Evêque de Toulouse
24 rue Perchepinte
31000 Toulouse
TOULOUSE LE, 16 novembre 2012
Monsieur,
(je ne vous appelle pas « Monseigneur » car en 1789, il y a eu une révolution dite française qui a découvert et mis en application le principe de « laïcité »)
Sur le site du diocèse (http://toulouse.catholique.fr/Comment-agir) , vous avez cru utile de mettre à la disposition de vos paroissiens une lettre-type à adresser aux élus de la république pour les mettre en garde contre le projet de loi présenté par Mme Madame Christiane Taubira, Garde des sceaux, relatif à l'ouverture au mariage et à l'adoption pour les personnes de même sexe.
Je vous félicite tout d’abord pour le ton policé de votre lettre-type, pour une fois un homme d’église n’accuse pas ce projet de préparer la polygamie ou de faciliter la pédophilie.
Même si je ne suis pas un élu, je me permets de vous répondre en ma qualité de citoyen de la République.
Le ton général de votre propos est de réclamer un débat car « S'il est adopté, le projet de texte présenté par le ministre de la Justice aboutira, en effet, à réécrire de nombreux articles du Code civil ».
Je vous rassure quand une loi modifie le code civil (ou le code de commerce ou le code pénal), elle réécrit souvent des pans entiers dudit code. Tenez par exemple, en matière de procédure pénale au cours de la dernière décennie, on ne compte plus les modifications intempestives. Notez que ces modifications étaient importantes puisqu’elles touchaient aux libertés publiques.
Pour ce qui est des débats, je vous invite à suivre ceux qui ont commencé devant la Commission des lois de l’Assemblée nationale. Ils sont d’une grande teneur scientifique et morale, on laisse le temps aux participants d’exposer et de développer leurs idées, loin des diatribes ou des formules toute faites entendues ici ou là et surtout à la télévision.
Dans votre lettre, vous ajoutez qu’ « Au-delà des seuls aspects juridiques, ce sujet concerne l'avenir de notre société ». Cette phrase ne correspond pas à la réalité. En effet, la loi proposée par Mme TAUBIRA concerne hic et nunc, des couples, des enfants et des familles, qui attendent d’ores et déjà tout à la fois une reconnaissance et une protection.
Mais, vous avez raison l’adoption de cette loi concerne également l’avenir de notre société qui pourrait évoluer vers plus de justice et d’égalité.
Vous insistez ensuite lourdement en indiquant que « La compréhension du couple humain, de la famille et des droits de l'enfant, à commencer par celui d'être élevé par un père et une mère, appellent une réflexion approfondie ». Encore une fois, cette réflexion a eu lieu ou est en cours. Mais surtout, vous biaisez le débat en tentant d’imposer comme un droit de l’enfant le fait d’être elevé par un père et une mère.
Toutes les familles monoparentales apprécieront cette exclusion.
Le seul intérêt de l’enfant est d’être accueilli dans une famille aimante et protectrice. L’orientation sexuelle des parents est sans importance. Je ne vous ferai pas l’injure de vous rappeler les nombreux faits divers mettant en cause des parents « hétérosexuels » qui font subir des sévices odieux à leurs enfants. Je n’en tire aucun argument ou corrélation entre l’orientation sexuelle et ce comportement répréhensible. Il y a des brebis galeuses partout et ce n’est pas l’Eglise qui protège certains de siens au-delà du raisonnable et du tolérable qui peut me dire le contraire.
Enfin, dans votre lettre vous insistez sur le fait que cette loi ne doit pas être examinée dans la « précipitation ». Mais cela fait plus de 10 ans, depuis le PACS, que l’on en parle, que l’on étudie, que l’on compare les avantages et les inconvénients.
Mais si vous voulez en débattre, débattons ! mais à une condition, pouvez-vous en préalable répondre à cette question :
Considérez une lesbienne, un gay, un(e) bi(e) ou un(e) trans comme des être humains ? comme des citoyens de la République ?
Croyez Monsieur, en l’expression de mes sentiments distingués
Citoyen Lèguevaques.