Agrandissement : Illustration 1
John Dimitri Negroponte, ancien ambassadeur des Etats-Unis au Mexique et ancien directeur de la CIA, a été l’invité le 16 novembre dernier de la célèbre journaliste mexicaine Carmen Aristegui sur CNN español.
Au cours de l’émission, la question centrale de la présentatrice a porté sur l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), qui unit depuis 1994 le Canada, les Etats-Unis et le Mexique dans une zone de libre-échange régionale. D’après une information obtenue par CNN, le futur président étasunien est déterminé à entamer la renégociation de ce traité au jour un de sa présidence. Cela est inquiétant, mais cela ne signifie pas que M. Trump ne saura pas raison garder, nous dit John Negroponte.
Que va-t-il se passer avec l’ALENA ?
La question de Carmen Aristegui est large : la journaliste veut savoir ce qu’il va advenir du traité de libre-échange nord-américain. Pour M. Negroponte, c’est effectivement « une très bonne question ».
D’abord, le haut-fonctionnaire entend bien donner tort au protectionnisme jugé irrationnel de Donald Trump. Le traité, d’après le diplomate, aurait permis de « quadrupler les échanges » et de « créer de l’emploi des deux côtés de la frontière ». Il aurait « freiné les délocalisations en Chine et préservé l’investissement en Amérique du nord ».
« Pourvu qu’il y ait une réunion entre Trump et Peña Nieto »
Pour M. Negroponte, le président élu des Etats-Unis et le président en exercice du Mexique doivent se voir le plus tôt possible :
« Il faudra bien expliquer au président élu Trump ce que signifie réellement le traité. Et pourvu que ce processus d’information [sic] puisse commence au plus vite sous la forme d’une réunion entre le président élu et le président mexicain Enrique Peña Nieto ».
Le haut-fonctionnaire se répète : « Pourvu qu’entre le moment présent et le 20 janvier, il y ait une réunion entre Trump et Peña Nieto ».
Le traité ALENA ne sera pas abandonné
M. Negroponte, au demeurant, juge peu probable un « abandon » du traité. En effet, il existerait, si l'on en croit ce diplomate influent à Washington, des réalités avec lequel le président élu des Etats-Unis se trouverait obligé de composer, tôt ou tard.
« L’administration Trump va découvrir que l’intégration des productions manufacturières est très avancée entre le Mexique, les Etats-Unis et le Canada. […] Surtout en ce qui concerne la production automobile ».
Un retrait impossible ?
Il n’y a pas d’alternative. Le traité, à en croire M. Negroponte, ne peut que rester en vigueur. Et les six mois ne négociations tripartites nécessaires à sa dénonciation le protègent :
« Le président des Etats-Unis devrait d’abord signaler son intention de dénoncer le traité. Puis les trois parties devraient négocier pendant au moins six mois les termes de la sortie de Washington. Je crois que, pendant cette période, les parties en présence auraient le temps d’approfondir leur compréhension de la situation et de mesurer les implications de leurs actes ».
Le diplomate, pour finir, précise que le texte actuel du traité peut cependant être actualisé.
La parole de l’artisan de l’ALENA
John Dimitri Negroponte connaît très bien le traité ALENA. En tant qu’ambassadeur des Etats-Unis au Mexique de 1989 à 1993, il a joué un rôle primordial dans la négociation du texte entre le Mexique et les Etats-Unis. Des observateurs bien renseignés lui en attribuent même la paternité[1].
Le rejet de la mondialisation et du libre-échange, aux Etats-Unis, a été identifié comme un facteur primordial de l'ascension électorale de Donald Trump. Le rejet du traité ALENA, au Mexique, a été l’une des raisons invoquée lors du soulèvement indigène de l’Armée zapatiste de libération nationale, qui occupe depuis 1994 une partie de l’état pauvre et agraire du Chiappas.
[1] Joseph Contreras (2009), "In the Shadow of the Giant: The Americanization of Mexico", pp. 40-42.