Doublement de Pologne, le compositeur Karol Szymanovsli (1882/1937)et le metteur en scène, Krysztof Warlikowski qui, depuis 2009, date de création à Bastille celle de Gérard Mortier), où nous l’avions vu/entendu. Un rien provocateur, du moins pour la Pologne juste sortie du « réalisme socialiste ». « Le Roi Roger », un énigmatique étranger, un berger très beau de sa personne, met une communauté royale à l’épreuve. Son traitement scénique nous a fait irrésistiblement pensé au film de Peir Paolo Pasolini, « Théorème ».
A note avis l’erreur de la conception tient à la transposition actuelle d’une dramaturgie qui se déroule essentiellement dans un lointain passé. Un royaume, une communauté celle du Roi Roger et de son épouse Roxana, un bon peuple, ici on doit parler d’une Cour illustrée par les bijoux et le jeu appuyé des choristes (la foule). Un étalage qui renvoie aux actualités de Buckingam, par exemple.
K.Szymanowski, son biographe Didier van Moere l’explique savamment dans sa biographie très complète (Fayard, 2008, 695p. 27 E.) : le compositeur a été très préoccupé par l’élaboration de son opéra, en particulier dan la mesure où il s’agit volontiers d’une confession personnelle sur les choix intimes de l’artiste. Le berger qui perturbe cette société hostile à l’exception de Roxana optant d’emblée en faveur de la beauté, de la liberté totale, notamment dans l’amour, sous l’œil goguenard d’Edrisi, le conseiller du monarque.Ne glissons pas au passéïsme, mais retenons que l’arbre généalogique d’une œuvre doit guider sa création et ses recréations. Mais rien n’interdit de s’orienter du côté d’une actualité de ce « Roi Roger ». A condition de ne pas gommer l’esthétique d’un artiste, en remplaçant, par exemple, le soleil dans la nature par de grosse lettres d’imprimerie signifiant le mot « sun » sur une façade de type aérogare ou d’une gare. Aux images télé s’ajoutent celles toutes personnelles (Stéphane Metge), personnages filmé à l’envers, tête en bas, profondeur de champs comme chez Orson Welles mais sans sa marque, le réalisateur/cadreur se prend pour Jean-Luc Godart sans l’être pour autant. On comprendra la signification mais encore faut-il l’adéquation. D’autant que musicalement, sous l’influence de la musique orientale, arabe, mais peu de la musique française, d’ordinaire revendiquée par les créateurs de l’Europe de l’Est ( cf. l’Ecole Musicale Polonaise d’après 1945, Witold Lutoslavski, Penderecki, ). N’oublions pas l’occupation ottomane d’une partie de ces peuples.
Le « blasphémateur », Eric Cutler (cad le berger, un rie infantile), notons l’excellente Roxana d’Olga Pasichnyk aux arias obsessionnelles, aux côtés du Roi très actif dan sa gestuelle et qui finit par basculer vers ce qui l’attire, Marius Kwiecien. Les Chœurs et l’Orchestre étaient menés par Kasuchi Ono avec vigueur et clarté bien que le polonais ne nous soit pas une langue familière.
Claude Glayman.
Mezzo Live Hd 12 septembre 2009.
Il existe plusieurs enregistrements discographiques du « Roi Roger ».