Il existe un large consensus pour considérer que les différents plans d’économies imposés à la Sécu sont inefficaces et que ce qui est appelé « déficit » est en fait un manque de ressources. Mais cette analyse ne vaut que dans le cadre des principes qui régissent notre Sécu. La logique imposée par les néolibéraux est tout autre, raison pour laquelle ils avancent cachés. Leur objectif est très clair : il s’agit de rompre avec le principe de solidarité pour imposer celui de la responsabilité individuelle. Car c’est bien cette dernière qui est invoquée quand la justification des nouvelles franchises est de « responsabiliser les assurés sociaux ».
Regardons de plus près ce qui est proposé dans le cadre du prochain budget de la Sécu. Les différentes mesures de baisses de remboursement et de nouvelles franchises sont chiffrées à 2,3 milliards. A cela s’ajoute une augmentation de 1 milliard de la taxe sur les assurances complémentaires qui est déjà de plus de 7 milliards. Mais comme cela ne suffisait pas, cette taxe a été alourdie de 100 millions pour compenser le surcoût induit par le décalage de l’application de la réforme des retraites. Donc cette mesure présentée par le PS comme une grande victoire va être payée par une augmentation du prix des complémentaires dont l’évolution ces dernières années a déjà été très supérieure à l’inflation, ce qui pèse lourdement sur le budget des assurés sociaux et plus particulièrement sur celui des retraités.
Bilan : l’essentiel des économies imposées, soit 3,4 milliards seront payées par les assurés sociaux, lesquels subissent de fait un alourdissement constant des frais qu’ils doivent engager pour leur santé. En effet, un autre argument du gouvernement qui constitue une véritable arnaque intellectuelle est que le reste à charge en France serait un des plus faibles en Europe. Pour soutenir cette affirmation, le coût des complémentaires est exclu du calcul. Or il s’agit bien d’une charge très inégalitaire qui pèse lourdement sur le budget des plus pauvres, car le montant de la cotisation des complémentaires n’est pas basé sur les revenus de l’assuré, mais est le même pour tous et sa variation n’est liée qu’au niveau des prestations proposées. Donc, la Sécu aujourd’hui ne prend en charge que 80 % des dépenses et les 20 % restants doivent être payés par les assurés sociaux. Or les dépenses de santé représentent aujourd’hui 15 % du revenu des ménages soit 6 880 euros par an, donc le reste à charge est en moyenne de 1 360 euros par an, soit l’équivalent d’un mois de SMIC.
Si cette logique se poursuit, ce pourcentage s’élèvera, creusant les inégalités, avec une augmentation du renoncement aux soins des plus pauvres dont la conséquence inéluctable sera la dégradation de leur état de santé, c’est-à-dire la situation des États-Unis, modèle des néolibéraux.
Or la solution est simple : les 20 milliards qui manquent pour équilibrer les comptes de la Sécu peuvent être immédiatement trouvés en supprimant seulement 25 % des exonérations de cotisations sociales offertes aux entreprises.