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Car on ne peut pas faire un film dans lequel un président des USA devient un monstre rouge qui menace de tout détruire en se défendant de faire un film politique. Surtout au moment où Trump arrive à la maison blanche, avec tout un gouvernement d'éléphants rouges républicains ultraconservateurs…
On ne peut pas montrer ce monstre rouge devenir fou et sanguinaire au point de détruire la maison blanche sans penser à l’invasion du Capitole…
Très franchement je ne m'attendais pas à une telle photographie de la situation politique en allant voir le dernier Marvel. Considérant ce Captain America comme un simple grand spectacle, je suis allé le voir dans une immense salle Imax pour en “prendre plein la gueule”. Et dès le début ce n’est pas les effets spéciaux qui m’ont bluffé, c’est l’intelligence de cette façon d’exposer dans un film grand public une analyse hyper pertinente de la situation politique américaine.
Mais commençons plus de 4 siècle avant ce film, en 1610 avec une des dernières pièces écrite par William Shakespeare : La tempête. Au début du dernier acte, Miranda - le seule personnage féminin de la pièce - lance avec beaucoup de naïveté un “Oh, wonder!
How many goodly creatures are there here!
How beauteous mankind is!
O brave new world,
that has such people in ‘t!”
L'innocence de ce personnage qui en découvre pleins d’autres à ce moment là et qui ne connaît rien du monde parce qu’elle vit depuis l’âge de 3 an sur une île où elle a été exilé avec son père, c’est clairement l’occasion pour Shakespeare de faire preuve d’ironie. Ce “O brave new world” qu’on pourrait traduire par “Oh tout ce beau monde”, c’est l’occasion pour Shakespeare de dire en quelques mots, toute la complexité que représente le fait de rassembler des personnages que tout oppose.
Et ce “O brave new world”, c’est de là que vient le titre de ce nouveau chapitre de Captain America : brave new world.
On pourrait croire qu’avec ces mots de courage (brave), de nouveauté (new) et de monde (world), on serait dans un titre accrocheur qui ressemble aux noms des guerres de l'ère Bush (genre “global war on terror” ou “operation enduring freedom”). Mais en réalité la référence a Shakespeare apporte de la compexité (entre naïveté et ironie). Et ça ne s'arrête pas là… Trrés loin de là…
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Pour être plus précis, le fait de se servir de cette réplique comme d’un titre vient d’un roman qui a été écrit pendant la grande dépression des années 30 et qui, du fait de son histoire en résonance directe avec le contenu du film n’a pas inspiré que l’utilisation de son titre.
Il est même assez inquiétant de saisir les thématiques communes entre ces années 30 et notre époque tourmentée politiquement et économiquement…
Le britannique Aldous Huxley a écrit le roman d'anticipation dystopique “Brave new world” en 1931 à Sanary-sur-Mer (oui oui en France). C’est une époque où il fréquente Stravinsky et les surréalistes parisiens.
Peu après, se sentant oppressé dans l’Europe de cette période (Hitler en Allemagne, Mussolini en Italie, Franco en Espagne…), il s'installe en 1937 à Hollywood où il restera jusqu’à sa mort en 1963, malgré le refus que lui oppose l’administration americaine à sa demande de nationalisation, du fait de ses positions pacifistes. Je vais prendre un peu de temps sur le travail de cet auteur passionnant parce qu’il a écrit une phrase importante dont je vous parlerais en conclusion de tout ce drôle d’article que m’inspire ce film… Au passage ce livre de 1932 a été adapaté en film en 1998 et en 2021.
Il est intéressant de se pencher sur ce qu’on trouve dans ce livre qui a le même titre que ce dernier Marvel. Il faut dire que cet auteur philosophe a beaucoup écrit sur le nationalisme et sur les graves menaces que peut construire le mariage du pouvoir, du progrès technique et des dérives de la psychologie. Le type est hyper sensible aux recherches sur le “comportementalisme” autrement appelé “béhaviorisme”.
