonie de peuplement. » – laquelle forme de colonisation, après plus d’un siècle, opposait la grande masse de colonisés expropriés et dominés et une minorité européenne désormais native de cette terre depuis plusieurs générations. Mais l’appel à renvoyer le meurtrier « chez lui » (entendons : en métropole) procède ici d’une projection rétroactive de la façon dont la période coloniale a pris fin en Algérie. Rappelons que même le PPA, la seule force algérienne d’orientation indépendantiste en cette fin des années 1930, appelait, sans exclusives à l’égard d’aucune des communautés, à un « suffrage universel sans distinction de races et de religions », et que le FLN, par la suite, n’a jamais laissé percer dans ses programmes d’avant 1962 la moindre intention de « mettre à la mer » l’essentiel de la population européenne.
Enfin, même si la séquence, ajoutée par Ozon, où Djémila, sur un plateau désert dominant la mer, se recueille sur la tombe de son frère, a pu être accueillie comme « une forme de réparation cinématographique, pour un personnage [la victime de Meursault] et un peuple qui ont trop souffert[28] », elle reste d’une portée politique équivoque, voire contre-productive. Placée en toute fin du film, après le second grand monologue de Meursault, elle s’y impose en effet comme son véritable épilogue. Or, l’étrange et austère solitude dans laquelle se déroule la scène, laisse incertain son registre de réalité : s’agirait-il d’un ultime souhait intérieur d’apaisement traversant Meursault lui-même (comme pourrait le suggérer le bref fondu-enchaîné reliant la scène à son monologue final[29]) ? d’un fantasme par lequel la sœur de la victime tenterait d’en parfaire le deuil ? ou d’un moment réel, indiquant que « l’Arabe » aurait en définitive trouvé une sépulture où il se verrait restituer ce nom[30]omis tout au long du procès comme de la narration de Meursault ? Mais, dans ce dernier cas, plutôt que de « réparer » quoi que ce soit, cet épisode conclusif impliquerait de fait que l’autorité coloniale aurait au moins eu le souci ultérieur d'offrir à sa famille le double réconfort de pouvoir rendre à la dépouille les derniers adieux, et au défunt, son identité propre[31]. D'où en réalité une involontaire euphémisation finale de la violence et de l'indifférence de cette société à l'égard des colonisés, au lieu de ce geste radical de justice symbolique qu’entendait de bonne foi y faire le réalisateur.
Quand More is less…
Cette ambiguïté finale souligne l’indécision du dernier quart du film tel qu’il cherche à se conclure à partir de la condamnation du jeune meurtrier. Le drame se serait achevé avec sa plus grande force si le réalisateur s’en était tenu à laisser résonner dans toute son intensité le monologue du condamné dans « la merveilleuse paix » de sa dernière nuit. Cette scène se trouve au contraire engluée[32] dans une succession de séquences disparates, comme si Ozon avait renoncé à choisir entre elles.
Cela débute par la séquence « surréaliste » déjà évoquée de la marche dans le désert, où le condamné retrouve sa mère[33], puis engage vers l’échafaud comme une montée au Calvaire qu’interrompt brusquement le bruit du couperet qui tombe. Elle condense, non sans artifice, les longues ruminations solitaires du prisonnier sur la réalité du supplice capital[34] et cet ultime moment où il repensera à sa mère et se verra, comme elle, « prêt à tout revivre ». S’autorisant peut-être, mais à contre-sens, du commentaire elliptique de Camus selon lequel Meursault serait « le seul christ que nous méritions[35] », la métaphore évangélique se prolongera par la suite à travers les dernières images presque sulpiciennes du condamné à l’approche de son exécution, les joues mangés de barbe, un sourire extatique aux lèvres[36]… Avec le jeu expressionniste des ombres carcérales elle contribue à imprimer une tonalité théâtrale assez datée à la longue confrontation opposant Meursault à l’aumônier.
La scène où explose « cette grande colère » du condamné est cependant encore précédée d’une ultime rencontre avec Marie, dont l’irréalisme du décor carcéral et le flou où apparaissent d’abord les deux visages suggèrent qu’elle n’est qu’imaginée par Meursault, lequel y fait longuement part à sa visiteuse des remémorations inépuisables où, dans sa cellule, il pouvait reparcourir mentalement l’intérieur de son ancienne chambre.
La longue séquence avec l’ecclésiastique prélude ensuite au monologue nocturne du prisonnier et au cortège d’images intérieures qu’il réveille – superbe moment, on l’a dit, mais qui perd l’essentiel de sa puissance expressive, à céder sa place conclusive à la scène de Djémila devant la tombe de son frère.
Et comme s’il restait encore dubitatif sur l’efficacité de cette cascade de fausses sorties, Ozon introduit un autre et dernier commentaire conclusif en laissant entendre au fil du générique de fin le fameux single « Killing an Arab » du groupe The Cure (1978). Ultime tentative, sans doute, pour « actualiser » le drame qui, à la fois, ne s’assume pas vraiment (le texte de la chanson n’étant pas sous-titré pour ceux qui l’ignorerait) et s’expose à autant d’interprétations contradictoires, malentendus ou détournements que ce titre, involontairement provocant, l’a été en son temps et jusqu’à nos jours.
