Jeudi 26 novembre
Chaque jour, dans les journaux, les visages les noms de ceux qui sont morts.
Dans le RER un jeune homme, un beau "black" comme on dit en France, en tenue de camouflage avec capuche regarde avec insistance les gens pour qu'on le regarde.
Et plus personne ne sait que penser.
Et plus personne n'a envie de dire quoi que ce soit.
Et plus personne ne veut le regarder.
Et plus personne ne veut en venir, revenir à ça, la guerre, la violence, l'armée, la terreur.
La peur.
La peur se niche dans les détails
Le sentiment de peur revient vite
L'action terroriste instaure une peur durable
On n'a pas peur parce qu'on n'a pas le choix, il faut bien aller travailler et emmener les petits à l'école
S'habituer à vivre avec la peur c'est peut être glaçant mais c'est le signe de la maturité d'une société
Structurer la peur en haine, c'est avoir moins peur
La peur est là, mais il faut avancer
Que la peur s'insinue en chacun d'entre nous c'est ce que veulent les auteurs des attentats
Qu'elle brûle comme de l'acide nos valeurs et nos espoirs
Personne n'avait plus peur pour soi mais pour ceux du Bataclan
Voilà mon islam, ouvrir une porte à des gens qui ont peur
Les dérives à l'extrême-droite - Marion Maréchal-Le Pen :
"Les musulmans ne peuvent pas avoir exactement le même rang que les catholiques."
Tu songes au retour de l'esclavagisme, Marion ? Tu as encore du travail Marine pour tenir tes troupes. A moins que tu ne sois contente que certains disent tout haut ce que tu penses tout bas ? Tu penses ça tout bas ?
Vendredi 27 novembre
Nous allons au théâtre, voir une exposition. La beauté, la joie même. Et cependant, l'impossibilité de se réjouir complètement.
Quelque chose nous a été arraché.
Nous sommes amputés.
Nous sommes des survivants.
Survivre, ce n'est pas vivre tout à fait.
Samedi 28 novembre
Est-ce qu'écrire, ce serait sans cesse espérer, faire revenir ce lieu, "le "Weltinnenraum" de Rilke, l'espace (imaginaire ?) où il n'y aurait plus de mur entre le coeur et le monde ?" comme l'écrit Philippe Jaccottet.
Quelques phrases d'écrivains, de poètes, de philosophes pour faire face.
Pour vivre la vie même.
Et pour commencer, avec la COP21 qui s'ouvre à Paris.
Dominique Bourg : "Après ces attentats elle prend aussi valeur de symbole. On a le choix entre une humanité qui veut s'unir, qui veut penser à l'avenir, qui veut être lucide, intelligente, qui sait ce que science veut dire, et une humanité régressive haineuse, stupide, et sans aucune spiritualité. La spiritualité ce n'est pas la religion, il nous faut redéfinir les idéaux de demain."
"La religion est comme un lierre grimpant, elle organise l'espace, le temps, la pensée. Face à l'islamisme il y a le vide."
Boualem Sansal, il y a quelques semaines
"Maintenant cela fleurit
en pauvre lieu"
Hölderlin
"Quelques phrases, quelques vers, et l'espace de votre coeur s'est encore une fois agrandi"
Philippe Jaccottet
"Traverser le champ de la nuit"
Jean Paulhan
"Les paroles sont les outils de ce monde"
Isaac le Syrien
"Nous nous tenons côte à côte, en étrangers qui ne parlent pas la même langue mais qui éprouvent l'un pour l'autre une profonde sympathie"
Pierre-Albert Jourdan
"Les autres ont ce visage que personne ne voit"
Jean-Luc Sarré
'Dans le vent, la terre
Fait des comptes, rabâche
Ses soucis de terre"
Jean Guillevic
"Les dieux, quels dieux, à moins de ton rire insolite,
à la croisée des chemins vicinaux, ton rire"
Jean Grosjean
"Destin veut dire ceci : être en face,
Rien d'autre que cela, toujours en face"
Rainer Marie Rilke – Huitième élégie de Duino