Selon le média international de la République Fédérale d'Allemagne, Deutsche Welle, la sécurité d'Israël a été érigée en raison d'Etat par Angela Merkel et son successeur. Il n'est donc pas entièrement surprenant que l'actuel président du Comité International Olympique et d'autres citoyens allemands membres de son entourage professionnel résistent aux demandes d'exclusion d'un État dont le système ségrégationniste et annexionniste est condamné par la Cour Internationale de Justice. Nombreux, certainement, sont leurs compatriotes qui ne partagent pas de telles erreurs, mais l'ascension jusqu'aux sommets ne leur est pas facilitée.
Cette Staatsräson plongerait ses racines, nous est-il expliqué, dans la culpabilité de l'Allemagne en tant que pays dont un gouvernement a planifié un génocide des Juifs européens. Il a été suffisamment objecté qu'avoir perpétré un génocide et en réalité quatre si l'on n'oublie pas les Herreros, les Namas et les Tziganes, ne saurait justifier que l'on se rende complice d'un autre crime de masse. Il est difficile de prétendre expier le crime par le crime. Et la complicité de génocide est une violation du droit des gens punissable en vertu de l'article III de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, ratifiée par l'Allemagne. Cette faiblesse morale et légale explique mieux le recours à la raison d'Etat, concept intimidant au premier abord.
A défaut de se plonger dans l'ouvrage magistral de Friedrich Meinecke, L'idée de raison d'Etat dans l'histoire contemporaine, les lecteurs des Trois Mousquetaires se souviendront du lugubre blanc-seing remis par Richelieu à l'une de ses créatures : "C'est par mon ordre et pour le bien de l'Etat que le porteur du présent a fait ce qu'il a fait"_ ce ministre étant, selon la philosophe Simone Weil, grand fossoyeur des libertés héritées de l'époque médiévale. La raison d'Etat est à prendre pour ce qu'elle est, un camouflage parce qu'en l'espèce le militarisme allemand se dissimule derrière le militarisme israélien et se projette en lui de manière proactive, et un camouflet parce qu'elle insulte la raison humaine qui fonde toute forme de démocratie: l'invoquer, c'est déjà pratiquer le coup d'État.
Le soutien allemand au projet sioniste ne date pas d'aujourdhui. Il s'agit d'un plan colonial autrefois délégué par le Kaiser à sa bourgeoisie impériale juive. Pour faire pièce aux visées concurrentes sur les dépouilles ottomanes il fallait peupler de sujets germanisés la terre triplement sainte et proche des champs pétrolifères en y attirant, par un programme à la fois messianique et rémunérateur, des prolétaires est-européens. Cette entreprise perdure tandis que la "combinaison coupable" militaro-industrielle, responsable des deux guerres mondiales selon Thomas Mann, est restée aux affaires. Ainsi le 12 juillet 2024, le ministère de la Défense allemand a publié des "Informations complémentaires sur les lignes directrices pour la compréhension et le maintien des traditions au sein de la Bundeswehr». Ce document fait référence aux officiers supérieurs de la Wehrmacht comme «créateurs d’identité» pour l'actuelle armée allemande
La continuité est assumée.