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Avec ce “Soma” on touche à cette notion de “servitude volontaire” (sans doute avait il lu Etienne de la Boetie) chère à l’auteur dont il parlera dans un discour peu avant sa mort (en 1961 à la California Medical School de San Francisco) : “Il y aura dès la prochaine génération une méthode pharmaceutique pour faire aimer aux gens leur propre servitude, et créer une dictature sans larmes, pour ainsi dire, en réalisant des camps de concentration sans douleur pour des sociétés entières, de sorte que les gens se verront privés de leurs libertés, mais en ressentiront plutôt du plaisir.”
Lui même adepte de différents psychodropes, Huxley demandera par écrit à sa femme de lui injecter 100 microgrammes de LSD, au moment où sur son lit de mort, un cancer de la gorges l’empèchait de pourvoir communiquer et allait inévitablement lui être fatal. Il entra dans un état de méditation et de béatitude extatique que sa femme identifie comme un état de complet amour. Après une deuxième injection, accompagné par sa femme et ses mots d'amour, il meurt paisiblement, le 22 novembre 1963 mais l’annonce de sa mort sera très vite éclipsée par celle d’un certain John Fitzgerald Kennedy.
On en arrive au film de Marvel avec un autre président des USA qui vient d’arriver (Harrison Ford dans le film et Donald Trump dans la vraie vie)..
Le film a été tourné à partir de début 2023, on avait donc aucune idée de l’issue des élections de novembre. Et d’ailleurs l’écriture commencé l’année d’avant avec l’arrivée du jeune réalisateur Julius Onah.
Mais c’est fou de voir comme ce film vise juste sur la situation actuelle aussi bien dans les thématiques abordées, que dans les enjeux dramatiques. Il y aurait tellement à dire que je ne sais pas par où commencer. D’abords je tiens à prévenir que je vais beaucoup divulgâcher le contenu du film, parce que c’est impossible de ne pas aborder tous ces éléments sans appeler un chat un chat.
Je pourrais partir dans pleins de direction tellement les connections avec le réels sont nombreuses mais je propose ces 6 axes :
1 - Black lives matter et american dreams
2 - Les cerisiers en fleurs sur les cendres d’Hiroshima
3 - Partager des ressources communes
4 - Un monstre à la maison blanche
5 - La pilule des réseaux sociaux
6 - To fight or not to fight ? (that is the question)
Bon désolé ça promet d’être long, d’autant que l’introduction avec Shakespeare et Huxley était déjà particulièrement longue…
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1 - Black lives matter et american dreams
Bon alors pour commencer : qui est ce Julius Onah qui réalise ce film ?
J’ai tellement halluciné sur ce film que j’ai lu pleins d’articles et des interviews (dont les magazines “Deadline” et “Vanity Fair”) pour savoir qui a fait ça et quelles étaient ses intentions. C’est comme ça que j’ai appris que le réalisateur de 42 ans est le fils d’un diplomates Nigerian qui a beaucoup pleuré lorsqu’il a enfin obtenu sa nationalité américaine peu avant la réalisation de son premier long métrage parce qu'il croit très fort aux valeurs de sa patrie d’adoption : “Je sais ce que c’est que de devoir aspirer et de lutter pour accéder au rêve américain”.
Il a donc eu plus de chance que l’anglais Aldous Huxley, l’auteur dont je parlais en intro et dont la demande n’a jamais aboutie 70 ans plus tôt. Mais c’était une autre époque.
Julius Onahl a obtenu cette nationalité peu après des études de cinéma à New York où un de ces profs était Skyke Lee, dont la lutte pour l’émancipation des noirs americains est notoire. D’ailleurs Spyke a été le producteur de son premier long métrage “The girl is in Trouble” en 2015.
Des question qu'il se pose encore un peu aussi dans ce film même si il commence à prendre de l'assurance dans ce costume…
Et il faut ajouter que cette transition s'est déroulé dans une crispation entre black et whites americans. Peu aprés ce passage de relais, le meurtre de George Floyd (étouffé sous le genoux d’un policier) en mai 2020 oppose tout l'été des mouvements “black lives matters” (contre les violences policières racistes) à des groupes comme “All Lives Matter” (les conservateurs qui rejettent ces accusations) “Blue Lives Matter” (les défenseurs de la police) ou même “White lives matters” (les supremassistes blancs qui se fouttent du sort des noirs).
