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Billet de blog 11 août 2014

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Qu’en est-il de la poésie dans la France actuelle?

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Au rythme actuel, il n’est pas acquis que le 21e siècle soit en poésie aussi brillant que les deux précédents, 20e, 19e siècles  d’une extraordinaire fécondité. Mais nous n’en sommes à peine qu’aux quinze premières années ; aussi bien laissons à ceux qui suivent, la liberté d’en juger lorsque l’heure lointaine aura sonné. Comme beaucoup de jeunes gens je fus un jeune poète publiant, sans plus. Et il semblerait à l’heure actuelle que la poésie ne fait pas florès. Ayant repéré, par hasard, sur les rayons d’une bonne librairie de province, un essai* sur le sujet de Jean-Luc Maxence, poursuivant la tradition presque centenaire de  celui qui ressuscita l’édition de poésie à la Libération, Pierre Seghers, en un moment de particulière floraison. Notons également qu’un certain nombre de médias actuels possèdent une rubrique régulière de poésie, plus ou moins conséquente.  

D’emblée, Jean-Luc Maxence s’en prend à ce qu’il qualifie de « poésie blanche » citant Michel Deguy proche de Jacques Derrida, tout un programme, autant dire une certaine illisibilité , du jargon philosophique, de l’abstrait bref tout ce qui rebute le public.

Allons-nous assister à des querelles de clochers ? Ouf !  pas du tout . J.-L.  Maxence  s’en tient à sa tâche ; un bilan sérieux, « objectif » de différentes tendances de poésie actuelle, évidemment parfois à cheval sur la fin du 20e siècle. Profusion de noms, connus ou non et, alors, surgit tout un univers qui vit fort bien sa vie, à l’écart de l’habituel showbiz littéraire de l’époque ; impressionnante galerie, éditeurs « lilliputiens », aux noms plus que mystérieux, passeurs, critiques spécialisés, titres singuliers, renouvellement parfois radical des structures : slam (textes récités, dits en public) et rap (rythme et poésie).

Ce petit volume est une mine  dont on conseille la lecture, voire le feuilletage. Certes, J.-L. Maxence  aura des adversaires, des jaloux, des envieux mais nous, lecteur on s’en fout !

 L’Ecole de Rochefort, apparue au 20e siècle  sous le parrainage de René Guy Cadou, un grand, trop rapidement disparu, sa femme, Hélène, a poursuivi le projet avec la participation de Marcel Béalu, Michel Manoll, Jean Rousselot l’un des dignitaires du cénacle L’auteur établit ici un lien avec l’apparition et le développement de l’ « écologie ». Poésie pour vivre avec Alain Suied.

-       Source mystique, de longue tradition, Jean Grosjean (J.-L. Maxence est son biographe). Patrick Kéchichian, ancien journaliste ainsi que Jean Mambrino.

-       A l’opposé les héritiers d’André Breton «  pour tenter de garder l’incendie allumé par les fondateurs  et de la transmettre aux plus audacieux ». Et quel incendie !

-       Alain Jouffroy, Marc Alyn qui a découvert Bernard  Noel, Jacques Reda, également spécialiste de Jazz.

La poésie dite féminine. L’auteur n’hésite pas à endosser le propos de Marie-Claire Bancquart (famille d’artistes) : « L’écriture féminine existe-t-elle ? ». A lire Andrée Chédid, par ailleurs romancière, également famille d’artistes et de citer Vénus Khoury Gata, l’Anthologie de Régine Deforges ou encore Sylvie Baron Supervielle. (Marov)

 Francophones et Francophiles. Le grand écrivain suisse Philippe Jaccotet, mêlé à diverses activités artistiques ; Alain Jouffroy. D’autres viennent du Moyen-Orient, Salah Stetié, véritable savant, Tahar Ben Jelloun (Maroc) également rendu célèbre par ses romans, Abdellatif Laâbi qui connut Georges Schéhadé, découvert et joué naguère par J.-L. Barrault.

Idem pour la négritude, Léopold Sédar Senghor, Aimé Césaire, précurseurs, visionnaires que suivent Edouard Glissant il y a peu disparu, et Jean Mettelus.

Rebelles d’après 68 et Militants. Initialement ces poètes ont été marqués par la « beat generation » US  puis par les guerres coloniales françaises, Patrice Delbourg, également journaliste édité par « Le Castor Astral ». Du côté de l’engagement politique Jean Sénac, André Laude, Francis Combes ; le poète haïtien René Depestre.

Il faut également compter avec les « Etonnants Voyageurs » depuis le coup d’envoi inoubliable de Blaise Cendrars. Suivent André Velter qui a collaboré avec Bartabas, et Gil Gouanard un ami du trop rare René Char.

Performeurs et diseurs de rue : conclusion.

Le poète Lucien Becker proclame : « La poésie est notre dernière cigarette » en somme juste avant la fin ! En garde donc : Jean l’Anselme ou encore le belge Jean-Pierre Verheggen, collaborateur de la revue TXT au temps de l’avant-garde radicale, même s’il n’est pas du slam , ni du rap, dégage une grande puissance orale, c’est la tradition des « lecteurs performeurs ». Quant au slam et au rap ils appartiennent à la poésie orale et spontanée. Al Malik, slameur et rapeur. Du coup on débouche sur les poètes connectés : sites, blogs, numérique.

Tout cela, toute cette aventure « miniature », moins discrète qu’on ne le croit, s’avère sacrément ambitieuse. Internet et Gutenberg, numérique ou papier : donner un sens au monde actuel. Ce regard doit être et sera pluriel. « Un nouveau monde de signes et d’émerveillement se lève. » Et cela bien au-delà de la manifestation du « Printemps des Poètes ».

Alors comment prédire les survivants de la postérité ? 

Claude Glayman

  • * Jean-Luc Maxence : «  Au tournant du siècle : regard critique sur la poésie française contemporaine. Seghers, 173 p ; 2014, 17 euros.
  • Lire certains de ces poètes dans diverses Anthologies Seghers  et dans « Anthologie de la poésie française du XXe siècle ». Poésie Gallimard, 684 p. 8,80 Euros, 2005 ; édition de Jean-Baptiste Para.

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