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Billet de blog 22 septembre 2016

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Laba Laba, reine de Tirta Gangga

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Depuis une quinzaine de jours, elle attire tous les regards, toutes les caméras, tous les smartphones du matin au soir. Mais aussi comment résister à tant d’élégance, à tant de prestance, à la finesse de son corps sans fin, au choix harmonieux de sa robe noire – un noir brillant, profond – cerclée de jaune ?

En grande stratège, elle a parfaitement choisi la scène où elle se produit, sur l’un des chemins faisant le tour du palais royal aquatique de Tirta Gangga, à l’est de l’île des dieux. Mieux : elle se pavane entre gingembre blanc et frangipanier jaune qui sentent tous deux si bon.

Et elle surplombe le plus grand des deux bassins de nage d’eau douce, une eau à peine sortie de la source bénéfique qui inspira jadis les architectes de ce lieu magique offert aux rois et princes de Karangasem, ce petit royaume de rêve.

Repérée par les guides locaux, sacrément fûtés, lesquels se font un plaisir de la présenter à leurs hôtes d’un instant, les uns en français, les seconds en anglais, les troisième en allemand, et de la nommer avec gourmandise, « Laba Laba », elle est indéniablement devenue la reine de ce domaine, que je tiens personnellement pour le plus beau de Bali. Mais ne le répétez pas.

"Bala Bala, Bala Bala", cette onomatopée voluptueuse, ce nom magique a vite fait le tour de ce jardin enchanteur, glissant entre les bougainvilliers divinement fleuris, frôlant les vénérables carpes koi, enveloppant le buisson d'hibiscus à deux pas de là, de La Ba. 

Devant tant de visiteurs venant parfois la frôler à quelques centimètres, avec autant d’irrespect que de grossièreté, elle aurait pu disparaître, se cacher dans la végétation avoisinante, monter dans le grand banyan dont l’ombre couvre le temple hindouiste du palais…Elle aurait pu aussi, avouons-le, être emportée par les trombes d'eau de ces dernières nuits, annonciatrices de la saison des pluie, ou se faire supplanter par les grandes fêtes hindouistes que sont Galugan et Kuningan, ou l'Aid El Kebir locale. 

Mais non, elle tient bon, elle s'accroche, préférant à l’évidence les feux de la rampe, trop heureuse de tenir son rang. Et quel rang! 

Parfois, elle assiste à des rencontres polyphoniques où se mêlent plusieurs langues et des « Oh », des « Ah », des « Gosh ! » des « Adu ! », « Ayo ! » et aussi des « T’as vu chérie ? » « Look Dear, look ! » Qui sait, une idylle se nouera-t-elle peut-être à moins d’un mètre de Laba Laba ?

Et puis, osons le dire au risque de démystifier cette mystérieuse apparition, elle provoque parfois certains cris de frayeur aigus poussés par la gente féminine.

Alors, sur le qui-vive, elle s’immobilise, se fait discrète, avant de reprendre son travail après le départ des derniers visiteurs. Car, oui, elle travaille et ne cesse, depuis deux semaines, de tisser une 

Illustration 1
Laba Laba, reine de Tirta Gangga © Claude Hudelot

toile de plus en plus dense entre les deux arbres, Laba Laba l’Araignée, reine de Tirta Gangga.

PS. Laba Laba et ses huit pattes ne mesure guère plus d’une quinzaine de centimètres, vingt tout au plus. La belle affaire ! 

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