Dés que le film commence, on sent qu’il y a d’ailleurs un truc qui cloche dans la façon dont le nouveau président a du mal à cacher sa déception de ne pas avoir un captain america aussi bien (aussi blanc) que pouvait l’être Steve Rogers.
Harrison Ford joue un affreux militaire qui s’est rasé la moustache pour devenir présidentiable.
Il y a donc quelque chose de pourri au royaume de “l’american dream” dés le début du film.
Et ça s’empire avec la tentative d’assassinat du président qui est perpetré dans les 10 premières minutes du film puisque celui qui tire n’est autre qu’un soldat noire americain dont la bravoure a été remerciée par 30 années de prisons pendant lesquelles il a subi des experiences pour le moins traumatisantes (même si elles lui ont occasionné une force démesurée). On comprend d’ailleurs assez vite que ce président avait sa part de responsabilité dans ces expériences lorsqu’il avait des fonctions de gradé de l’armée… Bien sûr ce veteran (Isaiah Bradley interprété par le très touchant Carl Lumbly) et notre Captain america sont potes, et bien sûr notre héro va tout faire pour sortir son pote de prison.
Il faut savoir que cette histoire d'expérience fait référence à un affaire réelle qui s’est déroulé pendant des dizaine d’années au milieu du 20eme siècle : The Tuskegee Experiment qui s’est déroulé en Alabama (à Tuskegee) de 1932 à 1972. 40 années pendant lesquelles 400 noirs americains sans méfiances (et sans défenses) ont subis des traitements sur la syphilis sans être informés de la nature et des dangers de l'expérience, beaucoup ont gardé des séquelles irréversibles et plus de 100 d'entre eux sont morts à la suite de ces expériences. En 1997, deux décennies après l’arrêt des tests, le président Clinton s’est excusé pour les expériences qu’il a qualifiées de “honteuses”, qualifiant les actions du gouvernement de “profondément, profondément, moralement mauvaises”.
Tout l’enjeux du film va reposer sur l’accusation de ce pauvre vétéran qui n’a aucun souvenir de cette tentative de meurtre. Se retrouvant trop proche de l’accusé, (et pas assez blanc au goùt du président) l’enquête sera mené par un personnage très interressant puisque de prime abord très antipathique et très peu coopérente : une femme blanche juive interpreté par la géniale Shira Haas (qui était hyper impressionnante dans la série “Unorthodox”).
Il faut dire qu’en termes de diversité ethnique, le film coche toutes les cases, avec ces noirs americains smart, touchants et puissants (en plus de notre héro et de son ami veteran, il y a une assistante du président - interprettée par Xosha Roquemore - qui incarne un peu la force et la résilience de l’administration américaine) et de nombreux personnages latino-americains (aussi bien aux cotés de notre héros - comme Danny Ramirez - que contre lui, comme Giancarlo Esposito ou Rosa Salazar). Il y a même des français, des Indiens et des Japonais qui se retrouvent à essayer de se mettre d’accord dans des calls à la maison blanche ! On sent d’ailleurs avec ces petites scènes toute la complexité de la diplomatie internationale.
Et il est donc là l’american dream, dans une société mixte, polyethnique et à l’écoute, malgré les divergences et le passé de chacun. O Brave new world !? Ah tout ce beau monde !?
Dans un des interviews le jeune réalisateur explique comment il espère rassembler les gens avec son film : “Quand je suis arrivé ici (aux USA), j’aimais pouvoir m’asseoir dans une salle de cinéma et regarder autour de moi. Tout le monde était différent de moi, mais nous vivions tous une expérience émotionnelle commune, une expérience psychologique, une expérience culturelle. C’est pourquoi j’ai toujours voulu faire des films… Je ne qualifierai pas nécessairement cela d’acte politique, mais c’est un acte très humain. C’est un acte très puissant qui peut avoir une résonance politique.”
