M. Apathie a pris la décision de ne plus revenir sur RTL après la polémique suscité par ses propos. Il faut tout de même prendre le temps d'analyser cette polémique. C'est un drame en trois acte : sidération, diffamation, suspension. Trois actes qui en disent long, en réalité, sur l'état de la France en 2025 et sur le regard que nous portons sur notre passé colonial.
D'abord la sidération. Dans son débat, M. Apathie explique que la France a fait des centaines d'Oradour-sur-Glane en Algérie, puis pose la question : « Est-ce qu'au moins nous avons conscience de cela ? ». La réponse est non. Mais avant de parler de l'Algérie, rappelons simplement ce que fut Oradour-sur-Glane : le massacre de plusieurs centaines et centaines d'enfants, de femmes et d'hommes civils et innocents durant la Seconde Guerre Mondiale par les nazis en les enfermant dans une église, et en y mettant le feu pour les asphyxier, puis les brûler. C'est une horreur.
Quand M. Apathie utilise donc l'exemple d'Oradour-sur-Glane, il est compréhensible que cela suscite de vives émotions puisque le souvenir est particulièrement douloureux, et que la mémoire de ce massacre est bien entretenue, ce dont on ne peut que se réjouir. Mais là où cette émotion devient problématique, c'est quand Florence Portelli (LR), sa contradictrice, s'exprime vivement contre les propos de Jean-Michel Apathie en rejetant en bloc l'idée que les soldats français aient massacré des innocents par centaines en Algérie et quand Thomas Sotto pose la question, d'un air choqué, de savoir si nous nous serions comportés comme des nazis en Algérie.
Non, M. Sotto. Ce sont les nazis qui se sont comportés comme nous.

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Je comprends bien que cela est violent, car l'histoire de la colonisation est un tabou en France. Nous avons profondément abîmé les terres que nous avons conquises dans le sang, et où nous avons laissé de larges plaies en partant. La colonisation, à mon sens, est un crime contre l'Humanité. Et au fil du temps cette part sombre de notre passé a été occulté.
Car Jean-Michel Apathie a raison historiquement, quand il dit que nous avons commis des Oradour-sur-Glane. Bien sûr, la comparaison est maladroite, et aurait pu être amenée d'une meilleure façon, mais les faits sont là : l'armée française a bel et bien mis le feu à l'entrée de grottes où des civils innocents s'étaient réfugiés afin de les asphyxier. La violence de la colonisation, qui a conduit à la mort de près d'un tiers de la population présente en Algérie avant notre arrivée (environ 850 000 tués sur 3 000 000) est une réalité.
L'acte 2, la diffamation, est tout simplement la façon avec laquelle M. Apathie a été calomnié et traîné dans la boue par toute la bollosphère, la fachosphère (appellez cela comme vous voulez). Sur CNEWS jusqu'à dans TPMP, le journaliste de RTL a été au centre d'une violente tempête de critiques... alors que les faits lui donnent raison. Et c'est là où l'acte final est profondément choquant : la suspention. Un journaliste, qui a fait correctement son travail et n'a pas commis de faute, se retrouve privé d'antenne par RTL, la radio où il travaille, sur la simple base d'une polémique monstre montée de toute pièce par l'extrême-droite. C'est une honte.
Pour conclure, je veux dire que je ne partage pas forcément les points de vue de Jean-Michel Apathie, et que je ne suis pas toujours d'accord avec ses analyses, ses éditos et ses prises de position. Mais je lui reconnais davantage de déontologie et de respectabilité qu'à bien d'autres journalistes. Il y a des moments où les médias se doivent d'être responsables, fiables, et intraitables sur les faits. La sanction contre Apathie résonne en ce sens comme un acte lâche de la part de RTL, et surtout révélateur de la nouvelle période qui s'est ouverte : celle du mensonge, celle du faux, celle du révisionnisme. Celle de la post-vérité.