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Billet de blog 10 février 2022

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Hécatombe de poissons : la France à contre-courant de la protection des océans

[Rediffusion] Pour Arthur Meeùs, juriste en charge de la pêche pour ClientEarth, les milliers de poissons morts flottant au large de la Rochelle illustrent le laxisme des autorités françaises et leur retard en matière de pêche durable.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La semaine dernière, les médias ont relayé les images et vidéos prises par l’ONG Sea Shepherd montrant environ 100,000 merlus bleus morts (couvrant un périmètre de 3000 m2) rejetés - accidentellement ou non - par des chalutiers industriels au large de la Rochelle, dans le Golfe de Gascogne. Les images ont rapidement fait le tour de la toile, posant de nombreuses questions alors que le One Ocean Summit se tient actuellement à Brest.

Etait-ce un simple « incident » comme se sont défendus les opérateurs de l’énorme navire-usine le Margiris, responsables de cette situation, ou un acte délibéré pour se débarrasser de poissons de moindre valeur commerciale au profit d’espèces plus rentables – ou rejets illégaux de poissons ?

La ministre de la mer Annick Girardin a réagi à cet évènement sur Twitter, demandant au Centre national de surveillance des pêches de « faire la lumière sur ce sujet afin d’identifier les causes de ces rejets importants de poissons. », ajoutant ensuite, « bien sûr, ces images choquent ». Pourtant, la France ne fait malheureusement pas figure d’exemple en matière de pêche durable. Au contraire, c’est un des pays européens les plus rétrogrades sur le sujet.

Quotas excessifs + rejets illégaux = surpêche chronique

La pratique qui consiste à rejeter les poissons non voulus à la mer pour éviter qu’ils soient déduits des quotas de pêche est illégale, mais largement pratiquée. C’est un problème majeur qui s’ajoute à celui des quotas de pêche fixés par les 27 Etats membres - dont la France - à des taux qui dépassent largement l’objectif de durabilité et les meilleurs avis scientifiques.

Ces quotas excessifs couplés aux rejets en mer mènent à une surpêche de près de 50% de nos stocks européens de poissons. Ce que nous avons vu dans le Golfe de Gascogne la semaine dernière est un instantané d’un problème beaucoup plus large – dont presque personne ne parle.

Et pourtant, les mesures tardent à venir, en France comme ailleurs pour faire appliquer la loi qui oblige les pêcheurs à débarquer au port toutes leurs prises.

La France montrée du doigt par l’Europe

Sans les images de Sea Shepherd, le deuxième plus gros chalutier du monde capable de pêcher 250 tonnes de poisson par jour n’aurait sans doute pas été inquiété par les autorités. La France contrôle très peu les opérateurs et administre encore moins de sanctions contre les infractions à la loi. Cela incite d’ailleurs les opérateurs de pêche à choisir les zones dans lesquelles ils pêchent en fonction du niveau de sanction qu’ils risquent.   

 La situation est si grave que la Commission européenne a d’ailleurs lancé plusieurs procédures d’infraction contre le gouvernement français pour avoir enfreint ses obligations en matière de contrôle des pêches, dont une spécifiquement sur des manquements au contrôle de l’obligation de débarquement des poissons au port.

Il ne s’agit pas ici de mettre un policier derrière chaque pêcheur, mais sans un minimum de contrôle, les règles européennes visant à protéger les océans contre la surpêche et la destruction des écosystèmes ne seront jamais mises en œuvre.

Alors que le One Ocean Summit est en cours, et que la France porte la responsabilité de la présidence de l’Union européenne, nous demandons au gouvernement français de faire respecter la loi pour éviter ce genre de drame. Les écosystèmes marins ont un rôle majeur à jouer, non seulement pour assurer le futur des pêcheurs et des communautés côtières, mais aussi pour séquestrer le carbone dans les océans et limiter les changements climatiques. Il faut d’urgence les protéger.

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