Les néolibéraux au pouvoir ont mis en place une stratégie très cohérente pour tuer à petit feu notre système de protection sociale. En effet, ils n’ont jamais accepté, dès la mise en place de la Sécurité sociale, que ce pan d’activité échappe au marché, sachant que pour leur santé les patients transformés en clients sont prêts à faire de gros sacrifices financiers pour avoir accès aux meilleurs soins pour eux-mêmes et leur famille. Il est essentiel de comprendre qu’ils ont pour eux le temps long. C’est la raison pour laquelle, ils tentent des avancées brutales et qu’ils sont prêts à reculer si les réactions sont trop vives, car cela leur permet ensuite d’avancer des mesures qui paraissent un moindre mal mais qui au fil du temps aboutissent au même résultat. C’est ainsi qu’ils procèdent en matière de déremboursement de certains soins ou d’augmentation des franchises.
Mais ils profitent aussi du fait que notre système de santé et de protection sociale est un mélange public-privé. En effet, en contradiction totale avec l’argument du trop de public en France, nous sommes le pays d’Europe où le secteur d’hospitalisation privée à but lucratif possède la plus forte part du marché, près de 30 % du total et environ 50 % de la chirurgie. La médecine de ville est restée organisée sur la base d’un système libéral qui est à l’origine des déserts médicaux, des dépassements d’honoraires et de la pénurie de médecins. Il faut en effet rappeler que ce sont les médecins eux-mêmes qui ont demandé la mise en place du numerus clausus dans un objectif de préservation de leur niveau de revenus. Ils sont dans la même logique de marché chère aux néolibéraux se basant sur deux règles : si la taille du gâteau à se partager – le budget de la Sécurité sociale – diminue, il ne faut pas être trop nombreux à se le partager ; tout ce qui est rare est cher, je suis rare donc je suis cher. Ils ont ainsi été utilisés politiquement de manière cynique par la classe politique dont la majorité des médecins est le soutien et certains commencent à se rendre compte que ce n’était finalement pas le bon choix.
Il faut également prendre en compte que la crise politique institutionnelle permet, plus elle traîne en longueur, de resserrer encore plus le garrot financier. Ainsi, la prochaine loi de financement de la Sécurité sociale est dans les tuyaux avec ses mesures d’économies qui vont encore plus mettre les hôpitaux à l’os. Pour rappel, il est demandé à l’Assurance maladie de faire 5,5 milliards d’euros d’économies alors que les hôpitaux ont accumulé l’an dernier un déficit de plus de 3 milliards d’euros.
Alors attention de ne pas céder à la pensée unique distillée par les médias autour de la dette et de la France qui vivrait au-dessus de ses moyens. Le problème est bien le manque de ressources pour la Sécurité sociale pour qu’elle puisse répondre à ses missions. Le slogan « Taxer les riches » doit devenir une réalité politique et pour cela il faut faire sauter le verrou politique néolibéral avant qu’il ne soit trop tard pour la malade Sécurité sociale.