Un autre scénario
En 1993, la Gauche est à nouveau battue. Une deuxième cohabitation est imposée à Mitterrand. Se souvenant de sa déculottée de 1988, Chirac souhaitant se donner toutes les chances de gagner la présidentielle de 1995, préfère s’épargner et envoie son ami Balladur à Matignon. Le pitch, comme on dit de nos jours semble imparable. Édouard au charbon pendant que Jacques, débarrassé de ces basses contingences, consacre tout son temps à se préparer à son futur boulot « de dans deux ans » selon l’expression des hilarants guignols de l’info sur C+ qui n’était pas encore dans les mains de Bolloré, mais je digresse.
Comme chacun le sait, l’appétit vient en mangeant. Et Balladur se lance dans la bataille présidentielle, donné gagnant certifié sur facture. Il terminera troisième au premier tour, derrière son ami Chirac, Jospin gagnant la pole position. Chirac pliera le match au second tour. Tout le monde se souvient du « je vous demande d’arrêter » de Balladur à ses fans dont le vacarme l’empêchait de s’exprimer le soir de sa déroute, le 23 avril, devant les médias.
Avouez que ça serait désopilant si l’on assistait à un duel du même tonneau dans trois ans. La diablesse de Montretout avait prévu un tout autre synopsis. Le RN continuait tranquillement sa dédiabolisation jusqu’à la prochaine élection du monarque républicain qu’elle remporterait haut la main contre une Gauche immanquablement divisée, une Droite moribonde et une Macronie agonisante.
Et pour 2027, si on rejouait la comédie ?
Une victoire certaine aux législatives qui suivent et l’envoi de son petit padawan à Matignon, le petit doigt sur la couture du pantalon devant maîtresse Marine tenant la schlague. C’était ce qui devait se passer s’il n’y avait pas eu la dissolution surprise du 9 juin dernier, qui a saisi toute la classe politique, le RN ne l’ayant pas plus prévue que les autres, malgré toutes les rodomontades de Le Pen et de ses suppôts.
Je ne sais pas ce qui va sortir des urnes dimanche 7 juillet. D’ailleurs, personne ne le sait. Mais, dans l’hypothèse où le RN obtiendrait la majorité absolue au palais Bourbon ou bien une majorité relative importante, Bardella pourrait devenir 1er Ministre avec tous les pouvoirs que la Constitution lui donne. Pour rappel, cette dernière n’est vraiment appliquée, concernant la répartition des rôles entre l’Élysée et Matignon, qu’en période de cohabitation. Donc, Bardella serait le premier représentant de l’extrême-droite à exercer le pouvoir depuis 1945, alors qu’il était prévu que ce soit Marine le Pen, qui, au mieux, ne sera que présidente du groupe parlementaire RN à l’Assemblée nationale. Bardella sera seul à s’entretenir avec Macron le mercredi matin avant le conseil des ministres, sans être cornaqué par celle qu’il appelle « maman », qui devra patienter de longs mois pour son « boulot de dans trois ans ».
Si ce n’était un avenir sinistre qui se dessine pour la France, la situation serait très drôle. On sait que l’extrême-droite ne fait pas de cadeau, à commencer au sein de cette meute de canailles où l’on aime rien tant que de trancher les têtes qui dépassent.
Question du bac, ce qui tombe bien, puisque le futur éventuel impétrant n’a que ce diplôme en poche : qu’adviendrait-il si, tel un Balladur du « Monde d’avant », l’appétit en mangeant venait à l’apprenti jedi de pacotille devenu chef du gouvernement ?
Vous avez quatre heures !