Comme je suis Dunkerquois d'origine – je le resterai jusqu'au bout des ongles, même si j'habite désormais en Normandie - mes voisins et amis sont Belges, Flamands, de surcroît. Et depuis plus de 50 ans (je ne suis pas le perdreau de l'année), je fais comme beaucoup de Français frontaliers : je me balade avec amour le long de cette côte qui, de Calais à Knokke le Zout, en passant par Dunkerque, Bray-Dunes, Adinkerke et De Panne, m'offre cette splendeur partagée entre Belges et Français : cette mer du nord, dont les somptueuses lumières me fascinent.
On dit que la France est un pays latin. Ce n'est pas faux. Mais c'est oublier ses frontières du nord et de l'est, ses Flamands francophones ou flamingants, ses Alsaciens, Lorrains, Francs-Comtois ou Bourguignons. C'est nier les essentiels apports germaniques à notre langue française qui fait de la France un pays singulier, entre le sud et le nord. Langues d'Oc et d'Oïl, mariage de raison, certes, mais si fructueux.
Lorsqu'on a la chance d'être frontalier, on ne vit pas l'Europe comme quelqu'un qui ne l'est pas. On cohabite avec des gens qui ont une autre nationalité que la nôtre. Qui ne parlent pas la même langue que la nôtre, mais, qui vivent à quelques kilomètres de chez nous. On apprend à se connaître, même si ce n'est pas toujours simple. C'est parce que je côtoie ces Flamands belges depuis si longtemps que je me sens européen.
J'ai eu la chance de lier amitié avec quelques-uns d'entre-eux, pour des raisons professionnelles et personnelles. À chaque fois, nous nous sommes trouvés sans problème. J'imagine ou j'espère que c'est la même chose pour les Français frontaliers de l'Espagne, de l'Italie, de l'Allemagne ou de la Suisse.
C'est de cette Europe là dont je rêve. Pas celle des banques et des crapules qui spéculent et qui prétendent nous gouverner. Je rêve d'une Europe de l'apéro, de l'amitié et de la rigolade, de Londres à Berlin – merci Grand Jacques ! - en passant par Toulouse, Madrid, Bruxelles, Prague et bien d'autres lieux de notre histoire commune.