2 - Les cerisiers en fleurs sur les cendres d’Hiroshima
Il y a tout un truc avec les pétales de cerisiers en fleurs dans ce film.
C’est installé assez rapidement comme un enjeux de réconciliation entre le président des Etats Unis et la fille qui a décidé de ne plus lui parler (Lyv Tyler).
Mais il faut savoir que c’est aussi un enjeux géopolitique majeur dans cette histoire où le Japon se retrouve à essayer de négocier avec les USA.
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Et en effet, après la médiation américaine ayant permis de mettre fin à la guerre russo-japonaise (1904-1905), le Japon avait cherché un moyen de remercier les États-Unis pour leurs bons offices. L'épouse du président américain William Taft étant tombée sous le charme de ces arbres en fleurs au cours d'un voyage sur l'île, le maire de Tokyo offrit en 1912 à la ville de Washington quelque 3000 cerisiers afin de célébrer l'amitié entre le deux pays.
En 1941, après l'attaque japonaise contre Pearl Harbor, quatre cerisiers de la capitale américaine furent abattus dans des actes de vandalisme. Ils furent alors protégés et jusqu'à la fin de la seconde guerre mondiale on en parla comme étant des arbres «orientaux».
Et 20 ans après les bombardement à Hiroshima et Nagasaki, en 1965, le Japon offrit encore 3800 cerisiers supplémentaires aux États-Unis. Depuis, le “National Cherry Blossom Festival” est organisé chaque année à Washington et ce rendez-vous printanier gagne en renommée, attirant chaque année de plus en plus de touristes du monde entier.
Le réalisateur ajoute qu’avec ces cerisiers en fleur, il est question d’empathie : “Il y a un élément de connexion, de dépassement des différences. Cela renvoie aux thèmes qui, selon moi, sont si essentiels à ce film.”
3 -Partager des ressources communes
En plus de l'empathie, un des thèmes essentiels dans ce film, c'est le partage des ressources dans un monde fini.
Ce qui oppose les américains et les japonais dans ce film, c’est l’accès à de nouvelles ressources qui viennent d’être découvertes au milieu de l’océans pacifiques. Bon alors ok, avec ce truc on n'est dans le trip d’un technosolutionisme et pas du tout dans une problématique de limite planétaire… On est pas loin du délire de vibranium wakandais d'un autre Marvel - Black Panther - mais quand même la façon dont c'est traité est assez proche de la façon dont chaque pays s'excite actuellement dans la vraie vie pour avoir la main sur les dernières ressources accessibles dans un monde fini…
Dans le film, aucun des deux pays ne veut lâcher l’affaire. Chacun veut récupérer la plus grosse part du gâteau (surtout “l’empire américain” avec un Harrison Ford très convaincant dans ce rôle).
Malheureusement le film ne va pas jusqu’à toucher la problématique du réchauffement climatique. Malgré toutes les connivences entre vie réelle et fiction, le scénario se borne à de simples problématiques d’accès aux ressources. Comme si le Technosolutionnisme pouvait gommer le problème d’un coup de baguette magique. Et au fond quand on regarde rétrospectivement l’évolution des imaginaires dans les Comics américains, il y a toujours eu ce truc geek totalement déconnecté de ces réalités anthropiques. C’est tout à l’image des start up qui sont devenues les géants du Web (GAFAM, NATU et autres BHATX) dont la puissance économique est plusieurs fois supérieurs aux PIB des pays où ils font leur beurre et où personne ne semble sensible à l’impact carbone ou environnementale de son activité.
Cette culture du technosolutionnisme va avec tout le délire autour de la 5G (on parle même déjà de la 6G histoire de relancer encore le marché de la téléphonie mobile alors que les quelques nanosecondes qu’ont fait gagner le passage de la 4G à la 5G sont à peine efficients : qui se sert de la réalité virtuelle ou fait des opérations chirurgicales avec son smartphone ?) et des processeurs toujours plus puissants, des disques durs toujours plus gros, des data centers toujours plus consommateurs d'énergie, Des bandes passantes de plus en plus gigantesques...
