Ces temps derniers, les maquignons qui nous gouvernent, ont souvent parlé de "l'Identité Nationale". Je me suis alors interrogé sur la place que tient la "Nation"dans ce que je suis, ou plutôt me sens être… Je dois dire que je n'ai pas trouvé, à propos de la nation, grand-chose de vrai… dans ce que je perçois comme fondements de mon identité… Qui suis-je ? Dans le miroir d'un "songe d'hiver", je tente de saisir quelques reflets authentiques d'une "identité" qui se doit de conserver son i minuscule…
Songe d’hiver
Dans un songe d’hiver, j’habite chaque jour un vieux village inhabité…
L’uniformité grise des espaces, crée le sens juste nécessaire
au déroulement du temps réglementaire, monocorde.
De temps à autre, l’étincelle d’un regard, annonce qu’une vie vive
existe peut-être… Un instant d’espoir inondé d’évidence heureuse
estompe les rituels robotiques : « bonjour comment ça va ?…
Il fait beau aujourd’hui… » qui tarissent et dépérissent l’étendue,
un instant avivée par le rayonnement d’une existence…
Dans un songe d’hiver, j’habite le foyer de la horde familiale…
La mortification accablante du devoir, de la tradition, des habitudes,
de la culpabilité, d’obligations à n’en plus finir, d’arriérés insolvables
puisqu’ils touchent à l’inaccessible et lancinante dette de la vie.
Avec, de temps à autre, un transport enchanté par la continuité
de la horde qui me prodigue une toute puissance d’immortalité…
Marasmes, dégradations, décrépitudes… fomentés par la tribu…
envolés dans un flirt indicible avec l’infini de l’éternité de la vie.
Dans un songe d’hiver, j’habite l’atelier des compagnons d’autrefois,
de ceux avec qui nous devions refaire le monde, changer le sens de la vie,
le sens du travail… rompre avec le pain gagné à la sueur amère du front…
Nous n’avons rompu avec rien, sinon renforcé les rivalités dans la meute…
Hormis quelques oasis de relations accueillantes, de vitalités enthousiastes,
la raison des plus en plus forts s’oppose aux autres, de plus en plus faibles
qui cachent leur déchéance dans les vagues abris des terrains vagues…
Impossible partage… Envolée l’utopie d’uns humanité solidaire, universelle.
Dans un songe d’hiver, j’habite le cénacle de la secte, de clan, du parti…
de ceux qui gambergent comme moi, qui croient comme moi,
qui rêvent comme moi… À moins que, devenant comme eux, je ne me sois
dépossédé de moi, aliéné par leur logique, leurs croyances, leurs mythes…
Prison aux barreaux impalpables parfois rigides, parfois souples et fuyants
qui assurent au quotidien ma sécurité de raison, ma vérité de pensée !
Je me persuade alors de la vacuité des autres bien-pensants… minables !
Se dilate alors mon thorax submergé par ce sentiment de tutoyer la vérité !
Dans un songe d’hiver, je tente, vainement, de m’habiter moi-même…
Non, monsieur le philosophe : Je n’est pas un autre ! Je est je…
Ici, maintenant, entre les infinis du temps et de l’espace, substance
de l’être jaillissant du magma inconscient… fugace chose perdue…
obscurité sans fond que seules des étoiles lointaines et inaccessibles
sortent du néant, comme unique espoir de victoire sur l’infini de la mort…
Étoile d’un regard, étoiles d’une lignée, étoile d’une main tendue,
étoiles de rêves partagés… Étincelles de vie dans le néant de la nuit…