Hier, 15 mai 2024,
jour anniversaire de la reprise du travail
pour certains des soignants
suspendus 20 mois auparavant.
Un an plus tard, quelques constats.
Au CMPP où je travaille,
des décisions d'arrêt de suivi avaient été prises,
niant les processus thérapeutiques engagés
au prétexte que les enfants "allaient mieux".
Heureusement,
il y a celui
qui a pu faire entendre
qu'il ne l'entendait pas ainsi,
qu'il n'avait pas fini ce qui était engagé
et comptait bien le poursuivre.
Lorsque j'avais commencé à le rencontrer
quelques années auparavant,
cet enfant ne parlait pas.
Ces enfants qui questionnent
qui refusent
par leur refus
nous enseignent.
Il y a celui
qui très récemment a demandé à sa thérapeute
ce qui s'était passé pour elle durant sa disparition.
Ces enfants qui n'oublient pas
qui ne comprennent pas
par leur incompréhension
nous enseignent.
Mais les enfants
avec lesquels
le travail a repris
sont rares.
Il y a cet enfant-là,
croisé dans le couloir
à mon "retour" post-covid, retour
juste pour quelques semaines
juste parce que c'était prévu par la loi
juste en attente de la suspension d'après.
Ce jour-là cet enfant-là
venait pour une première séance
avec une collègue embauchée en renfort.
Qui, de lui ou de moi,
a été le plus éberlué
par cette folie ?
À la vraie reprise
j'ai tenté de retrouver cet enfant-là
de renouer avec lui le fil du travail
interrompu deux ans auparavant,
mais je n'y suis pas parvenue.
Or cet enfant-là a rencontré un loup.
Quel impact aura eu
la rupture du lien thérapeutique
pour cet enfant-là ?
Et il y a tous les autres,
aperçus au détour d'un couloir
ou plus jamais revus.
La suspension,
une disparition mise en acte
par des adultes sans boussole.