Tout ça va de paire avec le développement de l’IA. Tout le monde fait comme si il n’y avait aucune conséquence à ce développement.
Après qu’on soit passé d’un monde agricole, à une agriculture industrielle associée à une explosion du secteur tertiaire, on découvre d’un seul coup que l’activité tertiaire peut elle aussi être laborieuse et ça va être la nouvelle révolution économique : encore moins de boulots pour plus de monde : traducteurs, programmeurs, dessinateurs, journalistes, traders… La liste des métiers menacés par cette technologie est comme la force de frappe financière des investisseurs qui s’engouffrent dans ce secteur : sans limite.
En ce sens, la perspective de ressources nouvelles qui est proposée dans ce film est super inquiétante. Elle participe à cette culture de l’hyper consommation, dans un dénis total du réchauffement climatique. A quand un Marvel “Climato-conscient” ?
Mais au final, ce film est l'occasion de se connecter à la problématique de l’accès aux ressources et aux difficultés diplomatiques qu'elle peut faire naître. Allant jusqu’à un combat sur lequel je concluerais ce grand texte dans la 6eme partie : “To fight or not to fight ? (That is the question)”
4 - Un monstre à la maison blanche
Face à ce conflit avec le Japon, le président américain n'a qu'une seule idée en tête : america first ! Ce n'est pas dit aussi explicitement mais franchement c’est impossible de ne pas penser à ça lorsqu'on assiste au positionnement de ce président qui s'isole de plus en plus au fil du film.
Alors ce ne sont pas exactement les mots qu’il utilise, mais clairement on le pense tous très fort. En acceptant ce rôle du président Thaddeus « Thunderbolt » Ross (alias Red Hulk), suite au décès de l’acteur William Hurt, Harrison Ford a refusé de politiser le personnage après avoir annoncé son soutien à Kamala Harris en novembre : “L’autre gars - a déclaré Harrison Ford - il a passé quatre ans à nous monter les uns contre les autres tout en embrassant les dictateurs et les tyrans du monde entier. Ce n’est pas ce que nous sommes. Nous n’avons pas besoin de « make America great again ». Allez, nous sommes géniaux. Ce dont nous avons besoin, c’est de travailler à nouveau ensemble. Ce dont nous avons besoin, c’est d’un président qui travaille à nouveau pour nous tous.”
Il faut savoir que pour le jeune réalisateur Nigerian, travailler avec Harrison Ford, ça a été le rêve absolu. Il l’a découvert dans un des tous premiers films qu’il a vu au cinéma en arrivant aux USA en 1994 : “Clear and Present Danger” où Harrison Ford découvre que le président des Etats Unis (interprété par Donald Moffat) est en collusion avec un cartel de drogue international…
Bon mais cette fois, Harrisson Ford joue le bad president.
Et il y a quelque chose d’assez smart dans le fait de mettre le type que tout le monde adore (Han Solo, Indiana Jones, Rick Deckard dans Blade runner, John Book dans Witness…) dans le rôle du type qui a réussi à séduire son monde pour arriver à la tête de la maison blanche. ça fait vraiment penser à l’opération de séduction de Trump dans une campagne sur laquelle je reviendrais un peu plus tard…
Dans les deux cas (la réalité et la fiction) C’est un peu un monstre sacré. Monstre sacré du cinéma d’un coté et monstre sacré des médias de l’autre avec un homme d’affaire popularisé dans des matchs de catch ou dans le show tv “The Apprentice” où il s’est fait connaître en disant à tue tête "You're Fired" (tu es viré).
Comme je le disais en intro, on ne peut pas faire un film dans lequel un président des USA devient un monstre rouge qui menace de tout détruire en se défendant de faire un film politique. Surtout au moment où Trump arrive à la maison blanche, avec tout un gouvernement d'éléphants rouges républicains ultra conservateurs. On ne peut pas montrer ce monstre rouge devenir fou et sanguinaire au point de détruire la maison blanche sans penser à l’invasion du Capitole…
Et de même on ne peut pas comprendre comment le président de ce film est arrivé à la maison blanche, sans faire un parallèle avec les trois dernières campagnes de Donald Trump, et tout particulièrement la dernière, car dans le film on finit par comprendre que ce président n’est que la marionnette d’un super vilain qui s’appelle The Leader (ça c’est du nom de super vilain !)