En matière filmique, un tel « trop » n’est pas d’un meilleur effet qu’un « pas assez ». Mais, en l’espèce, on ne peut qu’imaginer combien cette nouvelle adaptation de L’Étranger aurait gagné en tension émotive et en acuité politique à se dépouiller de nombre des ajouts maladroits ou d’une signification involontairement incertaine dont elle s’est encombrée.
Dans plus d’un plan de son film, Ozon n’a pas hésité à s’inspirer de manière presque littérale du cadrage ou de l’angle de vue correspondants chez Visconti. Dans la séquence capitale sur la plage du meurtre, cette fidélité s’étend même à un quasi recouvrement visuel dans l’organisation générale de l’espace, l’architecture du cabanon, la disposition du rocher et de la source, les déplacements et postures des personnage, le face-à-face final des deux adversaires[37]… On peut regretter qu’il n’ait pas rendu semblable hommage à son prédécesseur dans la conception de son épilogue. À revoir d’un œil neuf Lo Straniero de 1967, film assez injustement décrié,on peut en effet mesurer quelles autres rigueur et puissance dramatiques le réalisateur italien y a trouvées, dans la fidélité d’ailleurs au roman, en y enchaînant, sans détours ni fioritures, l’affrontement qui dresse le condamné face à l’aumônier et le monologue radouci où, devant la mort toute proche, il s’ouvre enfin « à la tendre indifférence du monde».
Notons pour finir qu’il sera intéressant d’observer, en miroir dans son adaptation du Meursault, contre-enquête de Kamel Daoud, dont la sortie mondiale est annoncée, sous le titre The Arab, au prochain festival international du film de Rotterdam[38].
[1] À l’exception notable de la scène du meurtre et des séquences en prison, qui furent réalisées en Italie, respectivement sur la plage de Sperlonga et à Gaète ; sur le statut symbolique et la localisation de la plage du meurtre, voir le chapitre « Ce lieu introuvable où le malheur survient » de mon livre : L’Étranger en trois questions restées obscures, Pézenas, Domens, 2023, p. 23-55.
[2] Sorti officiellement en France le 29 octobre dernier, il dépasse en sixième semaine les 740 000 spectateurs.
[3] La comédienne y revêt une apparence assez proche de celle de l’actrice algérienne, non créditée au générique, incarnant ce même rôle chez Visconti ; une parenté d’allure s’observe aussi entre la figuration du personnage de son frère par Mohamed Cheritel, et celle qu’en assure aujourd’hui A. Dehkani.
[4] Notamment, l’interrogatoire par le juge d’instruction, qui a sans doute paru faire double emploi avec celui conduit plus tard par le président des Assises et, s’agissant de l’exhortation faite au prévenu à s’incliner devant le crucifix, avec l’affrontement final avec l’aumônier ; ou les diverses allusions faites au cours du procès au cas du « parricide » jugé par cette même Cour.
[5] Ce même fait-divers tchèque a inspiré à Camus sa pièce Le Malentendu.
[6] Ozon interrompt au contraire cette sorte d’aubade virgilienne, au bout de quelques notes, dès l’arrivée des deux Européens ; sur mon interprétation de cette scène et du dernier retour sur la plage, op. cit., chapitre « Le mouvement inavoué qui porte Meursault vers sa victime », p. 57-93.
[7] Meursault observe, au moins métaphoriquement, que ce vêtement « fumait dans la chaleur » quand il se retrouve face à celui qui succombera bientôt sous ses balles.
[8] Un semblable appel annonçait de même, lors du procès, le début du réquisitoire ; cette mélopée fait écho au leitmotiv musical lancinant évoquant tout au long du film la fatalité qu’exprime aussi, à l’approche du meurtre, une montée soudaine du bruit des vagues.
[9] Le rôle de ce dernier est joué par George Wilson.
[10] Référence sans doute au récit allégorique de La Peste tel qu’il s’ouvre sur la découverte d’un premier cadavre de rat.
[11] D’autres aussi discrètes résonances rythment le drame, tel ce bol de café que Meursault boit lentement en seule réaction à l’annonce de la mort de sa mère, auquel fait écho celui qui lui sera tant reproché au procès, de l’avoir accepté du concierge lors de la veillée funéraire ; ou cette cigarette que ses gardes lui refusent lors de son transfert en cellule qui renvoie à celle qu’il avait inconsidérément offerte à ce même interlocuteur…
[12] Sous réserve de vérification, le jeune indigène qui interpelle Meursault pourrait être le même que celui qui l’aide ensuite à arranger sa couche et qui réapparaît dans les deux autres scènes en cellule collective. Comme c’était déjà le cas chez Visconti, son apparence physique fait assez directement écho à celle de la victime du meurtre.
