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Billet de blog 30 janvier 2023

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À partir de mercredi, dans un "contexte épidémique favorable", des "évolutions législatives" vont permettre de lever encore davantage de mesures. Mais pas les suspensions sans salaire de milliers de professionnels.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

À partir de mercredi, dans un "contexte épidémique favorable", des "évolutions législatives" vont permettre de lever encore davantage de mesures. Mais pas les suspensions sans salaire de milliers de professionnels.

A partir de mercredi, une personne positive au covid n'aura plus besoin de s'isoler. Mais un soignant (ou assimilé) non vacciné contre le covid n'aura toujours encore pas de droit de travailler.

Pourquoi cela ?

Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas pris dans le même temps la décision de réintégrer les professionnels suspendus depuis le 15 septembre 2021 ?

Nous avons été suspendus en vertu de la loi du 5 août 2021 "relative à la gestion de la crise sanitaire", qui a instauré une obligation vaccinale pour une liste de professionnels, tout en stipulant au paragraphe IV de l'article 12 ce qui suit : "Un décret, pris après avis de la Haute Autorité de santé, peut, compte tenu de l'évolution de la situation épidémiologique et des connaissances médicales et scientifiques, suspendre, pour tout ou partie des catégories de personnes mentionnées au I, l'obligation prévue au même I."
La loi du 30 juillet 2022 "mettant fin aux régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19" a maintenu cette obligation vaccinale, sur avis de la Haute Autorité de Santé "au vu du contexte épidémique dynamique, des incertitudes sur l’évolution de l’épidémie dans les prochains mois".

Maintenant les "prochains mois" sont passés et le "contexte épidémique" est "favorable".

Alors qu'attend le gouvernement pour nous réintégrer ?

La HAS qui devait se prononcer au mois de janvier est-elle en grève ?
Ou alors le désir d'"emmerder les non vaccinés" du président de la république n'est-il pas encore tout à fait assouvi ?

Depuis le 15 septembre 2021, en pleine crise sanitaire, les suspensions de milliers de soignants ont mis encore un peu plus à mal le système de santé.

Les patients que j'aurais dû rencontrer, de même que ma collègue psychomotricienne également suspendue, sont de jeunes enfants en graves difficultés de structuration et de développement. Ils sont laissés pour la très grande majorité d'entre eux sans suivi psychomoteur pour la deuxième année consécutive. Ils sont donc privés des soins qui leur sont nécessaires. Mais de cela, qui s'en préoccupe, puisqu'il est rabâché que les suspensions ne concerne quasiment plus personne, laissant entendre que les soins sont assurés ?

Peut-être que le président de la république a aussi envie d'em... ces enfants et leurs parents ?
Le 2 avril 2021, donc avant que cette loi soit votée, il semblait pourtant avoir à cœur la cause des enfants souffrant de "troubles du spectre autistique". Et ces enfants-là, nous en avons un certain nombre parmi nos patients.
Le président dit qu'il est difficile de trouver des professionnels. Il a tout à fait raison, en CMPP de nombreux postes sont à pourvoir. 
Alors pourquoi suspendre des professionnels ?
Entre le retour du confinement en 2020 et notre suspension plus d'un an plus tard, nous avons travaillé sans aucune interruption.
Alors à quoi rime une suspension ensuite ?

Et ce n'est pas faute de l'avoir sollicité directement, le président de la république, ainsi d'ailleurs que son épouse, ils ne sont pas sans savoir. De même que le ministre de la santé, la Haute Autorité de Santé et l'Agence Régionale de Santé.
De manière répétée j'ai interpellé à tous les échelons au sujet de la carence de soins et de l'impact sur la structure provoqués par plusieurs suspensions au CMPP où je travaille. Et j'ai eu, soit aucune réponse (du couple présidentiel), soit une réponse argumentant sur la "protection des populations fragiles", réponse obtuse et bornée à mes messages précisant que ces enfants sont scolarisés et ne présentent pas de fragilité somatique.

Que les suspensions soient toujours encore d'actualité, au détriment des soins et au mépris des droits fondamentaux, c'est inqualifiable.

Que font les syndicats ? Les médias ? Les juges ? Les  parlementaires ?

Les citoyens ?

Depuis le 15 septembre 2021, les droits sont bafoués d'une façon totalement inédite
          - droit de donner son consentement libre et éclairé à un traitement médical, à fortiori avec des produits encore en cours d'expérimentation. De très nombreux professionnels se sont fait vacciner contre leur volonté. Certains ont développé des effets secondaires graves, invalidants. Dans un tel contexte, qui est responsable ?
          - droit d'exercer sa profession et d'en vivre. Depuis le 15 septembre 2021, en France, il est devenu possible de suspendre quelqu'un de son poste pour une durée indéfinie, sans salaire ni cotisations et sans aucune aide sociale. Ceci alors que la raison qui a motivé sa suspension a disparu.

Certes il y a actuellement bien d'autres sujets de préoccupation, les manifestations prévues demain concernent l'avenir de chacun.
Mais ce qui est en cours pour nous, "suspendus" depuis 16 mois et demi, est extrêmement grave et concerne également tout un chacun, parce que cela aggrave encore le délitement des soins, et parce que la prochaine fois d'autres motifs pourront entraîner pour d'autres personnes le même traitement, un piétinement des droits fondamentaux, dans l'indifférence générale. La voie est ouverte pour cela.

Alors il faut réagir. Maintenant.

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