The Leader apparaît à la fin du film L’Incroyable Hulk, en 2008. Au départ le personnage s’appelle Samuel Sterns, c’est un biologiste cellulaire qui tente de développer un remède pour la maladie de Bruce Banner (Hulk). Ce n’est que vers la fin du film qu’il est contaminé par le sang de Banner et commence à muter en The Leader.
On n’a donc pas revu ce personnage (interpretté par le même acteur Tim Blake Nelson) depuis le Hulk qui est sorti il y a plus de 16 ans. Et de toute évidence, le gars a traversé des moments difficiles au cours des deux dernières décennies, vu la monstruosité physique dont il est la victime.
Assez vite, on est tenté de faire un parallèle entre les expériences subies par le vétéran et l’accident qui a provoqué l’aspect difforme et vénère de ce Leader. Et au fond, ces histoires de dommages collatéraux d'expériences humaines est vraiment un des grands thèmes du film puisqu’on y touche de plusieurs façons via plusieurs personnages.
Là où le vétéran ne fait que subir ce qu’il lui arrive (il se retrouve d’ailleurs manipulé par The Leader en plus d’être déjà victimes d’autres experiences), le biologiste a décidé de se servir de son savoir faire pour fomenter un plan de vengeance diabolique, et face à ce plan, on est tenté de faire le parallèle avec la place des réseaux sociaux dans les différentes campagne de Donald trump.
5 - la pilule des réseaux sociaux
Le truc de ce biologiste devenu “the Leader”, c’est les pilules.
Ces drogues qu’ils fabriquent et qui permettent de faire des miracles… Ou des catastrophes.
A l’article de la mort, le président du film à accepter le deal de “the leader” : Tu me sauve avec ta came, issue de tes travaux sur la maladie de hulk, et en échange, je ferais ce que tu me demande, je vais devenir président des USA et je serais ta marionnette.
Voilà en gros le truc de dingue au cœur du film.
Franchement, je ne peux pas voir cette histoire sans penser au deal que Donald Trump à dut faire avec Elon Musk pour que ce dernier s’engage comme il l’a fait dans la campagne présidentielle.
Et on sait tous quel a été le deal : des contrats avec la NASA (de quoi remplir les bons de commandes de SpaceX pendant des dizaines d’années aux frais des contribuables), une dérégulation fiscales qui servira les intérêts personnels des deux hommes d’affaires, et sans doute, au passage, des avantages pour développer Tesla comme une vitrine de la réussite américaine et un - soit disant - moteur de l’économie americaine (alors que c’est surtout un aspirateur à investisseurs, tout comme de nombreuses crypto monnaies).
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Ce leader a plus d’un tour dans son sac. Mettre en place ce président à tendance suprémaciste n’est qu’une des parties de son plan.
Le truc de The Leader, c’est le contrôle de la pensée.
Avec ces pilules, ces drogues, il peut carrément forcer n’importe qui à se mettre dans une transe d’hypnose et le forcer à faire ce qu’il veut. C’est ainsi que notre vétéran s'est retrouvé à tirer malgre lui sur le président. Il était possédé par cette force étrange et n’en garde aucun souvenir.
Plusieurs autres personnages se retrouvent d’un seul coup à agir de la sorte (eliminant des témoins par exemples) jusqu’à ce que l'enquête de nos différents héros leur permettre de decouvrir le poteau rose.
Avec cette façon de droguer la population, on n’est d’ailleurs pas très loin du “Brave New World” que Huxley a écrit presqu’un siècle plus tôt avec le conditionnement “hypnopédique” du “soma”, ce comprimé distribué tous les soirs.
Mais surtout avec cette force qui s’anime par onde sonore, on pense très fortement à la propagation des idées via les réseaux sociaux. A la puissance de faire changer les pensées, de faire rentrer des sujets dans la fenêtre d’Overtone.