[13] Entretien sur France Inter, 8 octobre 2025.
[14] « François Ozon, “son” Étranger : une adaptation réussie », Collatéral, 22 octobre 2025.
[15] Le numéro de la rue de Lyon où vécut le jeune Camus.
[16] Où l’adjonction d’un panonceau indiquant la direction « Bab-el-Oued » est complètement déplacé, s’agissant d’un autre faubourg populaire situé à l’exact opposé du centre-ville.
[17] Comme les variations macabres de Fernandel sur « Tout condamné à mort aura la tête tranchée. », les nombreuses têtes de cire coupées de cette devanture annoncent, non sans humour noir, le supplice final du héros.
[18] « wa’lach djabouk lahna ? », soit : « Pourquoi t’a-t-on amené ici ? »
[19] « rabbi y’faraj alihoum ! », soit : « Que Dieu leur ouvre la voie ! »
[20] Ainsi le détenu qui interpelle Meursault associe le traditionnel sarouel bouffant avec une chemise et un gilet à l’européenne.
[21] Coiffe que Visconti fait porter à trois des « Arabes » qu’il met en scène.
[22] Selon la traduction couramment admise du titre du roman depuis sa première publication en arabe aux prestigieuses éditions libanaises Dar Al Adab (Maison des lettres) en 1990 : Al-Gharîb.
[23] Ce qui n’excluait bien sûr pas des exceptions aussi révoltantes que cet arrêté pris par le maire de Zéralda à l’été 1942 pour prohiber l’accès de la plage « aux Arabes et aux Juifs » et dont l’application violemment répressive fit vingt-cinq victimes (ANOM 9H27 et Jean-Louis Planche, « Violence et nationalisme en Algérie (1942-1945) », Les Temps modernes, octobre 1996).
[24] Lequel la prénommait « Yasmine » ; Ozon précise aussi le patronyme qu’elle partage avec son frère, la victime de Meursault : « Hamdani » (qui renvoie au radical Hamara, rendre grâce).
[25] C. Chaulet Achour, article cité, faisant référence sans doute aux combattantes du FLN, Djamila Boupacha et Djamila Bouhired.
[26] À la différence de sa victime dont il n’a pas lieu de savoir le prénom lors du meurtre.
[27] Qui aurait pu n’être que de dénoncer un possible verdict de complaisance.
[28] C. Chaulet Achour, article cité.
[29] Une inhumation musulmane en un tel site semble en outre peut réaliste.
[30] A l’instar de la succession du titre du film dans ses deux langues, la stèle musulmane porte, en arabe (avec dans un second temps, un sous-titre en français), l’appellation « Moussa Hamdani » ; le prénom y est emprunté à Meursault, contre-enquête où il fait écho à celui du frère de la victime, « Haroun », en référence symbolique aux appellations coraniques des frères Moïse et Aaron dans la Bible).
[31] À l’inverse, dans Meursault, contre-enquête, Kamel Daoud fondait tout son contre-récit sur le fait que les proches de la victime, n'ayant jamais eu accès à son corps, n'avaient pu l'inhumer selon leurs rites.
[32] Un fétichisme quelque peu buñuelien inspire par ailleurs les brefs moments où le regard de Meursault semble s’arrêter dans l’observation fascinée d’une goutte de sang tombée dans son lavabo ; d’un scarabée dans la scène de l’hospice ; d’une blatte dans la cellule collective ; ou de l’aisselle velue de l’Arabe peu avant qu’il le tue.
[33] Laquelle lui rapporte alors l’épisode (tiré par Camus d’un témoignage familial sur son propre père) de la crise violente qu’avait subi son père après avoir assisté à une exécution capitale. ; cette rencontre fait écho aux trois portraits photographiques de cette mère, entr’aperçus, l’un dans son dossier à l’hospice, les deux autres dans le logement de Belcourt.
[34] Ruminations où le condamné semble désavouer par avance le kitsch fantasmatique de cette séquence : « On se fait toujours des idées exagérées de ce qu’on ne connaît pas. […] La machine est au même niveau que l’homme qui marche vers elle. Cela aussi est ennuyeux. La montée vers l’échafaud, l’ascension en plein ciel, l’imagination pouvait s’y raccrocher. »
[35] « Préface à l’édition universitaire américaine de L’Étranger » (1958), Œuvres complètes, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », I, p. 216.
[36] Dans une sobriété plus matérialiste, Visconti s’attardait plutôt, tout au long du monologue final, sur la nuque du condamné, rasée en vue de son supplice.
[37] Pour cette même séquence sur la plage, j’avais souligné (op. cit., p. 38-44) quelle même parenté visuelle s’observait entre le film de 1967 et la BD de Jacques Ferrandez, dont il n’est pas exclu qu’elle ait également inspiré la mise en espace voulue par Ozon.
[38] Selon les indications rendues publiques, le tournage aurait eu lieu à Oran, Hadjout (ex-Marengo) et Alger.