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Billet de blog 31 mai 2017

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Honneur et démission.

J’ai écouté attentivement la conférence de presse d’hier de Jean-Luc Mélenchon. La majorité des journalistes ont fait preuve d’une limitation intellectuelle dont on aimerait croire qu’elle est rare. Heureusement, une minorité, dont on espère qu’elle représente la population française de manière inversement proportionnelle, a posé quelques questions qui pouvaient intéresser la Nation.

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Une amie me fait parvenir le texte ci-dessous que j'ai hâte de vous faire partager:

J’ai écouté – et regardé – attentivement la conférence de presse d’hier de Jean-Luc Mélenchon : https://www.youtube.com/watch?v=rRF0pSJywC0
La majorité des journalistes ont fait preuve d’une limitation intellectuelle dont on aimerait croire qu’elle est rare.
Heureusement, une minorité, dont on espère qu’elle représente la population française de manière inversement proportionnelle, a posé quelques questions qui pouvaient intéresser la Nation.
Le proverbe dit qu’il ne faut pas regarder le doigt, mais la lune. Mais là, ce n’est même pas le doigt sur lequel se focalisent les media, j’ai l’impression qu’ils s’arrêtent au niveau du coude avec un cruel manque de vision, voire d’audition.
Ils sont venus avec une seule question en tête : « assassinat ? Vous avez dit assassinat ? »
Alors, Pépère (ce matin, j’ai décidé d’appeler Jean-Luc Mélenchon « pépère », c’est affectueux) s’énerve. On comprend, il s’épuise. Serait-ce le but recherché ?
Quand 5 personnes posent la même question consécutivement, c’est soit qu’ils sont malentendants et je suggère à notre ami de répondre la prochaine fois par le langage des signes dès la deuxième fois qu’on lui pose la même question ; soit une forme d’autisme sélectif, « je ne comprends que si on me parle à moi » ; soit du harcèlement. Appliquant de la présomption d’innocence, j’opte pour la stupidité.
Mais, à quelque chose bêtise est bonne.
A défaut de laisser parler du projet de société dont est porteuse la France insoumise, cet acharnement de meute permet jouer, par la force, un autre rôle, celui de lanceur d’alerte.
Rappeler les conditions dans lesquelles Remi Fraisse a été tué. Car il ne s’est pas suicidé en se faisant exploser avec une grenade. Ce n’est pas un accident d’un promeneur nocturne distrait qui serait entré dans un camp d’entrainement militaire.
Homicide ? Informons-nous pour comprendre de quoi il s’agit. https://reporterre.net/Mort-de-Remi-Fraisse-les-responsables-sont-a-Matignon-et-place-Beauvau Voilà déjà des questions qui ne sont peut-être pas l’intégralité du tableau, mais qui remettent les enjeux en perspective.
Lanceurs d’alerte, car si le Président actuel obtient la majorité à l’assemblée, tous ceux qui sont lucides, savent que d’autres enfants pourraient mourir pour leurs idées sur le bitume de France.
C’est cette conscience aiguë qui fait que je souhaite si ardemment une cohabitation avec la France insoumise. Pour que tous ces jeunes qui actuellement se sentent écrasés, puissent non seulement être entendus mais aussi devenir audibles dans notre République.
Que cette révolution à laquelle tant de français aspirent, car ils savent tous plus ou moins consciemment, que cela ne peut pas continuer comme cela et qu’Emmanuel Macron est une sorte de poudre de Perlimpinpin pour qui veut croire aux contes de fées ou de farfadet
Alors, c’est vrai, je suis assez âgée pour me souvenir de notre émotion citoyenne lorsque Malik Oussékine a été tué.
Il est vrai qu’à l’époque, le sens de l’honneur existait encore dans le gouvernement et que le ministre avait démissionné. Cela avait fait du bien car, si tout le monde savait que le ministre n’avait pas lui-même mis fin aux jours de cet enfant, c’était l’expression d’un sens ultime de la Responsabilité.
J’ai grandi, en Inde, avec cette sécurité morale de savoir que les dirigeants sont capables d’ « assumer » le symbole qu’ils représentent.
Lorsqu’un train déraillait d’une manière particulièrement tragique, le ministre des transports démissionnait. La peine que nous ressentions était en quelques sortes consolée. L’homme qui démissionnait était grandi et au-delà de lui nous l’étions tous car il assumait par là qu’il était le dépositaire d’une confiance commune.
Le droit de révocation des élus auquel les insoumis tiennent tant est un palliatif à la perte du sens de l’honneur.
Le problème en France, c’est que nous sommes « égotisés » en politique. Les journalistes adorent cette personnalisation diabolique qui nous ramène insidieusement à l’état de « sujets » d’une « majesté » qui ne dit même pas son nom.
Le summum de cet égotisation perverse et très dangereuse pour le contrat social est quand même l’actuel Président de la République qui a nommé « son » mouvement d’après les initiales de son propre nom. Il est sans doute sa propre lune, si on suit la direction que montre son doigt.
Lorsque Bernard Cazeneuve, qui aurait effectivement du démissionner, s’offusque ce jour, c’est parce qu’il se sent personnellement offensé et veut des excuses. C’est qu’il parle en tant qu’homme, au lieu de replacer la question dans un débat républicain de la notion de responsabilité, et au passage redire un mot quand au regret que cet enfant ait perdu la vie sur notre terre de France pour avoir cru si fort qu’il pourrait faire entendre son cri pour la nature en danger.
Alors, ce qui serait bon, comme pour toute sortie de «crise », ce serait que Bernard Cazeneuve exprime ses regrets pour n’avoir pas compris qu’il aurait du démissionner en assumant, au sens noble du terme, sa responsabilité « ès qualité » et non en tant qu’homme de perte de la vie de Rémi Fraisse.
Cela pourrait amener naturellement Jean-Luc Mélenchon à présenter des excuses pour le caractère blessant, à titre personnel, de ses propos.
Et nous, nous pourrions faire un double deuil : celui de cet enfant mort pour ses idées et celui de cette blessure au fond de nous de la perte du sens de l’honneur des représentants de notre République.
Yamouna
Le, 31 mai 2017

Merci à Yamouna de m'avoir autorisé à publier ce texte.

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