Et donc bien sur, on pense à la force de frappe d’un Elon Musk via un réseau social (X ex Twitter) qu’il a décidé de déréguler en réouvriant tous les comptes controversés qui avaient été fermés (parce que propageant des forces informations) ou en modifiant les algorithmes de telle sorte que les tweets “toxiques” se retrouvent sureprésentés de 32% (dont les fake news du propre compte d'Elon Musk, avec certains tweets qui ont été “imprimés” plusieurs centaines de millions dec fois).
Un réseau social qui a aussi la particularité d’être une des premières source de la plupart des médias à travers le monde (les journalistes citant régulièrement les tweets des uns et des autres).
D’autres réseaux avaient (malgré eux) déjà participé à la victoire de Donald trump dans sa campagne de 2016 avec les 87 millions de comptes individuels piratés dans le scandale Facebook Cambridge Analytica.
Enfin bref, il y a, dans cette idée de pouvoir de ce “super vilain” une façon d’aborder encore une fois un problème bien réel et bien problématique de notre société.
6 - To fight or not to fight (this is the question)
Qu’il s’agisse de l’émancipation noire américaine, de l'accès aux ressources naturelles dans un monde fini, du fait d’avoir un monstre à la maison blanche à cause des super pouvoirs que s’octroient des businessmen en manipulant des réseaux sociaux, on a toutes les raisons d’avoir envie de nous battre pour défendre un monde plus juste et plus démocratique pour plus de monde. Et il parait difficile d’entendre la leçon d’empathie que nous offre le Japon quelques années après le bombardement d’Hiroshima.
Dans le film, le président qui est chef des armées (et un ancien militaire) se déplace en personne sur un porte avion au milieu de l’océan pacifique, pour diriger les opérations autour de cette nouvelle ressource qui le met en opposition avec les forces japonaises.
Tout est fait pour que ça se transforme en nouvelle guerre mondiale. Les forces des uns et des autres sont déployées et tous attendent le moindre signe d’agression pour aller dans une escalade militaire.
C’est là que déboulent Captain America et son collègue latino Falcon.
Se déployant dans un ballet aérien époustouflant, ils vont tout faire pour déjouer l’utilisation des pouvoirs du super vilain, ces fameuses pilules qui, en résonance avec certains sons, peuvent forcer un pilote d’avion de chasse américain à envoyer des missiles sur un porte avion japonais…
Il s’agit donc de jongler avec les forces des uns et des autres pour éviter que l’escalade militaire se mette en œuvre. Très franchement après les séquences de négociation lors de calls dans la maison blanche, cette séquence aérienne est une véritable leçon de diplomatie internationale.
Et on est donc très loin de l’origine même de Captain America dont le premier comic book a été mis en vente en décembre 1940 avec une couverture sur laquelle on voyait le héros frapper Adolf Hitler au visage.
Cette façon aérienne de jongler entre les missiles des uns et des autres en évitant toute escalade, n’est pas sans rappeler la façon dont certains pays (ou groupes de pays) marchent sur des œufs en s’engageant sans s'engager dans la guerre en Ukraine.
Bien sûr ce jonglage se fait malgré les injonctions du président belliqueux qui commence à voir rouge…
Aussi pour finir je voudrais finir avec les mots du réalisateurs Julius Onah de façon à les mettre en résonance avec d’autres mots de l’auteur Aldous Huxley.
“Si nous ne parvenons pas à voir le bien chez l’autre, nous avons déjà perdu la bataille”, déclare le jeune réalisateur d’origine nigériane. “Je pense que cela témoigne de l’obligation morale que nous avons tous les uns envers les autres, dans une société commune, même si nous voyons les choses différemment.”
Ce qui n’est pas si éloigné de certains mots qu’à pu écrire l’auteur britannique :
“C’est un peu gênant qu’après 45 ans de recherche et d’études, le meilleur conseil que je puisse donner aux gens soit d’être un peu plus gentils les uns envers les autres.”
“to be a little kinder to each other”
The best way to build a brave new world
18/02/2025 Fort Lauderdale