Je suis retraité depuis peu, après 42 ans de boulot, dont 32 comme conseiller de l'ANPE, puis Pôle emploi, l'usine à gaz inventée par votre patron, Nicolas Sarkozy, mais aussi un an de service militaire (classe 73/02) payé 50 francs par mois et une cartouche de « Gauloise troupe. » J'ai déjà subi ce qui s'assimile à une contrainte qui m'a privé, pendant douze mois, de mes amis, de ma famille et de toute vie privée. Et voilà que vous voulez à nouveau me les briser menu ?
Je vous emmerde.
J'ai été militant associatif, politique et syndical, je garde ces engagements et les garderai tant que je le pourrai. Ma mise à la retraite ne m'empêche pas de rester un citoyen engagé. Et si je reste engagé, c'est parce que je l'ai décidé. Je n'ai pas besoin de votre injonction à « un service civique obligatoire pour les seniors » pour ce faire.
Je vous emmerde.
Et puis, parmi les seniors, il y en a qui n'ont pas envie de s'engager. Regarder « les feux de l'amour », s'occuper de son jardin, pour ceux qui ont la chance d'en avoir un, s'occuper de ses enfants, petits-enfants, se consacrer enfin à ces passions, de l'astronomie à la culture de ses rosiers, en passant par l'écriture, les mots-croisés, ou le sudoku, que l'on n'a pu assouvir pendant toutes ces années soumises au bon vouloir d'un patron, d'un petit chef, c'est le droit de chacun. Le droit de chacun de faire enfin ce qu'il veut, dans la mesure de ses moyens, de plus en plus réduits, suite aux réformes des retraites successives que vous avez soutenues, vu que vous et la clique à laquelle vous appartenez abhorrez les dépenses improductives et les oisifs en tous genres, sauf ceux de la classe que vous défendez. Le droit de chacun de pouvoir glander toute la sainte journée s'il le souhaite est imprescriptible.
Je vous emmerde.
Qui êtes vous, Rama Yade, pour donner des leçons ? La République française vous a permis, comme à tant d'autres des professionnels de la politique, de bénéficier de cet ascenseur social dont tant de nos compatriotes sont privés. Vous faites partie de cette catégorie privilégiée, auto-protégée de tous les aléas du quotidien. Vous n'êtes pas de cette masse de smicards entassée dans la ligne 1 du RER chaque matin ou qui vont pointer à Pôle emploi, à la CAF ou au centre communal d'action sociale. Vous ne faites même pas partie de ces élus des petites communes qui, en plus de leur boulot, se dévouent bénévolement pour leurs concitoyens, ni des ces milliers de militants des associations de solidarité qui compensent, chaque jour, gratuitement, les carences des politiques publiques que vous et vos complices êtes incapables de combler. Et vous voulez me forcer à travailler jusqu'à « la perte d'autonomie» ?
Je vous emmerde !
Je vous suggère un slogan pour votre groupuscule politique, si vous en avez créé un pour ratisser l'argent public : « métro, boulot, dodo, service civique, cimetière. »
Je vous emmerde !
Si jamais votre projet se concrétisait, ce qui n'est pas impossible, tant la haine de tout ces improductifs qui vous insupportent – retraités, chômeurs, bénéficiaires de la solidarité en tous genres - est répandue par la propagande incessante de vos valets des médias, je vous informe que vos émissaires qui viendraient me contraindre à quoique ce soit seront accueillis à coups de chevrotine.
Je vous prie d'agréer, Madame la sous-ministre, mes « je vous emmerde » les moins respectueux.