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Billet de blog 25 août 2021

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Revers majeur pour Uber en Californie

Par sa décision du 20 août 2021, la Cour suprême de Californie a jugé inconstitutionnelle une proposition de loi issue d’un référendum remettant en cause une loi adoptée par les parlementaires californiens.

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Illustration 1

Pour mieux comprendre, retour en arrière - 2019, l’Etat de Californie a voté la loi « AB5 » qui impose aux entreprises de la « gig economy »  (économie à la tâche) (UBER, LYFT…) de considérer leurs travailleurs indépendants comme des salariés, et de leur accorder des avantages sociaux comme une assurance chômage et maladie.

 Une telle avancée sociale pour les travailleurs constituait une remise en cause pure et simple du model économique d’UBER et consorts. Inacceptable pour les investisseurs qui soutiennent à bout de bras UBER depuis tant d’années[1].

Une campagne référendaire de 205 millions de dollars !

Mécontent, Lyft et Uber ont refusé de se conformer à la loi AB5 et ont exprimé le désir de garder les chauffeurs classés comme entrepreneurs indépendants. Comme ils n’avaient pas pu impressionner ou influencer les parlementaires, ils ont prétendu avoir recours à la démocratie directe.

 Une proposition de loi est soumise au vote populaire dans le cadre d’un référendum d’initiative populaire.

Pour soutenir cette action, les géants de la gig economy financent la campagne à hauteur de 205 millions de dollars. Cette opération de lobbying en fait la mesure de vote la plus chère de l’histoire de la Californie

Pour contourner le parlement, recours au référendum via la proposition 22

Organisé le 3 novembre 2020, le référendum prévoyait, entre autres, que les travailleurs de ces plateformes de mise en relation (mais d’exploitation) ne pouvaient pas se voir reconnaitre le statut protecteur de salariés.

Grace à l’immense campagne de (dés)informations, 58% des votants approuvèrent ce texte qui venait purement et simplement annulé les dispositions protectrices de loiAB-5..

Victoire démocratique ? pas si sûr … La démocratie ne se limite pas juste à un vote.

2021 – La Cour suprême californienne déclare la Proposition 22 inconstitutionnelle !

 La cour a estimé que cette disposition était inconstitutionnelle pour 3 raisons :

  • Il limite le pouvoir des prochaines législatures à définir les travailleurs à la tâche comme sujet au système de compensations légaux. Dans son rôle de législation, les assemblées de Californie ont le pouvoir d’inclure ou d’exclure travailleurs d’un système de compensation. Le fait d’interdire cette capacité au parlement est inconstitutionnel;
  • La proposition était accompagnée d’une disposition limitant le droit des assemblées à amender cette disposition. Ces limitations étaient trop strictes et rendaient impossible tout amendement (notamment en raison d’une majorité qualifiée aux 7/8èmes) ;
  • Les propositions de référendum doivent être limitées à un seul sujet. Pour contrôler cela, la Cour regarde si les dispositions suivent un objectif commun. C’est-à-dire si les différentes dispositions sont suffisamment liées à un thème commun, un objectif ou un sujet.Le thème commun, l’objectif ou le sujet était soi-disant de « protéger l’opportunité des californiens à conduire leurs voitures de manière contractuellement indépendante, de leur apporter un minimum de garanties, et de donner aux consommateurs une protection minimum et des standards de sécurité au public ».
  • Si le sujet est lié au reste de la Proposition 22, l’objectif n’a rien à voir. Une interdiction de loi autorisant la négociation collective par les conducteurs ne fait ni la promotion du droit à travailler en tant que contractant indépendant, ni ne fournit aux travailleurs une sécurité minimale au travail.

La Cour en conclut sans surprise que :« Cela ne fait que satisfaire les intérêts économiques d’une entreprise numérique en lui garantissant une main d’œuvre divisé, non syndiqué, ce qui n’apparaît pas comme un but de cette loi »

Le juge décide que la disposition en question est inconstitutionnelle. De plus, elle est « inséparable du reste du texte », ce qui rend la proposition 22 dans son ensemble inapplicable.

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Christophe Lèguevaques, Robin Galy, Martin Tinelli

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[1]           « le roi du VTC, qui n’a jamais été rentable depuis sa création, il y a onze ans, a de nouveau perdu des sommes phénoménales (6,8 milliards de dollars) en 2020 ».- https://www.lefigaro.fr/societes/uber-entretient-l-espoir-malgre-des-pertes-abyssales-20210211

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